
« Je pense vraiment que le tennis masculin et féminin sont très différents. Les hommes sont juste plus costauds que les femmes. C’est comme comparer des pommes et des oranges. » En 2010, la superstar des courts Serena Williams clôture la guerre des sexes, sacralisée en 1973 par la victoire historique de Billie Jean King sur son compatriote masculin Bobby Riggs (6-4, 6-3, 6-3) devant 32 000 spectateurs médusés. Ce jour-là, une féministe en jupe blanche assommait en mondovision un misogyne invétéré. Aujourd’hui, Pauline Payet, 30 ans, ex-577e joueuse mondiale, relance à sa manière ce sempiternel débat.
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Pour faire taire les détracteurs, mais surtout pour se faire plaisir. Nom de code du projet : « Pauline versus men ». « C’est avant tout un défi personnel, me raconte-t-elle. Je ne suis pas dans le “girl power”, j’ai plutôt envie de savoir jusqu’à quel niveau je peux battre des hommes. C’est amusant et interactif, c’est aussi un bon moyen de mettre en avant le tennis féminin et de susciter des vocations. » Le concept est très simple : en partant de la troisième série, elle affronte chaque mercredi en indoor (sur surface rapide) un joueur qui se porte candidat en montant à chaque match d’un échelon la difficulté dans la pyramide des classements.
Objectif, aller le plus loin possible et partager cette expérience, avec une bonne dose d’humour et de dérision, sur sa chaîne YouTube. « L’ambition est d’aller jusqu’à 0, mais si je perds face à un 2/6 ou à un 1/6 [des classements élevés de joueurs amateurs, NDLR], je me sens libre de me donner une autre chance, pourquoi pas face à un joueur classé dans le top 100. » En attendant, elle reste sur quatre victoires face à des joueurs classés 30, 15/5, 15/4 et 15/3, les classements les plus modestes. Et chaque fois, sur le même score, 6-0, 6-0. « J’ai pris une belle fessée, avoue dans un éclat de rire Pierre Figliolini, classé 15/4. Ça pique, mais à mon niveau, pouvoir affronter une joueuse numérotée, c’est une chance inouïe. Elle a un sacré niveau. Je n’ai tenu que 40 minutes sur le court mais elle m’a donné plein de conseils, cela va m’aider à progresser. »
L’enthousiasme est contagieux. Depuis le coup d’envoi de ce challenge il y a un mois, le nombre d’abonnés a doublé. Plus de 10 000 passionnés suivent assidûment et gratuitement ses aventures. « Les images, le montage, les commentaires, je gère tout moi-même, c’est du 100 % fait-maison. » Budget serré. Première joueuse professionnelle créatrice de contenu, la joueuse réunionnaise a été contrainte de quitter le circuit professionnel en 2017, faute de moyens suffisants pour financer ses saisons.
« Mettre en avant le tennis féminin et susciter des vocations »
Depuis, elle donne des cours dans l’Ouest parisien, propose aussi des modules de coaching en ligne sur sa plateforme et continue à jouer sur le Circuit national des grands tournois, le plus haut niveau de compétition en France. « On ne cesse de citer le tennis en exemple comme le premier sport à avoir instauré l’égalité des primes dans les tournois du grand chelem mais il y a encore du boulot chez nous. Les dotations pour les hommes sont très souvent plus élevées. Quand je perds en quart de finale le week-end dernier près de Rouen, je gagne 200 euros mais, à l’arrivée, une fois tous les frais engagés déduits, il me reste 40 euros. Heureusement, la passion ne faiblit pas ! »
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