Un matin, en arrivant chez ses patrons, Nina, dame de ménage, les découvre assassinés. Alors que les mensonges du fils des victimes la désignent comme la coupable idéale, elle clame son innocence.
Argentine, le 10 octobre 2022… “Je suis innocente !” C’est par ces mots percutants que María “Nina” Ninfa Aquino a commencé sa conférence de presse organisée par son avocat, Hugo López Carribero, à sa sortie de prison. Visiblement épuisée par son incarcération de treize jours, la sexagénaire ne comprend toujours pas comment les forces de l’ordre ont pu imaginer qu’elle était responsable de la mort d’Enrique José del Río, 74 ans, et de María Mercedes Alonso, 72 ans, deux conjoints retraités plutôt aisés, abattus dans leur garage, à l’intérieur de leur voiture, à Vicente López, un quartier chic de la banlieue de Buenos Aires.
Nina était leur femme de ménage depuis plus de douze ans et elle entretenait d’excellentes relations avec son couple d’employeurs… Tout en prenant soin de remercier son avocat, mais aussi ses quatre compagnes de cellule sans lesquelles elle n’aurait pas pu tenir durant cette épreuve, elle a conclu fermement : “Ils cherchaient un ou une coupable et, moi, une pauvre vieille femme, j’étais toute désignée !”
“Une policière m’a mis les menottes. On m’a dit que j’allais vivre une journée horrible…”
Ce 25 août 2022, lorsque Nina arrive, comme d’habitude, sur son lieu de travail, il n’y a pas un bruit dans la maison de ses patrons. La femme de ménage pense alors que les deux retraités sont encore au lit, comme cela leur arrive parfois. Mais en découvrant leur chambre vide, elle s’inquiète et appelle la police. Ce sont les forces de l’ordre qui, arrivées sur les lieux, découvrent, dans le garage, les corps d’Enrique et de María assis dans leur Mercedes, ceintures de sécurité mises. Ils ont tous les deux reçu une balle dans la nuque.
L’enquête commence alors et, rapidement, une perquisition est organisée au domicile de Nina. Les policiers y découvrent une pochette de luxe en cuir rouge qu’ils emmènent pour vérification. “C’était un cadeau de ma patronne”, leur explique-t-elle. Mais le lendemain, lorsqu’elle est amenée au commissariat pour sa déposition, l’enfer commence. “Quand je suis arrivée, j’ai reconnu le fils cadet de mes patrons, Martín Santiago del Río. Etrangement, il m’a tourné le dos et ne m’a pas parlé alors que nous nous connaissions depuis longtemps… Il est parti et une policière m’a alors mis les menottes et m’a emmenée au bureau du procureur. On m’a dit que j’allais vivre une journée horrible.” La femme de ménage découvre alors que Martín a déclaré que la fameuse pochette rouge était un souvenir que sa mère conservait précieusement depuis plus de quarante ans, et qu’il était impossible qu’elle ait pu l’offrir.
“Mes compagnes de cellules changeaient de chaîne dès qu’on parlait de moi”
Sur cette accusation de vol, Nina est incarcérée et immédiatement mise en cellule. Ce séjour en prison sera terrible : “A 64 ans, traverser tout cela… C’était horrible, très douloureux. Je n’ai presque pas dormi. Et il y avait la télévision qui marchait à tue-tête et qui racontait ce que j’avais soi-disant fait… Mes compagnes de cellules ont fini par changer de chaîne dès que les infos arrivaient, pour me préserver, parce que je pleurais sans cesse ! Mais je n’ai jamais perdu espoir. Je savais qu’ils n’allaient pas me laisser en prison et qu’ils allaient me libérer.” Elle avait raison…
Car la pochette rouge qui l’avait envoyée en prison sera finalement son ticket de sortie. En s’intéressant de plus près à l’objet, la police découvre en effet que la marque de maroquinerie luxe qui l’a fabriquée, Prüne, a été créée en 1999. On est donc bien loin des quarante ans dont parlait le fils des victimes. Les soupçons se tournent alors vers lui…
Rapidement, les indices pointant vers le fils des victimes s’accumulent
Le temps d’obtenir des preuves pour inculper le suspect, le procureur décide de maintenir Nina en détention. Et, rapidement, les indices s’accumulent. D’abord, la police découvre que les enregistrements de la caméra de la maison des retraités ont été effacés le jour des meurtres… Or la femme de ménage était incapable de manier l’appareil. Une autre caméra de surveillance, située dans la rue, montre un homme déambuler devant la maison des victimes peu avant l’heure présumée du meurtre. Et cette personne boite. Comme Martín.
En s’intéressant directement à lui, les enquêteurs découvrent qu’il vivait au-dessus de ses moyens. Il venait même de s’acheter une Ferrari ! Croulant sous les dettes, il en était venu à la conclusion que seul son héritage aurait pu le sauver de la banqueroute. Après une perquisition à son domicile, les enquêteurs mettent la main sur un calibre 9, du même modèle utilisé pour tuer ses parents. Cette accumulation d’indices décide enfin le procureur à ordonner la libération immédiate de Nina, qui doit désormais vivre avec le lourd souvenir de cette épreuve, et de ses conséquences. “Je me retrouve aujourd’hui sans travail, sans rien. Maintenant, je doit compter sur ma fille pour me nourrir et c’est très douloureux : j’ai travaillé toute ma vie et je n’ai jamais dépendu de personne.” Une injustice que rien ne réparera.