La petite Mia, enlevée mardi dans les Vosges, et sa mère restaient introuvables vendredi, mais le scénario « minutieusement » préparé du rapt de l’enfant, commandité par sa mère, et le profil anti-système des ravisseurs présumés ont été percés au grand jour.
Quatre hommes, dont les trois ravisseurs présumés, ont été placés en garde à vue, a indiqué vendredi le procureur de la République d’Epinal Nicolas Heitz lors d’une conférence.
Leur garde à vue a été prolongée de 24 heures et pourrait l’être encore de 48 heures supplémentaires, soit jusqu’à dimanche, a indiqué à l’AFP le procureur de la République de Nancy.
Celui-ci est désormais en charge de ce dossier, s’agissant d’un enlèvement « en bande organisée » qui exige une compétence spécifique que le tribunal d’Epinal ne possède pas.
Au cours de leur audition, les suspects ont déclaré avoir agi à la demande de la mère qui voulait récupérer sa fille de 8 ans dont elle n’avait plus la garde, a expliqué Nicolas Heitz.
« Lola Montemaggi les sollicitait via internet pour récupérer sa fille dont elle s’estimait injustement séparée dans le but de partir à l’étranger », a précisé le magistrat qui avait déclenché mardi soir le dispositif Alerte enlèvement.
« Leurs auditions sont globalement concordantes », a-t-il ajouté, précisant que l’un d’entre eux n’avait pas voulu s’exprimer. Les trois autres ont revendiqué une action qualifiée « d’extraction et d’exfiltration ».
Âgés de 23 à 60 ans et sans antécédents judiciaires, ces quatre hommes ont été arrêtés à Paris, en Seine-et-Marne, aux Lilas (Seine-Saint-Denis) et en Meurthe-et-Moselle.
Le « script d’un discours à tenir devant la grand-mère de Mia pour se faire passer pour un éducateur » de la Protection judiciaire de la jeunesse a été découvert chez celui interpellé à Paris.
Cet homme de 58 ans s’est décrit devant les enquêteurs comme une « personne dissidente » et « résistante à la barbarie de ce système », « fier » de ce qu’il avait fait « à la manière d’Arsène Lupin », selon le procureur.
Composition d’explosifs
Chez le suspect de 23 ans, « des éléments susceptibles d’entrer dans la composition d’explosifs étaient découverts », a indiqué M. Heitz. Ce volet de l’enquête est entre les mains du parquet national anti-terroriste (Pnat).
Au cours de sa garde à vue, le suspect a affirmé avoir agi « dans le but de sauver la vie de l’enfant » même s’il a admis avoir « peut-être été manipulé ».
Une enquête préliminaire confiée au Pnat et visant ces quatre personnes avait déjà été ouverte récemment pour « association de malfaiteurs terroriste », selon une source judiciaire.
« Ils évoquaient pêle-mêle les institutions, l’Élysée, des centres de vaccination, des centres de finances publiques, des bâtiments administratifs… » comme cibles potentielles, selon une source proche de l’enquête.
Selon une autre source, leur profil « s’apparente à la mouvance survivaliste ».
Compte tenu des investigations déjà réalisées et la proximité des Vosges avec l’Allemagne, la Suisse et la Belgique, « il n’est pas à exclure que (Mia et sa mère) aient pu quitter le territoire national », a prévenu le procureur.
« Des diffusions internationales ont été réalisées pour faciliter leur localisation et leur appréhension », a-t-il indiqué.
Mia Montemaggi a été enlevée mardi par trois hommes, par ruse et sans violence, alors qu’elle était hébergée chez sa grand-mère maternelle, désignée depuis janvier « tiers de confiance » par la justice, dans le village des Poulières, à une trentaine de kilomètres d’Epinal.
Sa mère, Lola Montemaggi, 28 ans, qui n’avait plus le droit de voir Mia seule et « voulait vivre en marge de la société », a également disparu depuis.
Deux des ravisseurs – un troisième étant resté au volant du véhicule qui a emmené l’enfant – se sont fait passer pour des représentants de la protection de l’enfance, avec des papiers à en-tête du ministère de la Justice.
Selon le procureur, les ravisseurs ont remis l’enfant à sa mère « environ 20 minutes plus tard ».
Au regard du « caractère très organisé de cette action et de la sophistication des techniques utilisées », l’enquête, qui mobilise 90 militaires, porte désormais sur le chef de « enlèvement de mineur de moins de 15 ans commis en bande organisée ». Ses auteurs encourent la réclusion criminelle à perpétuité.
Toute personne ayant des informations sur ce rapt est invitée à appeler le 0 800 36 32 68.