Depuis la découverte du corps de la petite Lola, 12 ans, dans le 19e arrondissement de Paris, l’affaire secoue toutes les sphères de la société. Côté politique notamment, la droite et l’extrême droite ont accusé l’Etat pour son inaction au sujet de la présumée meurtrière visée par une Obligation de quitter le territoire français (OQTF). Outre l’Etat, les féministes sont aussi pointées du doigt pour leur silence. « Alerte disparition : des féministes concernant l’assassinat de Lola », ironise une Twittos.Sur Facebook et Instagram, un post publié par le média Occidentis est devenu viral en fin de semaine dernière. Le média pointe du doigt en particulier l’association Nous Toutes. « Dans une conversation privée consultée par Occidentis, l’association NousToutes déclare ne pas vouloir communiquer sur l’affaire Lola car elle ne souhaite pas devenir la “rubrique faits divers d’un journal” sinon “nous publierions tous les jours”. » Très vite, les réactions vont bon train sous la publication. « Nous toutes, cela dépend avec qui », accuse l’un. « Nous Toutes (sauf celles agressées par des immigrés), il ne s’agirait pas de faire des amalgames », dénonce l’autre. Pour comprendre « ce silence », 20 Minutes est allé à la rencontre du collectif féministe.FAKE OFFMardi 18 octobre, Georges Jordito – directeur du média le Livre Noir – publie cette dite conversation tenue avec le collectif Nous Toutes sur son compte Twitter. « Pourquoi vous ne parlez pas de la petite Lola qui a été massacrée ce week-end ? », questionne la personne. « Pas assez d’infos pour savoir si c’est un féminicide pour le moment », répond le collectif, avant d’ajouter plus tard dans la conversation : « Vous devez mal nous connaître. » Dans les commentaires, l’association sera largement accusée de « choisir ses victimes ».UNE FAKE NEWS A VERIFIER ? PASSEZ PAR WHATSAPPPour répondre à ces accusations, il faut revenir sur le rôle du collectif Nous Toutes qui, selon sa charte, a pour objectif « d’en finir avec les violences sexistes et sexuelles ». Son combat est « uniquement centré » sur cette cause. Depuis janvier dernier, le collectif féministe publie notamment son propre décompte des féminicides. « Pour cela, nous avons travaillé avec d’autres organisations pour pouvoir se mettre d’accord sur les définitions et comment comptabiliser ces cas », explique une membre du collectif.L’objectif ? Avoir la définition la plus inclusive des différents cas de féminicides. En France – exception rare dans le monde –, les féminicides ne considéraient que les meurtres d’un compagnon ou d’un ex-compagnon. En prenant exemple sur les autres pays, la définition a été élargie à « un meurtre par une femme parce qu’elle est femme », et a également intégré les personnes trans.« Un meurtre affreux et évidemment condamnable »Au sein du collectif Nous Toutes, ce processus d’organisation a permis de se mettre d’accord sur la terminologie des féminicides. Désormais, une équipe d’une vingtaine de militantes est même dédiée à répertorier les cas pouvant être considérés comme tels, et ce par rapport aux définitions élaborées. Qu’en est-il pour le meurtre de la petite Lola ? « Pour l’instant, l’équipe qui travaille dessus ne l’a pas considéré comme un féminicide, ce qui n’enlève en rien du fait que ça soit un meurtre affreux et évidemment condamnable », insiste notre interlocutrice.En effet, les éléments de l’enquête pour le moment ne permettent pas de décrire le meurtre comme un féminicide, car selon la définition dictée plus tôt, Lola n’a pas été tuée car elle était une fille. Le geste de Dahbia B. reste inexpliqué aujourd’hui et des expertises psychiatriques doivent encore être établies. De son côté, le collectif assure que si d’autres éléments permettant de qualifier un féminicide survenaient dans l’enquête, les membres n’hésiteraient pas à le communiquer.Ne pas rentrer dans la récupérationAu sein du collectif Nous Toutes, les membres regrettent la récupération politique faite sur le meurtre de Lola. « Quand on observe qui s’est saisi de l’affaire, nous voyons que l’extrême droite essaye de faire avancer son propre agenda politique », déplore la membre du collectif qui dénonce son instrumentalisation. « Nous ne sommes pas dupes, nous voyons bien que ça ne crée pas les mêmes réactions quand il s’agit d’autres violences faites aux enfants, comme les incestes », questionne la membre.Selon cette dernière, les accusations à l’encontre de Nous Toutes « ne sont pas de bonne foi » et contribuent à alimenter le « backlash féministe » en fabriquant des polémiques. Et la membre du collectif de conclure : « La famille en deuil a exprimé très clairement la volonté de ne pas instrumentaliser politiquement, c’est important de le respecter. »Faits diversMeurtre de Lola : Dignité et émotion au rendez-vous pour dire adieu à la collégienneSociétéMeurtre de Lola : La famille « a besoin du respect et de l’affection de la nation », assure Emmanuel Macron