Lorsqu’une légende rencontre un mythe, ou quand Lewis Hamilton débarque chez Ferrari. L’Anglais au corps généreusement tatoué, qui a fêté ses 40 ans le 7 janvier, collectionne les records. Depuis ses débuts en 2007 dans la discipline reine de la compétition automobile, le natif de Stevenage, ville moyenne au nord de Londres, détient par exemple le plus grand nombre de succès en Grands Prix (105), de podiums (202) et de pole positions (104). Sept fois champion du monde des pilotes, il partage ce record-là avec une autre légende de la Formule 1 et du sport en général : Michael Schumacher, dont les cinq derniers titres ont été décrochés avec Ferrari.
D’ailleurs, lorsque Sir Hamilton (il a été anobli en décembre 2021) a conquis sous les couleurs de Mercedes sa septième couronne en 2020, en pleine pandémie de Covid, les supporters italiens grimaçaient. De nombreux tifosi vouent une dévotion sans limite à « Schumi » et ils percevaient à l’époque le Britannique comme celui qui risquait de détrôner leur idole. Désormais, les fans le voient comme celui qui va permettre à la Scuderia de renouer avec les lauriers après plus de quinze ans sans gloire. Les ultimes sacres remontent à 2008 (constructeur) et 2007 (pilote). Une éternité pour la marque de Maranello.
Après trois années compliquées chez Mercedes, Hamilton a revêtu avec un enthousiasme de débutant la combinaison rouge : « Je ressens une émotion immense rien qu’en enfilant mon équipement. » Encore sous le charme – non feint – de sa nouvelle écurie installée dans la banlieue de Modène, le « British » poursuit : « Je me promène, il y a le panneau Ferrari, et je me dis : “Je suis vraiment là.” Il y a ce magnifique vieux bâtiment où Enzo [le fondateur, NDLR] avait son bureau. Chaque jour, je me rappelle ce que je vis. » À l’en croire, c’est « un rêve d’enfant » qui se réalise.
Lors de sa première visite officielle à Maranello fin janvier, ce féru de mode avait délaissé l’excentricité pour l’élégance à l’italienne, portant un long manteau noir sur un costume croisé de grand couturier et des chaussures vernies. Les cheveux soigneusement attachés en queue-de-cheval et les oreilles ornées de boucles, il s’est prêté à une séance photo devant une F-40 de collection.
Renouer avec les lauriers
Sur les réseaux sociaux, le cliché est immédiatement « liké » plus de cinq millions de fois ! Car Lewis n’est pas qu’un pilote génial, il est une personnalité à part entière. Engagé contre le racisme, il défend aussi l’écologie. Paradoxal quand on est au volant d’une F1, pensez-vous ? Il a en tout cas revendu son jet privé, et son vieux bouledogue Roscoe (plus d’un million de suiveurs sur Instagram) est paraît-il vegan. Comme son maître ! Ses détracteurs disent de lui qu’il est suffisant, peu sympathique et renfermé. Qu’importe, le mariage avec Ferrari, annoncé dès l’an dernier, emporte tout sur son passage.
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Ancien pilote de l’écurie, Jean Alesi, 60 ans, raconte au JDNews : « Toutes les marques se l’arrachent. Et moi, en tant que fan de Ferrari, de le voir en rouge, ça me fait très plaisir. » Peut-il gagner immédiatement ? « Le binôme qu’il forme avec Charles Leclerc sera explosif, répond l’Avignonnais. Ça sera magnifique. En popularité, il n’y a pas photo, Lewis est loin devant. Sur la piste, ça va être très beau parce qu’il y a beaucoup de respect et surtout, Charles a envie d’apprendre aux côtés de Lewis. »
Lors des essais hivernaux, fin février à Bahreïn, le Monégasque, de treize ans son cadet, constatait que la lumière s’était déplacée sur l’illustre aîné : « L’intersaison a été un peu plus dans l’ombre, mais j’ai apprécié. Je me suis concentré sur moi-même, je donne le maximum pour être prêt pour la première course, et j’attends vraiment cette année avec impatience. »
Comme son compatriote Alesi, René Arnoux, 76 ans, a roulé durant sa carrière dans les bolides à la livrée rouge. L’Isérois, que le JDNews a rencontré, est dubitatif : « Si la voiture est compétitive, Hamilton pourra peut-être remporter deux ou trois courses. Mais je ne crois pas qu’il puisse de nouveau être champion du monde. À la quarantaine, il y a un léger déclin, même si c’est trois ou quatre dixièmes de seconde par tour, c’est énorme en F1. Surtout que les concurrents commencent de plus en plus jeunes. »
L’intéressé, porté par l’amour des tifosi, se veut optimiste : « J’ai travaillé avec deux équipes championnes du monde [McLaren et Mercedes]. Je sais à quoi ressemble une écurie qui gagne. La passion ici est incomparable et nous disposons des ingrédients nécessaires pour nous imposer, il s’agit simplement de réunir toutes les pièces. » Visualise-t-il déjà une huitième couronne, ce qui en ferait l’homme avec le plus grand palmarès de son sport ? Catégorique, il répond : « Je ne pense pas au numéro huit. Pour moi, ce serait avant tout un premier titre avec l’équipe et il s’agit de savoir comment je peux y contribuer. »
Directeur depuis deux ans de l’écurie transalpine, le Français Frédéric Vasseur tempère la frénésie qui agite le paddock : « Tout le monde est plein d’enthousiasme. Avec l’expérience de mes deux premières années, je sais que nous devons calmer un peu les attentes. » Chez Canal+, diffuseur de la F1 dans l’Hexagone, qui se prévaut de plus d’un million de téléspectateurs en moyenne par Grand Prix, l’arrivée d’Hamilton fait scintiller les regards. « On est convaincus qu’on aura beaucoup de visionnages sur myCanal, prédit Laurent Dupin, rédacteur en chef Formule 1. Sportivement, Hamilton chez Ferrari, c’est une histoire énorme. Elle va conquérir plus que les passionnés qui regardent au milieu de la nuit une séance d’essais libres. »
Une nouvelle saison pimentée
Il y a toutefois une malédiction du champion qui débarque à Maranello. De grands noms comme Alain Prost, Fernando Alonso et Sebastian Vettel s’y sont cassé les dents. « Je dois avouer que lorsque j’ai appris la nouvelle de son arrivée chez Ferrari, j’ai été quelque peu surpris, je pensais le voir rester encore chez Mercedes », nous dévoile Vettel. L’Allemand, contrairement à son compatriote Schumacher, n’est pas parvenu à être sacré sous les couleurs rouges. Ses quatre couronnes consécutives ont été obtenues chez Red Bull. « Ce transfert spectaculaire va sans aucun doute mettre du piment dans cette nouvelle saison, précise-t-il, sachant que Lewis va vouloir mener la vie dure à Max Verstappen et qu’il en a le potentiel. »
Le Néerlandais, champion sortant, salue le talent de Sir Lewis. Il estime même qu’il va « renaître » chez Ferrari. À condition, encore une fois, que la voiture soit au niveau. Les premiers indices laissent penser que la première place se jouera entre Ferrari, Red Bull, Mercedes et McLaren. Quant à Hamilton, imagine-t-il continuer longtemps ? « Si j’avais la chance de remporter un autre titre, je ne me verrais pas m’arrêter. » De quoi ravir ses fans.
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