Une demi-heure après son investiture à la présidence des États-Unis, Donald Trump signait le retrait américain de l’accord de Paris. Si on peut légitimement débattre du climato-scepticisme assumé du nouveau locataire de la Maison-Blanche, il faut cependant saluer son réalisme vis-à-vis d’un traité dont l’institut Copernicus avait émargé l’acte de décès voici à peine deux semaines. L’année 2024 a dépassé le totem des 1,5° « horizon 2100 » avec… 75 ans d’avance !
Dix années après la grand-messe du Bourget, les résultats sont sans appel : les émissions continuent de s’accroître à un rythme soutenu tandis que la consommation d’énergies fossiles bat des records année après année. Développement légitime des pays émergents représentant aujourd’hui près de 70 % des émissions mondiales et 80 % de la population ou encore nouvelle logique de blocs poussant à l’affrontement plutôt qu’à la coopération, les raisons sont multifactorielles.
Il n’empêche que cette « croissance verte » qui devait relancer l’industrie européenne et générer des millions d’emplois est aujourd’hui un malade en phase terminale. Voitures électriques, batteries, hydrogène, éoliennes ou panneaux solaires, il ne se passe pas un jour sans qu’une faillite vienne noircir davantage le tableau. Ultime fabricant français de panneaux solaires, la société Photowatt vient de jeter l’éponge. Générant, sauf exception, des retours sur investissement très insuffisants (
Un virage à 180°
Trump ne s’est pas trompé. Face à cette situation désespérée, les grands investisseurs privés (le dernier en date est le premier fond mondial BlackRock) mais aussi les grands groupes énergétiques (Shell, BP, Exxon, Chevron) quittent le navire des renouvelables et retournent massivement vers les hydrocarbures assurant des rendements supérieurs à 15 %. En 2025, les investissements dans le pétrole et le gaz devraient atteindre 1 250 milliards de dollars, soit le deuxième plus haut niveau historique après 2015.
Si, en signant ce décret, le nouveau président élu fait avant tout preuve de bon sens, il renvoie aussi aux Européens l’image de leur égarement écologique. En continuant de mettre en œuvre son mortifère Pacte vert, l’UE est en train de suicider « sur l’autel de la vertu » ce qui lui reste de son industrie, dont le secteur automobile et ses treize millions d’emplois. Sous peine d’un déclassement irréversible, il est urgent de remettre en question notre politique climato-énergétique. Ce virage radical pourrait se décliner en trois points.
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Le premier est de desserrer significativement le rythme de la décarbonation des usages (bâti/mobilité/industrie), dont la facture, insoutenable pour les Français (200 milliards par an selon les derniers chiffres de Bercy !), se traduirait par un accroissement démesuré de la dette publique, de la fiscalité et du déficit de la balance commerciale. Il faut revoir l’ambition de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’UE de 55 % en 2030 en adaptant ce pourcentage à chaque pays membre en fonction des émissions nationales qu’il émettait en 1990 (date de référence choisie pour fixer les 55 % à toute l’UE), supprimer nombre de normes inutiles (agriculture, interdiction de location des E/F/G, ZFE, arrêt des chaudières au gaz, pénalités touchant l’industrie automobile…) et remettre en cause l’arrêt des ventes de voitures thermiques neuves. Sans aucun impact sur le climat, elles permettraient de réduire sensiblement le niveau des investissements.
Recouvrer une souveraineté
Le second est de repenser des aides publiques beaucoup trop centrées sur les énergies renouvelables et de les réorienter vers le nucléaire (notamment de 4e génération) et la chaleur décarbonée. Ainsi, la récupération de la chaleur perdue dans les centrales nucléaires (700 TWh/an) et la géothermie moyenne température (70° C) ont un potentiel énorme aujourd’hui, largement sous-estimé dans l’Hexagone.
Cette « croissance verte » est aujourd’hui un malade en phase terminale
Cette stratégie permettrait à la France de recouvrer une souveraineté énergétique perdue et de mieux contrôler les prix de l’énergie, dont l’importance est déterminante pour le pouvoir d’achat des Français et la compétitivité des entreprises. Car, contrairement à ce qui est véhiculé dans l’imaginaire collectif, les EnR intermittentes (notamment l’éolien offshore) sont à la fois une impasse technico-économique mais aussi un verrou géopolitique en relation notamment avec les métaux critiques détenus aujourd’hui à 80 % par l’ogre chinois.
Enfin, le rythme très lent de la décarbonation actuelle nous conduisant inexorablement vers un monde à 2,7 degrés, chacun devra s’adapter. Gestion de l’eau, moyens de prévention contre les inondations, sécheresses, vagues de chaleur et feux de forêt, désartificialisation des sols ou encore ajustement du modèle agricole, la tâche est immense. Elle nécessitera de rediriger vers l’adaptation une partie conséquente des fonds aujourd’hui exclusivement dédiés à l’atténuation. Car, par rapport à l’atténuation qui, pour être efficace, se doit d’être mondiale, l’adaptation a un avantage compétitif déterminant : elle est territoriale. Sans mettre en œuvre rapidement ces trois leviers, l’Europe risque de se retrouver à terme dans une double impasse : elle se sera ruinée à mettre en œuvre une décarbonation inutile tout en oubliant de s’adapter au défi climatique.
Marion Maréchal est députée européenne, présidente d’Identité-Libertés.
Philippe Charlez est expert en questions énergétiques, membre du bureau politique d’Identité-Libertés.
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