Dans la capitale britannique, la méthode a initialement été développée pour lutter contre les délits à scooter. Mais sa dangerosité est régulièrement pointée du doigt.
En déplacement lundi à Marseille, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a annoncé que 10.000 opérations de contrôle allaient être menées en août en France afin de renforcer la lutte contre les rodéos urbains. Le week-end dernier, deux enfants ont été grièvement blessés à Pontoise (Val-d’Oise), après avoir été percutés par un jeune homme de 18 ans.
Mais dans les rangs des forces de l’ordre, c’est surtout l’impuissance face à ce fléau qui prédomine, bien que la loi du 3 août 2018 a créé un délit de rodéo urbain. Il est toujours impossible pour les policiers de s’engager dans une course-poursuite avec les suspects, afin de ne pas risquer un accident, d’autant que leur responsabilité juridique et administrative est systématiquement engagée.
Face à ce constat, certains réclament un changement radical de la législation, à l’image de ce qui se fait à Londres. Dans la capitale anglaise, la police a en effet l’autorisation d’avoir recours à la méthode du “contact tactique”, qui consiste à faire chuter le suspect en fuite en le percutant.
“À Londres, les policiers peuvent mettre hors d’état de nuire un individu en rodéo moto en le percutant tactiquement. Cela empêche l’individu de pénétrer en zone piétonne. Nous pouvons l’expérimenter en France. Plus d’outils tactiques pour nos policiers, moins pour les délinquants”, a écrit sur Twitter le député Horizons de l’Indre François Jolivet.
Outre-Manche, la méthode n’a initialement pas été développée pour lutter contre les rodéos urbains, mais pour interpeller les auteurs de délits à scooter, nombreux à Londres.
Les vidéos partagées par la police londonienne sont impressionnantes. On y voit les suspects percutés par une voiture de police, avant de finir leur course sur le capot du véhicule, ou projetés plusieurs mètres plus loin.
“À la différence d’une voiture ou d’une fourgonnette, les deux-roues sont instables. Le moindre petit contact peut les renverser et permettre l’arrestation du conducteur. Les policiers cherchent donc l’occasion de le faire à faible allure”, a indiqué à nos confrères de TF1 Peter Kirkham, ancien inspecteur en chef de la police londonienne.
Appliquer une telle mesure en France est-elle envisageable? “On considère qu’il n’y a pas la sécurité juridique pour les agents. Donc nous ne sommes pas près de l’accepter. Après, si demain on nous somme de le faire, et qu’on a changé les textes et que l’on protège nos collègues, on verra notre position”, explique au micro de BFMTV Jérôme Moisant, secrétaire national du syndicat policier Unité SGC police FO.
La police londonienne ne nie pas que cette méthode d’interpellation musclée est dangereuse. Plusieurs blessés ont été recensés, débouchant à chaque fois sur une enquête. Pour le consultant police-justice de BFMTV Guillaume Farde, les risques que soulève ce “contact tactique” rendent cette pratique contre-productive.
“Les efforts sont plutôt à mettre sur retrouver les véhicules, les immobiliser, les saisir, les détruire dans certains cas… Et c’est ainsi que le problème pourra être enrayé. Pas en blessant grièvement le conducteur d’une moto en le faisant chuter”, explique-t-il.
Du côté de la police de Londres, on défend la technique, qui a permis entre 2017 et 2018 de faire baisser de 36% les délits à scooter. “Vous n’allez bien sûr pas écraser quelqu’un. Les policiers font en sorte d’utiliser cette technique de façon à causer le moins de blessures possibles. Ça peut causer des blessures, oui, mais comme pour une matraque, du gaz ou un taser”, fait valoir Peter Kirkham.
Alors que ce contact tactique était à l’origine uniquement destiné aux suspects munis d’un casque, sa pratique a été récemment élargie. Désormais, aucune distinction n’est faite par la police londonienne.