Imaginez une petite Fiat 500 poussive qui serait devenue une belle Alfa Romeo. Cette métaphore automobile illustre la transformation dont a bénéficié la Nazionale. La métamorphose s’est accélérée sous l’ère du Néo-Zélandais Kieran Crowley (2021-2023), marquée par une victoire contre les Gallois en 2022 qui mit fin à trente-six revers consécutifs dans le Tournoi, puis par un succès historique (le premier) contre les Australiens (28-27) lors de la tournée d’automne.
Crowley aurait aimé prolonger son bail. Gonzalo Quesada lui fut préféré. L’Argentin analysait la situation peu après sa nomination : « La force de l’Italie réside dans son jeu collectif. Les autres équipes ont davantage d’individualités qui peuvent changer le cours d’un match […] Les joueurs aiment [leur] identité offensive, mais je pense que nous devons d’abord construire des bases solides. » Autrement formulé : travailler la défense et le jeu au pied pour ne plus être une « équipe d’Italie qui attaque de partout et qui prend des points bêtement ».
La greffe a pris au-delà des espérances des tifosi. Fini la cuillère de bois décernée au pays qui perd toutes ses rencontres : l’an dernier, les Transalpins ont décroché le nul contre les Bleus (13-13) après avoir manqué la pénalité de la gloire. « J’ai eu le temps de descendre des tribunes jusqu’au terrain, racontait Gonzalo Quesada. J’ai cru qu’on pouvait gagner. Cela a été un ascenseur émotionnel car une minute plus tard, on a raté cette pénalité. » Ce nul sera suivi de succès contre les Écossais et les Gallois. Pour la première fois en huit ans, la dernière place de la compétition était évitée. Commentaire de l’ancien international : « Nous avons gagné le respect de nos adversaires. » Les statistiques parlent : plus grand nombre de plaquages (972), de rucks défensifs (417) et d’interceptions (17).
L’édition en cours, la vingt-sixième depuis l’arrivée de l’Italie, se résume à une honorable défaite à Murrayfield (31-19) et à une victoire à domicile contre des Gallois actuellement au fond du trou (22-15). Le public du Top 14, lui, connaît bien Quesada pour l’avoir vu à l’œuvre durant près de vingt ans. Joueur de Narbonne, de Béziers, du Stade français, de la Section paloise et de Toulon, il fut entraîneur du Racing, du Stade français et du Biarritz olympique, avant de signer en janvier 2024 avec la Nazionale. Le natif de Buenos Aires (38 sélections) a été en charge des buteurs de la France entre 2008 et 2011.
« C’est quelqu’un qui sait trouver les bons mots, qui donne sa chance aux joueurs et qui sait les mettre en confiance. Je ne suis pas surpris de voir cette équipe progresser à ce point », se souvient Mathieu Bastareaud. L’ancien bulldozer tricolore insiste sur l’état d’esprit : « Avant, on avait tendance à dire : “L’Italie va bien démarrer, mais si on leur met un essai rapidement, ça leur plombe le moral et ils s’écroulent.” Ce n’est plus du tout le cas. Je pense qu’il y a eu un vrai changement de mentalité. Cette génération refuse d’accepter la fatalité. »
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Une génération qui profite du dispositif « Italian Exiles » de sa fédération, qui permet de recruter des rugbymen ayant des liens de parenté avec la péninsule sans y être né, tel l’emblématique arrière Ange Capuozzo. Gonzalo Quesada, lui, s’est installé à Milan. Pratique pour se rendre à Trévise et Parme et assister aux rencontres des clubs locaux. Doué pour les langues, le quinquagénaire s’exprime avec aisance dans celle de Dante. Avanti, Italia !
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