Un nourrisson de 14 mois a été retrouvé mort mercredi sur la banquette du véhicule de son père qui l’y avait laissé avant de se rendre sur son lieu de travail, dans les Pyrénées-Atlantiques. Devant de pareils cas d’oubli, la justice choisit généralement de ne pas accabler le parent et se contente d’une déclaration de culpabilité, sans l’assortir d’une peine.
C’est la dernière illustration de ce que les spécialistes appellent le syndrome du “bébé oublié” endeuillant certaines familles lors des périodes de grande chaleur. Mercredi en fin d’après-midi à Bordes, dans les Pyrénées-Atlantiques, un bébé de 14 mois a été retrouvé mort dans la voiture de son père, qui avait semble-t-il oublié de le déposer à la crèche avant de garer son véhicule sur le parking de son usine et d’y prendre son poste pour la journée. Les deux parents ont aussitôt été admis, en état de choc, au Centre hospitalier de Pau.
Mais tandis que le parquet du chef-lieu des Pyrénées-Atlantiques a ouvert une enquête pour homicide involontaire, il apparaît que la dimension particulièrement douloureuse de ces drames influence la réponse pénale. La justice préfère en général ne pas accabler le parent négligent, et le reconnaître comme coupable sans pour autant lui attribuer une peine.
Caty Richard, avocate au barreau de Pontoise, rappelle sur BFMTV que c’est au parquet que revient dans ces situations de trancher sur “l’opportunité des poursuites”.
“La décision qui suivra pourra être tout à fait symbolique, c’est-à-dire une simple déclaration de culpabilité, sans peine”. L’avocate souligne qu’il “y a encore 20 ou 30 ans”, il était même fréquent que le parquet renonce aux poursuites, estimant que l’affliction des parents était déjà une “peine suffisante pour eux”.
“Aujourd’hui, les mentalités ont changé et on estime en tout état de cause que la justice doit passer”, contrebalance-t-elle. Mais la bienveillance prime encore, dans l’énoncé de l’éventuel verdict comme dans la procédure antérieure: “Il n’est pas du tout obligatoire de les mettre en garde à vue. On peut les entendre sous le régime de l’audition libre.”
“Pour le qualifier juridiquement, il faut dire qu’il s’agit d’un homicide involontaire et à partir du moment où on est dans le cadre d’un homicide involontaire, ça veut dire qu’on a donné la mort mais qu’on ne le voulait absolument pas, qu’on ne voulait même pas nuire”, justifie Cathy Richard.
Dans ce contexte, on considère la mort du bébé en tant qu'”accident domestique”, comme dans le cas de la noyade d’un enfant dans une piscine.
La psychologue-clincienne parisienne Johanna Rozenblum souligne de son côté que la malveillance intervient rarement dans ces drames.
“Les cas de maltraitance ne représenteraient que 13% de ces cas. La plupart du temps, c’est lié à un épisode de trouble cognitif où la mémoire du quotidien prend le pas sur la mémoire prospective, celle qui nous permet de gérer les événements inhabituels comme lorsqu’on doit faire un crochet pour déposer son enfant à la crèche”, développe-t-elle. “Et tout ça serait exacerbé par la dépression, la consommation d’alcool ou de substance psychoactive, ou une grande fatigue et charge mentale”.
“Dans ces cas-là, on est toujours face à une détresse énorme”, fait valoir Cathy Richard.
Une détresse psychologique qui incite les institutions à accompagner les parents plutôt qu’à les condamner.
“On est dans le cas d’une prise en charge liée à un trouble de stress post-traumatique sévère. Les parents sont souvent en état de choc, un état nécessitant une hospitalisation”, reprend Johanna Rozenblum, avant de caractériser: “La verbalisation dans un premier temps est souvent impossible à cause d’une phase de sidération puis viennent les manifestations de stress post-traumatique”.
Au Centre hospitalier de Pau, les parents de la petite victime de 14 mois bénéficient actuellement du soutien d’une cellule psychologique.