Jeudi, les membres de la commission des finances de l’Assemblée nationale ont refusé un amendement au projet de loi finances pour 2025 qui prévoyait la défiscalisation des primes pour les médaillés des Jeux olympiques et paralympiques de Paris. Une énorme surprise autant qu’une désillusion pour Corentin Le Fur, député (LR) de la 3e circonscription des Côtes-d’Armor. L’élu breton a expliqué à RMC Sport pourquoi il entendait continuer de se battre en faveur des athlètes tricolores, véritables emblèmes de la France pendant l’été, et pour que le sport ne soit pas délaissé maintenant que Paris 2024 est terminé.
Corentin Le Fur, vous avez déposé cette semaine un amendement pour obtenir que les médaillés olympiques et paralympiques soient exonérés d’impôts sur les primes obtenues en marge de Paris 2024. Une proposition rejetée en première lecture. Quel est votre sentiment après ce refus?
C’est extrêmement décevant et c’est extrêmement mesquin, je trouve, que cette défiscalisation soit refusée. Je constate, hélas, que les athlètes olympiques et paralympiques français qui nous ont fait vibrer et qui ont créé ce moment de ferveur absolument incroyable pendant l’été ont été vite oubliés. Vite oubliés alors que pour eux ces primes, finalement, c’est la récompense de quatre ans de travail, de sacrifices et d’entraînement. Parfois même les sacrifices et entraînements de toute une vie. Et donc ces primes, c’est une fois tous les quatre ans donc le fait de refuser cette défiscalisation, je trouve ça très mesquin. Alors que par le passé sur les épreuves olympiques et paralympiques d’été ou d’hiver, la tradition voulait que ces primes soient défiscalisées. C’était quelque part la reconnaissance de la Nation envers nos athlètes qui ont porté haut nos couleurs. J’espère, d’ici la séance (dès la semaine prochaine) qu’on va revenir sur cette décision et que l’on arrivera à faire obtenir aux athlètes olympiques et paralympiques cette défiscalisation des primes de médailles.
Vous parlez d’une mesquinerie, pensez-vous que c’est aussi un manque de respect pour les athlètes qui ont porté haut les couleurs de la France? Un oubli total en quelque sorte…
Bien sûr, c’est un total manque de respect! Je constate qu’on les a très vite oubliés. On les a acclamés, ils ont fait briller la France, ils ont donné une image formidable de la France, une image formidable de ces épreuves olympiques. Et je constate, hélas, que dès qu’on doit faire un petit geste pour eux, on les oublie très vite. Alors que ce sont des sommes qui, à l’échelle du budget de l’Etat, sont très faibles. Vraiment, ce n’est pas à la hauteur de leur sacrifice, de leur travail et de leur engagement. Et pour eux, encore une fois je le répète, ce ne sont pas des petites sommes. Donc vraiment ce n’est pas à la hauteur et j’espère qu’on va pouvoir revenir et voter cette défiscalisation en séance.
A l’inverse, est-ce-que vous comprenez les arguments des opposants à cet amendement? Ils estiment que les athlètes olympiques et paralympiques ont déjà des avantages, avec la possibilité de lisser leurs revenus ou le fait que l’on parle de deux à quatre millions d’impôts sur les 18 millions versés aux athlètes. Surtout à un moment où l’Etat dans sa globalité est invité à faire des économies…
C’est inentendable cet argument. Parce que deux millions à l’échelle du budget de l’Etat c’est dérisoire. C’est rien du tout. Nos déficits sont creusés et il y a 1.000 milliards de dette en plus donc deux millions c’est rien du tout. C’est un petit geste pour le budget de l’Etat alors qu’on doit faire beaucoup d’autres économies je pense dans la sphère administrative et chez les opérateurs de l’Etat. Deux millions c’est une paille pour l’Etat! C’est une paille pour l’Etat mais ce n’est pas une paille pour ces athlètes olympiques et paralympiques qui, souvent, ont énormément de mal à vivre de leur sport avec ces disciplines qui ne sont mises en lumière qu’une fois tous les quatre ans. Donc pour ces athlètes olympiques et paralympiques, qui ont presque encore plus de mérite, ce n’est pas entendable. L’argument financier est inentendable. Et en plus c’est incomparable parce que c’est une prime qui récompense, qui arrive tous les quatre ans voire une fois dans une vie pour les athlètes qui ne vont participer qu’à une seule olympiade ou qui ne vont monter que sur un seul podium olympique. L’argument financier n’est pas valable dans ce cas-là. Et encore une fois, pour l’immense majorité des médaillés, ils peinent à vivre de leur sport et ont souvent une activité en parallèle. Donc ces primes, ça représente une part importante de leurs revenus. Donc si on ne les défiscalise pas, on mine aussi leur pouvoir d’achat et on leur maque de respect.
Dans ce refus de les aider et de leur donner un coup de pouce économique, est-ce que ce n’est pas encore une nouvelle preuve d’un désengagement de la France dans le sport? Maintenant que les Jeux sont terminés on a presque l’impression que l’on se désintéresse un peu du sport en France, ça s’est aussi un peu avec le budget du ministère des Sports qui risque d’être raboté d’environ 250 millions dans la loi de finance.
Oui c’est vrai, cela s’inscrit dans une dynamique globale. On a eu une magnifique réussite collective avec ces Jeux olympiques et ces Jeux paralympiques. J’espère que l’on ne va pas laisser tomber le sport maintenant que c’est terminé. Au contraire, il faut tirer les bénéfices de ces JO. Montrer à la quel le sport est formidable. C’est un formidable moyen de communion, de ferveur et d’unité nationale. De l’unité nationale on en a cruellement besoin. C’est l’occasion de se retrouver. C’est aussi le sport santé, c’est le sport bien-être. Les vertus du sport sont multiples. Donc j’espère qu’on pourra préserver ces budgets. Mais encore fois, là c’est un geste immédiat pour ces athlètes olympiques et paralympiques. Et qui représente à l’échelle budgétaire une somme dérisoire. Donc j’espère que l’on n’aura pas la mesquinerie de leur refuser cette défiscalisation.
Si cet amendement ne passe auprès de vos collègues députés, envisagez-vous d’aller plus loin et d’interpeller le ministre des Sports, Gil Avérous ou le Premier ministre, Michel Barnier à l’Assemblée nationale sur cette question? Avez-vous déjà échangé avec eux sur cette problématique?
Oui bien sûr avec ce message, j’interpelle aussi le gouvernement. Et j’espère que, quelle que soit l’issue de ce budget, on arrivera in fine à obtenir cette défiscalisation. Il y a eu une défaite jeudi en commission mais le combat est loin d’être terminé. Et j’espère qu’à l’issue du vote du budget, on obtiendra pour les athlètes olympiques et paralympiques, pour nos médaillés, cette défiscalisation qu’ils méritent.
Vous pourriez par exemple demander au gouvernement de tenter un 49.3 sur cette question-là en particulier? Est-ce que c’est possible?
Le 49.3, j’espère qu’on l’évitera. Mais s’il y a un 49.3, en effet, j’espère que ce sera dans le texte du gouvernement. Et bien sûr, je vais le demander au gouvernement.
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