Faut-il éduquer les plus jeunes enfants à la sexualité ? Tandis que les milieux dits progressistes se félicitent d’avoir remporté une bataille politique avec le vote en faveur du fameux programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (Evars), il est intéressant de voir comment ces milieux qui s’autoproclament à l’avant-garde du progrès caricaturent toute opinion osant remettre en cause leur dogme au travers d’une légère réserve. Car il suffit d’une simple remarque pour déclencher les foudres de ces sachants autoproclamés.
Si vous n’êtes pas favorable à l’éducation sexuelle des plus petits à l’école, vous êtes automatiquement renvoyé à la case désormais bien connue du conservateur réactionnaire d’extrême droite. Il ne restera d’ailleurs bientôt plus grand monde en dehors de ce cercle de feu, puisque le moindre doute vous fait irrémédiablement basculer du côté obscur de la force. Pourtant, ce sujet mérite une attention d’ange puisqu’il s’agit d’enfants.
Retrouvez toutes les chroniques de Sonia Mabrouk
L’intrusion de l’État dans la vie intime
Si l’on s’arrête un instant sur les mots employés, on remarque d’emblée que quelque chose ne va pas dans l’intitulé de ce programme. Pourquoi parler d’éducation en lieu et place d’information ? Il eut été plus approprié, me semble-t-il, de ne pas aller sur le terrain éducatif qui ne correspond pas au rôle ni à la mission de l’école. La famille éduque, l’école instruit. Voilà une maxime toute simple à énoncer mais ô combien difficile à appliquer, hélas. Dans le cas présent, toute « éducation » à la vie sexuelle à l’école apparaît de fait comme une intrusion de l’État dans la vie intime et familiale. Éduquer veut dire qu’on inculque une norme prédéfinie. Or il n’y a pas (ou il ne devrait pas y avoir) une norme que l’État pourrait diffuser comme une bonne parole à nos enfants. Cela étant dit, une question essentielle traverse le débat : pour grandir et se développer, un enfant a-t-il besoin d’une information sur la sexualité avant son adolescence ?
Il y a encore quelques années et même quelques mois, une telle interrogation relevait davantage de la théorie que d’une véritable urgence à mes yeux. Aujourd’hui, en tant que maman, le questionnement devient plus impérieux tant il est vrai que tout ce que je pensais connaître sur le sujet a été balayé par les liens de la naissance, des liens qui se sont immédiatement transformés en attaches inextricables et éternelles qui nous obligent face à ces petits êtres irradiant d’innocence et d’amour.
La suite après cette publicité
La famille éduque, l’école instruit. Une maxime toute simple
La question pourrait se résumer ainsi : une information sur la sexualité contribue-t-elle à protéger nos enfants ou au contraire une sexualisation précoce les expose-t-elle à un danger encore plus grand ? Il est évident qu’à l’âge de l’adolescence, l’enfant se détournant naturellement de ses parents, une telle information doit être délivrée dans un cadre scolaire. Mais en amont, vers l’âge de 6/7 ans, est-ce à la famille ou à l’école d’éveiller, de prévenir et de protéger ?
Le lointain prime sur le voisin
Vous m’excuserez si je ne livre pas dans cet éditorial un avis tranché. Je n’en ai ni l’envie ni la force, car au moment où se tenait ce débat, nous apprenions une tout autre affaire concernant un enfant, une suppliciée, devrais-je écrire. Amandine est morte de faim à l’âge de 13 ans. Sa mère, ou plutôt son bourreau, privait la fillette de nourriture et la cloîtrait dans un débarras sans aucune ouverture. Comme vous, sans doute, j’ai longuement observé la photo de cette petite fille. Comme vous, j’ai eu envie de hurler face à cette abomination.
Comme vous, je me suis demandé comment cela avait-il pu arriver. Comment les signalements ont-ils pu ne pas aboutir ? Comment avons-nous perdu collectivement notre âme dans une société où le lointain prime sur le voisin au point de ne pas savoir ce qui se passe dans la maison d’à côté ? Pour toutes ces raisons, je n’ai pas eu envie de trancher sur l’éducation sexuelle à l’école. Comme vous, j’ai eu envie de me concentrer sur l’essentiel en imaginant la petite Amandine libérée de tout, légère au vent invisible et réconfortée par toutes les mamans du monde, celles qui savent que la vraie éducation n’est qu’amour.
Source : Lire Plus