
Lundi dernier, Emmanuel Macron estimait qu’il fallait que « tous les gens identifiés comme dangereux soient repris » par l’Algérie. Mais il refusait la promesse de rapport de force esquissée autour de l’accord franco-algérien (AFA) de 1968 par le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur, lui préférant « un dialogue exigeant et respectueux ». Trois jours plus tard, jeudi, l’Algérie renvoyait en France deux de ses ressortissants pourtant expulsés. Le premier était arrivé illégalement, refusé à l’asile, détenteur de deux OQTF et condamné à une interdiction judiciaire de territoire de dix ans ; le second était connu de la police et de la justice pour vol et recel de vol, également titulaire d’une OQTF et d’une interdiction de retour… Mais tous deux étaient surtout détenteurs d’un passeport algérien. Ce qui n’a pas empêché l’Algérie, apparemment peu disposée au dialogue, à les renvoyer au prétexte de l’absence de laissez-passer consulaire (absolument pas nécessaire quand existe un passeport).
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L’histoire n’est pas la première, mais Emmanuel Macron insiste : « L’accord de 1968, c’est le président de la République. » Qui refuse donc de les dénoncer unilatéralement. Auprès du Figaro, son entourage a donné une explication : la crainte de la diaspora algérienne présente en France, qui pourrait « casser la baraque ». Le pouvoir algérien serait donc fort d’une capacité d’ingérence inégalée : celle de pouvoir mobiliser sa nombreuse diaspora contre une décision de la France – prise au nom de la sécurité des Français.
Un instrument exorbitant du droit commun
Or cette diaspora, qui fait si peur à l’entourage du président, s’accroît d’année en année… par le biais de l’accord franco-algérien (AFA) de 1968 qu’il refuse de dénoncer ! C’est la conclusion d’un rapport que le JDD a consulté, rédigé par les conseillers diplomatiques et immigration et cultes du ministère de l’Intérieur, avec les apports de la direction générale des étrangers en France (DGEF), de la direction des affaires européennes et internationales (DAEI) et de la représentation permanente de la France auprès de l’UE (RPUE). « Un instrument exorbitant du droit commun qui contribue à déréguler les voies d’établissement sur notre sol », entame la note sans détour.
La diaspora qui fait su peur à l’Élysée s’accroît d’année en année
D’abord parce que l’AFA facilite « considérablement » l’immigration familiale, poursuit la note qui détaille trois dispositions « qui constituent de puissants accélérateurs d’arrivées en France » : un, le regroupement familial est accéléré et protégé dans le temps, sans même que « les principes essentiels de la vie familiale en France » ne soient soumis à vérification. Deux, les conjoints algériens de Français peuvent entrer avec un simple visa court séjour (même expiré !), et obtiennent un certificat de résidence de dix ans au bout d’un an de mariage. Trois, enfin, les enfants « recueillis par kafala », sorte de tutelle sans adoption permise par le droit musulman, peuvent accéder à la nationalité française.
Le rapport s’attarde ensuite sur l’immigration professionnelle : « Aucune preuve de viabilité économique n’est exigée pour une demande de titre de séjour. » Résultat ? « Il est donc particulièrement aisé de rentrer sur le sol français par un tout autre moyen, puis de s’y maintenir au titre d’une activité professionnelle. »
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Le bras de fer avec l’Élysée se poursuit
Enfin, la note évoque le caractère très protecteur du certificat de résidence algérien, qui engendre une « quasi-impossibilité d’exercer une police du séjour ». Impossible de refuser la primo-délivrance de ce certificat, de dégrader un titre de séjour de dix ans ou de refuser son renouvellement au titre du trouble à l’ordre public, par exemple. Et même le contrat de « respect des principes de la République », qui peut justifier un retrait de titre de séjour en cas de non-application… ne s’applique pas aux Algériens !
Non seulement ces dispositions sont particulièrement libérales, mais elles sont « parfois détournées et utilisées comme moyen d’immigration, notamment par le biais de mariages au pays », achève la note. Des conclusions que Bruno Retailleau tentera certainement d’utiliser dans son bras de fer avec… le président de la République.
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