Dans le documentaire L’Affaire d’Outreau, diffusé ce mardi 17 janvier 2023 sur France 2, François-Xavier Marécaux revient avec émotion sur le moment où son père, Alain Marécaux, a été incarcéré par sa faute.
“Il me semble que mon père m’a dit que tout allait bien se passer et que ça allait passer vite, se souvient François-Xavier Marécaux, 30 ans. On allait se revoir dans la journée, c’était l’histoire de quelques heures. C’est la dernière fois que l’on a vu nos parents avant plusieurs mois.” Au début des années 2000, Alain Marécaux, huissier de justice, se retrouve propulsé au cœur de l’affaire d’Outreau. Accusé d’avoir participé à un réseau pédophile par Myriam Badaoui, elle-même en détention provisoire pour viols sur ses quatre fils, l’homme de 36 ans est interpellé le 14 novembre 2001 sous les yeux de ses enfants. François-Xavier, 9 ans, voit sa vie bouleversée.
Après l’interpellation de son père, le petit garçon, son frère et sa sœur sont conduits au commissariat pour être interrogés par la police. Le garçonnet dresse alors le portrait d’un père “sévère“, qui lui donnait “quelques fois” “des coups de martinets et des claques“. Avec toute son innocence d’enfant, il raconte également les moments de douceur de son père. “Parfois il me demandait si je voulais jouer à la machine à bisous”, confie-t-il, loin de se douter que cette phrase suffira à faire incarcérer son père pendant deux ans.
“Maintenant, j’ai quatre enfants et je joue à la machine à bisous avec eux et il n’y a pas de mal du tout à tout ça”
Vingt ans après, François-Xavier se souvient de ce témoignage comme si c’était hier. Dans le documentaire L’Affaire d’Outreau, diffusé ce mardi 17 janvier 2023 sur France 2, il fait part de sa culpabilité, lui dont les propos enfantins ont été déformés au point de détruire la vie de sa famille. “On ne peut pas changer les propos qu’on a eus. Ils ne sont pas faux non plus“, confie-t-il, la gorge nouée. Maintenant j’ai trente ans. Avec le recul, je pense que j’aurais plus approfondi les réponses pour éviter la malinterprétation de tout ça.” Et d’ajouter, au bord des larmes : “Maintenant, j’ai quatre enfants et je joue à la machine à bisous avec eux et il n’y a pas de mal du tout à tout ça.”
Si François-Xavier est si bouleversé par ces souvenirs, c’est que sa petite phrase a brisé sa famille et bouleversé sa vie entière. “À la suite de l’audition, on est tous placés dans la même famille d’accueil, raconte-t-il dans le documentaire L’Affaire d’Outreau. Ça va durer quelques semaines, jusqu’au moment où avec mon grand frère, il y avait trop de soucis. Le fait que mon père soit allé en prison est en partie de ma faute. Il le sait et il me le fait payer. Il commence à être violent et on a été séparés. Il est parti en famille d’accueil et quelques temps après, ça a suivi avec ma petite sœur. On passe de la vie de famille, où tout va bien avec l’école et tout ça, à la famille d’accueil ensemble, à la famille d’accueil tout seul.”
De son côté, Alain Marécaux a été reçu par le juge Fabrice Burgaud, en charge de l’instruction. Il a expliqué que la “machine à bisous” était un jeu inoffensif, qui consistait à faire des bisous “sur la main, l’épaule, la joue et le dos“. “Ce sont des jeux que je faisais avec mes enfants, surtout le dimanche matin, explique l’ex-huissier de justice dans le documentaire. Je travaillais beaucoup et de temps en temps, le dimanche matin, quand je n’étais pas à l’étude, j’étais chez moi et on jouait tous ensemble au réveil, dans le lit.” Malheureusement, son témoignage n’a pas suffi. Incarcéré pendant 691 jours sur les bases du témoignage de son fils, Alain Marécaux a été acquitté en 2005. Il a fait trois tentatives de suicide pendant sa détention.