C’est une version revue et corrigée qui a été présentée devant de Conseil supérieur de l’éducation (CSE) et validée avant que la nouvelle mouture du texte ne soit officialisée. Parmi les modifications majeures, les références à l’identité de genre ont été allégées – sans avoir été complètement évacuées, donc.
Ce programme d’enseignement obligatoire sera effectif dès la rentrée prochaine, en septembre 2025, de la maternelle au lycée et avec un contenu adapté selon les différents degrés d’enseignement. Trois séances annuelles seront dispensées dans l’ensemble des écoles, collèges et lycées, publics comme privés sous contrat. Selon Guislaine David, co-secrétaire générale et porte-parole du SNUipp-FSU, des doutes demeurent cependant s’agissant du volet formation : « On peut avoir des doutes, parce que les moyens ne sont pas abondés en conséquence », rapporte-t-elle dans le quotidien Sud-Ouest.
Jusqu’au premier degré d’enseignement (de l’école maternelle à l’école élémentaire), les apprentissages portent exclusivement sur la vie affective et relationnelle. Ce n’est qu’au second degré (du collège au lycée) que les questions liées à la sexualité sont abordées.
Maternelle
Avant 4 ans, l’objectif pédagogique est d’apprendre aux jeunes élèves à « connaître (leur) corps et comprendre ce qu’est l’intimité ». Ceux-ci doivent également apprendre à exprimer leur accord ou refus, tout en étant sensibilisés à l’égalité entre filles et garçons. Les élèves de maternelle sont également amenés à savoir « identifier une personne de confiance » et à faire appel à elle si besoin.
École élémentaire
À l’école élémentaire, les élèves apprendront à « nommer les parties du corps, dont les parties intimes, en utilisant un vocabulaire scientifique » et seront éclairés sur les principaux changements physiques qui s’opèrent à la puberté. « Développer une bonne connaissance de soi » et « définir ce qu’est son intimité (corps, pensées, écrits) et celle des autres » font également partie des compétences à acquérir et des notions enseignées.
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Au CE1, il s’agit par exemple « d’identifier et différencier plusieurs types de sentiments et de relations amoureuses et amicales ». Tandis qu’au CE2, l’un des objectifs est de leur apprendre à « prendre conscience de l’importance d’apprécier et de prendre soin de son corps ». À partir du CM1, les élèves apprennent à « reconnaître (une situation de) harcèlement et ses différentes formes, en particulier le harcèlement sexiste et sexuel », ainsi qu’à repérer les stéréotypes, préjugés et discriminations.
En CM2, il s’agit de leur apprendre à identifier et à se protéger contre les différentes formes de violences (« verbales, physiques, psychologiques, sexistes, sexuelles »). L’accent est également porté sur les dangers d’Internet et des réseaux sociaux et les façons de s’en protéger.
Collège
C’est seulement à partir du collège qu’est abordée l’éducation à la sexualité. Il s’agit, selon l’Éducation nationale, d’aider les élèves à « comprendre et à vivre sereinement » les changements dont ils font l’expérience. L’enjeu est d’« aborder la sexualité comme une réalité complexe pouvant faire intervenir le plaisir, l’amour, la reproduction, etc. ».
En 6e, le programme invite les élèves à « connaître les changements induits par la puberté » et à appréhender les changements du corps. En 5e, les élèves doivent « différencier sexe, genre, orientation sexuelle et respecter leurs diversités » et sont sensibilisés au libre développement de leur personnalité. C’est en classe de 4e que la sexualité est abordée comme « une réalité complexe » et que les élèves sont amenés à « envisager la sexualité comme un cheminement personnel singulier » prenant des formes d’expression diverses. Leur est également enseignée la façon dont « favoriser des choix responsables et protecteurs en matière de santé sexuelle et relationnelle ».
Les « incidents des réseaux sociaux sur les relations » sont aussi abordés. En 3e, les collégiens sont amenés à « interroger les liens entre bonheur, émotion et sexualité ». Le programme dispensé précise ainsi que « le désir peut ne pas toujours être assouvi » et invite les élèves à « développer (leur) capacité à maîtriser (leurs) impulsions, émotions et sentiments ». Il s’agit aussi de « reconnaître une situation de violence sexuelle, de stigmatisation, de violence ou de discrimination opérée sur le fondement […] du sexe, de l’orientation sexuelle, de l’identité de genre ou de l’état de santé », et de se prémunir contre celles-ci.
Lycée
Au lycée, le programme donne de l’importance au développement d’une « image positive de soi » et à la « capacité à agir au bénéfice de son bien-être et de sa santé sexuelle ». Les classes de seconde sont notamment amenées à « connaître et reconnaître les codes au cours des différentes étapes d’une rencontre et d’une relation (approche, déclaration, contact physique, relation sexuelle, engagement, rupture) ».
En classe de première, il s’agit « d’exprimer ses envies et ses limites en matière de sexualité », et de ne pas confondre « désir » et « conduite ». Le programme sensibilise également les élèves à l’usage de substances psychoactives et aux risques encourus sur la santé lors d’un rapport sexuel. En classe de terminale, le programme vise à « rassemble(r) les acquis permettant à l’élève d’appréhender la sexualité en jeune adulte responsable ». Les élèves sont aussi amenés à « comprendre les mécanismes de la réponse biologique sexuelle (désir, excitation, plaisir, phase réfractaire) et leur lien avec la sexualité et le bien-être ». « Connaître les lois qui protègent » les victimes de violences sexistes et sexuelles et les « services de soutien et d’aide » existants.
Enfin, la très controversée théorie du genre est mobilisée : il est en effet proposé aux lycéens de « prendre conscience que le sexe biologique peut ne pas correspondre à son identité de genre », le tout « à partir de témoignages ».
Des inquiétudes qui subsistent
La ministre de l’Éducation nationale, Élisabeth Borne, qui avait confessé ne pas être une « spécialiste » des questions d’éducation lors de sa passation de pouvoir au ministère, en décembre dernier, a défendu ce programme, le jugeant « absolument indispensable » au regard de la montée du sexisme en France. Pour rappel, en France « un enfant est victime d’une agression sexuelle toutes les trois minutes, » et « deux millions de mineurs sont exposés chaque mois à des contenus pornographiques sur Internet », a-t-elle insisté au micro de France Inter, face à Léa Salamé, le 23 janvier dernier.
Des craintes persistent cependant. De nombreux parents, élus, associations et professionnels de santé avaient, lors de la présentation du texte en novembre dernier, manifesté leur vive inquiétude et réticence. Les références à l’« identité de genre » et aux stéréotypes de genre avaient été particulièrement pointées du doigt à droite. L’ancien ministre délégué à la Réussite scolaire, Alexandre Portier (LR), était ainsi monté au créneau en novembre dernier, considérant que la première version du programme n’était, en l’état, pas « acceptable ».
Alors que les « violences sexuelles, violences intrafamiliales et à la prolifération d’images à caractère pornographique » ne cessent d’augmenter, « l’école a pour mission de protéger nos enfants » avait-il déclaré. Pour autant, « la théorie du genre et le militantisme n’ont pas leur place dans nos écoles » avait-il conclu.
Les thèses woke de la première version furent par ailleurs dénoncées par le Syndicat de la famille (ex-Manif pour tous) et SOS Éducation. Les deux associations avaient à cette occasion lancé une pétition contre le programme alors en cours d’élaboration, en vue d’« expurger toute idéologie » et de « protéger de l’intimité des élèves ».
Élisabeth Borne, porte-parole de la version allégée, est revenue sur la polémique, en indiquant que « la notion d’identité de genre, [contrairement aux versions précédentes] figure quelques fois dans le programme ». Une notion présente uniquement à partir du lycée, précise-t-elle. Des propos erronés, puisque le terme apparaît dès la classe de 3e.
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