Depuis un an “en première ligne face au Covid”, “non-stop en salle avec les patients et les familles”, les jeunes internes en médecine cumulent les heures et s’usent à petit feu. “Les internes sont invisibles mais sont les soldats du front”, explique à l’AFP Anne Rocher, psychologue clinicienne à l’hôpital Avicenne à Bobigny, qui rappelle qu’ils n’ont que 25 ans en moyenne.
L’internat, 3e cycle des études de médecine, débute 7 ans après le bac et dure de 3 à 6 ans selon les spécialités. La France compte un peu plus de 30 000 internes travaillant au sein de ses hôpitaux. “En théorie, le temps de travail d’un interne, c’est 48 heures par semaine avec six gardes maximum par mois … mais tout le monde s’en fiche”, regrette Marie Saleten, interne de réanimation et vice-présidente du syndicat des Internes des hôpitaux de Paris. Selon une étude menée entre mai et juillet 2019 par l’Intersyndicale nationale des internes (Isni), ils effectuent en réalité 58 heures hebdomadaires en moyenne, sans récupération.
Et “avec le Covid, on atteint plutôt 80 heures et 8 à 10 gardes par mois”, alerte Marie Saleten. “Les gardes, c’est 24 heures. Et pendant l’épidémie de Covid vous ne fermez pas l’oeil, même pas pour une micro-sieste”, raconte Gaétan Casanova, président de l’Isni. Un temps de travail à rallonge qui peut être synonyme d’épuisement et d’anxiété et n’est pas sans risques psychosociaux.
Selon une enquête réalisée en 2017 à l’initiative de l’Isni, 23,7% des internes avaient eu des idées suicidaires, 28% avaient souffert de troubles dépressifs, 66% de troubles anxieux. Depuis le début de l’année 2020, cinq internes se sont donné la mort. “Un suicide tous les 18 jours”, note Gaétan Casanova. Trois fois plus que la population générale, selon l’Isni.