« Impressionnant ! », « Un chef-d’œuvre ! » Qu’il semble loin, le temps où Elon Musk disait sur X tout le bien qu’il pensait de Pierre Poilievre, le chef du Parti conservateur canadien ! Du raz-de-marée annoncé dans les sondages, il ne reste quasiment plus rien. Le chef de l’opposition, en pleine campagne électorale, s’est pris dans la figure la vague trumpienne, sur laquelle il surfait jusqu’alors.
Effacés, les 25 points d’avance qu’il comptait encore en janvier sur le Parti libéral – affaibli par dix années de gouvernance Trudeau et promis à une raclée historique ! À l’image du 24 Sussex, la résidence officielle des Premiers ministres à Ottawa, qui menace littéralement de s’écrouler, tout semble à reconstruire à droite. Dans un temps record, car les élections législatives anticipées se tiennent le 28 avril.
Trump n’a pas été tendre. En traitant régulièrement ce gigantesque pays de « 51e État », en qualifiant l’ex-Premier ministre de « gouverneur » et en menaçant son économie par l’augmentation des droits de douane sur l’industrie automobile canadienne, le président américain n’a pas aidé l’ex-favori de Musk. Pire, Trump a ouvertement dit qu’il préférait une victoire de Mark Carney, chef du Parti libéral et successeur de Trudeau. Il y a dix jours, interrogé sur Fox News, le président américain a estimé qu’il était « plus facile de traiter avec un libéral ». Et, ajoutant encore un peu de dédain à l’égard du voisin qu’il menace d’annexion : « Je m’en fiche complètement. Ça ne m’importe absolument pas. »
Voilà Poilievre, 45 ans, pro de la politique depuis l’âge de 25 ans, orateur habile, obligé de démentir qu’il ait pu se sentir proche de Trump, hier inspirateur de sa ligne populiste, aujourd’hui adversaire d’un Canada qu’on n’imaginait pas être aussi patriote. Anti-immigration, anti-woke, libertarien comme Musk, le conservateur affirme désormais être « tout le contraire de Trump » et accuse ses adversaires d’avoir « affaibli le Canada ».
Chez les libéraux, on se frotte les mains. La rhétorique provocante de Trump a effacé l’impopularité de Trudeau. Carney a beau personnifier, à 60 ans, presque physiquement, l’insipidité de la technocratie anglo-saxonne, cet ancien patron des banques centrales du Canada et d’Angleterre vit une lune de miel inattendue avec les électeurs.
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Le Premier ministre de centre gauche, qui en a profité pour avancer les élections en dissolvant le Parlement, incarne l’anti-trumpisme auprès d’une population qui place les relations avec les États-Unis en tête de ses préoccupations. « Crise la plus importante de notre vie », refus de rencontrer le président américain tant qu’il n’aura pas reconnu la souveraineté du Canada : Carney entretient l’idée qu’il sera le meilleur rempart contre cette Amérique menaçante.
Rien n’est pourtant fait. Les libéraux reviennent de loin et les deux formations sont encore au coude-à-coude dans les sondages. Le refus de Carney de débattre face à Poilievre, sur TVA, réseau privé de télévision francophone du Canada, pourrait lui faire perdre des points au Québec. À la différence de Poilievre, adopté peu après sa naissance par un couple de Fransaskois – des francophones du Saskatchewan –, Carney n’est pas à l’aise en langue française, multipliant les erreurs de syntaxe mais aussi les bourdes sur la culture et l’histoire de la Belle Province. Si ce revirement dans les sondages est sans précédent, rien n’indique qu’il soit aussi solide qu’une cabane à sucre
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