Soudain, le temps s’est figé. « Presque dix minutes, de 13h30 à 13h39 », précise Emma, la vingtaine. Les couloirs de l’université Paris-Dauphine étaient pleins à craquer. Plus un bruit, ou presque. « Il y avait beaucoup de monde, jusqu’au 4e étage », poursuit la jeune femme. Comme elle, des centaines d’étudiants et d’enseignants ont tenu à rendre hommage, ce lundi, à Philippine Le Noir de Carlan, dont le corps a été découvert samedi à quelques centaines de mètres de là, dans le bois de Boulogne.
Sur une table, installée au 3e étage, des fleurs ont été déposées devant une photo de la victime, âgée de 19 ans, qui était inscrite en 3e année de licence économie et ingénierie financières. Les étudiants peuvent laisser un mot ou un témoignage dans l’un des deux carnets prévus à cet effet. « On ne la connaissait pas, elle n’était pas de notre promo, mais ça fait mal au cœur, d’autant qu’elle a été retrouvée à côté d’ici », ajoute Emma.
« Elle sortait de la cantine et elle s’est fait tuer »
« Il y avait un énorme embouteillage dans les escaliers. Tous les profs étaient présents. C’était un moment assez émouvant. Nous sommes tristes et choqués », confie pour sa part Charlotte, la vingtaine. Depuis l’annonce du décès de Philippine, « tout le monde est un peu flippé », signale-t-elle. « Ça peut arriver à n’importe qui à l’université, complète Arthur, lui aussi étudiant dans l’université. Elle sortait de la cantine et elle s’est fait tuer, c’est choquant. »
Le corps de Philippine Le Noir de Carlan a été découvert samedi, peu avant 17 heures, de l’autre côté du périphérique, en bordure du bois de Boulogne. La veille, elle avait déjeuné au Crous vers 14 heures. Originaire de Montigny-le-Bretonneux, dans les Yvelines, la jeune femme devait ensuite se rendre chez ses parents pour le week-end. Mais elle n’est jamais montée dans le RER C. Sans nouvelle, sa famille a tenté à plusieurs reprises de la joindre sur son portable. En vain.
Blessures et traces de sévices
Alors sa sœur s’est rendue vendredi soir, vers 23 heures, au commissariat du 16e arrondissement de Paris pour signaler cette disparition inquiétante. Le lendemain, ses proches ont organisé une battue, réunissant une cinquantaine de participants. En essayant de géolocaliser son téléphone portable, l’un d’eux finira par découvrir le corps de la victime, partiellement enseveli : un genou et un bras dépassaient du sol.
Selon nos informations, les agents de l’identité judiciaire ont relevé sur la victime de nombreuses traces de sévices et de blessures. Une autopsie devait encore être réalisée pour déterminer les causes de la mort de la jeune femme.
Le parquet de Paris, qui a ouvert une enquête pour homicide volontaire, a saisi la brigade criminelle de la police judiciaire. Les policiers ont rapidement entendu les témoins. Car si aucune caméra de surveillance n’est installée dans cette zone boisée, le secteur est loin d’être désert. Il est fréquenté par des joggeurs, des riverains qui promènent leur chien. Et la fête à Neuneu, qui attire des milliers de visiteurs, a pris ses quartiers non loin de là.
Un suspect masqué avec une pioche
Plusieurs témoins, dont un vigile de la fête foraine, ont indiqué avoir aperçu un homme, porteur d’un masque chirurgical, qui se dirigeait en direction du lac inférieur, une pioche dans la main. Ce lundi, les enquêteurs ratissaient le secteur à la recherche du moindre indice qui les mettrait sur la piste du suspect. Ils inspectaient méticuleusement la passerelle qui surplombe le périphérique. Philippine et son meurtrier sont probablement passés sur ce petit sentier de gravier qui relie la capitale à son bois.
Le pont est situé juste en face du square Claude-Debussy et… de l’ambassade de Russie. Les policiers vont-ils demander à consulter les images captées par les caméras de surveillances installées sur le bâtiment ?
A ce stade des investigations, aucun suspect n’a été interpellé. La direction de Dauphine a renforcé les mesures de sécurité à l’entrée de l’établissement et mis en place une cellule psychologique pour aider les étudiants et personnels qui en auraient besoin.