
Volodymyr Zelensky a fait son apprentissage politique en jouant au président dans une série télévisée, Serviteur du peuple. Il n’a plus voulu quitter le rôle. Triomphe de la fiction. La guerre lui a ensuite enseigné l’essentiel, notamment qu’un repli en bon ordre prépare les meilleures contre-attaques. À Donald Trump l’accusant d’être « un dictateur sans élection », il a offert sa démission. Mais en échange de l’adhésion de son pays à l’Otan qui reste son idée fixe, la hantise du Kremlin, la justification des trois ans de guerre qui viennent de dévaster l’Ukraine.
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La réplique ne manque pas de panache. C’est le style de Volodymyr Zelensky, qui n’est pas un dictateur même s’il porte le kaki qu’apprécient les tyrans latino-américains depuis Che Guevara. Son costume de scène est un uniforme sans distinction de grade, juste le trident. C’est l’emblème de l’Ukraine depuis mille ans. L’arme du gladiateur, seul dans l’arène. Ainsi affublé, le président ukrainien a fait le tour du monde. Chacun comprend en le voyant que ses pairs ne sont pas les chefs d’État, à l’abri dans leurs palais, auxquels il tend la sébile mais les civils jetés malgré eux dans la fournaise de la guerre. Les parlementaires debout ont applaudi son humilité, son courage, son obstination : l’habit fait le moine et de Zelensky, un héros malgré lui. Le hérault de l’Ukraine face aux chars ennemis. Pas un démagogue, un résistant. Serviteur du peuple, toujours ! La fiction l’a emporté sur le réel. La société du spectacle a réussi son putsch.
Volodymyr Zelensky ne mourra pas sur scène. Il est probable qu’il remette bientôt une veste. Donald Trump est décidé à s’en débarrasser et ce n’est pas Vladimir Poutine qui l’en empêchera. Avec le juridisme hypocrite dont les Soviétiques étaient capables, le Kremlin explique qu’il est impossible de signer un accord de paix avec un président dont le mandat a expiré. Sa signature serait douteuse. Sergueï Lavrov est resté impassible en débitant cette énormité. Vladimir Poutine l’a répétée, avec l’œil qui frise. Comme si la Russie respectait tous les chiffons de papier qu’elle a signés. Comme si le Kremlin se souciait de la légitimité démocratique de ses alliés dans la guerre, le Belarus, l’Iran ou la Corée du Nord… Humour russe !
500 milliards de dollars
Reprocher à Volodymyr Zelensky d’avoir ajourné les élections est absurde alors qu’un million d’électeurs sont sous les drapeaux et six millions réfugiés à l’étranger. Mais l’interdiction de onze partis, de quelques médias et la répression de l’Église orthodoxe restée fidèle à Moscou sont autant de manifestations d’un pouvoir de plus en plus autoritaire. La justice aux ordres vient d’inculper pour trahison plusieurs opposants, dont l’ancien président Petro Porochenko qui est à la tête du premier parti d’opposition. Le limogeage du général Valeri Zaloujny exilé à l’ambassade d’Ukraine à Londres parce que sa popularité et l’intérêt que lui manifestaient les Américains portaient ombrage au président n’a pas été un cas isolé. 43 % des Ukrainiens considèrent que la démocratie s’est dégradée depuis l’élection de Volodymyr Zelensky et seule une petite minorité (11 %) y voit une conséquence de la guerre.
Depuis quatre mois, le président ukrainien se tord aux pieds de Donald Trump, le flattant de toutes les manières possibles pour faire oublier ses liens avec l’équipe Biden. Le parrain américain reste intraitable. Il veut un cessez-le-feu, tout de suite. Il réclame son dû, les terres rares en remboursement de l’aide apportée depuis trois ans. C’est un diktat à 500 milliards de dollars. Davantage que les réparations imposées à l’Allemagne par le traité de Versailles. Volodymyr Zelensky peut bien se rebiffer, l’empire n’a jamais d’états d’âme avec ses vassaux. Il les traite de dictateurs quand il veut s’en débarrasser.
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