Salah Abdeslam, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible, n’a pas fait appel. Invités sur le plateau de BFMTV ce mardi, ses avocats ont une nouvelle fois exprimé leur déception quant à un verdict qu’ils jugent trop sévère.
Il avait la possibilité de faire appel jusqu’à lundi soir, minuit, mais ne l’a finalement pas fait. Les avocats de Salah Abdeslam, condamné à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible à l’issue du procès du 13-Novembre, ont annoncé dans un communiqué ce mardi matin que leur client, comme tous les autres accusés, ne ferait pas appel du verdict.
“On a une option, une fois qu’on est condamné par la Cour d’Assises. C’est dix jours de réflexion pour savoir si on a envie d’un nouveau procès, ou si la sanction ne nous va pas, mais on s’y résigne. C’est ce qu’il s’est passé pour Salah Abdeslam”, commente Me Olivia Ronen, invitée avec Me Martin Vettes sur le plateau de BFMTV ce mardi.
Si les avocats se refusent à commenter l’état d’esprit de leur client après la fermeture définitive du dossier, ils affirment avoir à présent à coeur de surveiller les conditions de détention de Salah Abdeslam. “Là aussi, je sais qu’on touche à un sujet sensible. Il est de notre rôle de veiller à ce que toutes nos règles soient bien appliquées.”
Interrogés sur leur réaction après le refus de leur client de faire appel, les deux avocats ne cachent pas avoir été déçus, estimant que la peine dont a écopé Salah Abdeslam était trop lourde au regard des faits reprochés. La peine de sûreté incompressible n’avait en effet été attribuée que quatre fois en France auparavant, uniquement pour des meurtres d’enfants accompagnés de tortures ou de viols, comme ça a été le cas pour le tueur en série Michel Fourniret.
“Cette peine n’a été donnée qu’à des personnes qui avait un parcours typique de psychopathe, qui étaient considérées comme dangereuses, qui avaient violé, tué”, décrit Me Olivia Ronen.
Contrairement, souligne-t-elle, à Salah Abdeslam, que les experts psychiatres n’ont pas décrit comme étant un “psychopathe”, comme “dangereux”. “On a une peine déconnectée de tout ce qu’on a pu entendre”, conclue-t-elle, dénonçant un verdict “purement symbolique”.
“Nous ne sommes pas là pour prendre les décisions à sa place, c’est à lui que ce choix revient. Même si nous étions prêts à aller en appel – il y avait un beau combat judiciaire à mener sur le principe de la perpétuité incompressible – nous comprenons son choix”, poursuit son confrère, Me Martin Vettes.
Ce que les avocats du principal accusé de ce procès hors-normes regrettent, c’est un verdict selon eux démesuré par rapport à l’implication réelle de Salah Abdeslam dans les attentats du 13-Novembre. “On va le mettre sur le même plan que les personnes qui ont tiré au Bataclan”, estime Olivia Ronen sur notre antenne.
“Il est vaincu, Salah Abdeslam. Il est dans nos geôles. Cette peine d’incompressibilité ôte tout espoir de sortie”, poursuit-elle.
D’autant que, précise l’avocate, la défense a réussi à “démonter” certains éléments qui apparaissaient comme des “vérités établies” au cours de l’instruction, et qui ne pouvaient en fait pas être présentées comme des certitudes: “Nous on est là pour ça, pour souligner que la ceinture que celui-ci portait, elle était défectueuse, mais que rien ne nous dit qu’elle a été actionnée volontairement.”
“Là où on peut sinterroger, c’est de savoir si ces débats ont eu une véritable utilité sur le prononcé de la peine. On a l’impression que, quelque part, c’était joué d’avance”, regrette Martin Vettes.
Par définition, Salah Abdeslam ne pourra normalement jamais sortir de réclusion. S’il y a une possibilité de sortie, celle-ci est infime, résume l’avocat. “Il y a un espoir qui est très mince et que ce verdict a réduit à peau de chagrin: au bout de trente ans il pourra demander dans un premier temps le relèvement de cette période de sûreté, et si cette demande aboutit, il pourra demander l’aménagement de sa peine. Mais là encore, c’est très compliqué, et ce verdict a la vocation de l’enfermer à vie.”
Malgré tout, les avocats insistent sur la nécessité d’un tel procès pour les victimes qui, disent-ils, les ont touchées lors de leurs dépositions à la barre. “Il était important que les victimes puissent se faire entendre dans l’enceinte judiciaire”, déclare Martin Vettes.
“Cette oeuvre de justice, on n’a pas voulu la faire contre eux, mais avec eux. On a envie, à la fin de cette audience, d’être dans une espèce d’apaisement”, conclut sa consoeur.