Les échecs des trois équipes de France de cyclisme sur piste ce mardi ont provoqué quelques grincements de dents dans les propos d’après-course du staff mais aussi de certains coureurs contre le système.
Il régnait une ambiance lourde et moite dans le vélodrome surchauffé de Saint-Quentin-en-Yvelines, ce mardi. Un peu tendue aussi dans le clan de l’équipe de France où les déceptions se sont accumulées. Cela a commencé avec l’équipe féminine de poursuite, seulement septième temps des qualifications (4’08’’797) et qui a déjà fait une croix sur l’or. Malgré un record de France, les Bleues – qui peuvent encore jouer le bronze – espéraient mieux. Et leur entraîneur, très amer, aussi.
“Ce n’est pas bon, on ne venait pas pour un record de France, clairement”, a lancé Samuel Monnerais. “Là, la piste roule très vite, on ne va pas s’inventer des niveaux de performance qu’on n’a pas, battre les Néo-Zélandais c’était impossible, tout comme s’approcher des Américaines. Par contre, les filles, à leur meilleur niveau, ‘valent’ deux secondes plus vite. La petite finale et la médaille de bronze sont encore accessibles mais il faut que les filles montrent un autre visage, qu’elles soient beaucoup plus libérées et à leur vrai niveau. Aujourd’hui, il manquait pas mal de watts sur les pédales pour certaines d’entre elles.”
S’il ne désigne pas de coupable, il sort l’une des quatre relayeuses du lot et promet du changement dans le relais de demain avec l’entrée de Victoire Berteau. “Comme à l’habitude, Marion Borras était très solide, c’est elle qui nous sort d’un naufrage, sans elle ça aurait été vraiment compliqué”, a-t-il lancé. “Les autres ne sont pas totalement absentes mais il en manque un peu. Du changement mercredi? “Sûrement mais je ne sais pas encore, il faut que je prenne le temps de traiter les données mais Victoire rentrera demain.”
La soirée s’est poursuivie avec l’échec de l’équipe masculine de poursuite dans sa quête du bronze. Après un départ canon de Benjamin Thomas face aux Canadiens dépassés, Thomas Denis a craqué à la fin, coupant la ligne d’arrivée une dizaine de mètres après ses deux derniers partenaires, perdant de précieuses secondes et laissant les chances de médailles se dérober. Un scénario qui ne laisse pas de déception à Steven Henry, entraîneur de la poursuite. “On est parti très vite et quand ça part aussi vite, il faut un peu croiser le doigts pour que ça n’explose pas”, explique-t-il. “L’idée était de prendre des risques, on l’a fait, ça ne passe pas. Il ne manque pas grand-chose à Thomas Denis, ça se joue vraiment à 20 mètres où il peut prendre un peu d’air et accrocher la roue, je n’ai pas forcément de regrets.”
Si la poursuite relativise, il sonnait comme un air de règlement de comptes dans la vitesse par équipes, médaillée de bronze il y a trois ans à Tokyo mais battue et quatrième ce mardi. Florian Grengbo, Sébastien Vigier et Rayan Helal ont amélioré leur record (41’’993) mais ont échoué face à l’Australie. Comment expliquer cette régression d’une place et l’échec d’une médaille en poursuite par équipes aux JO pour la première fois depuis 2000 pour les Bleus?
“Je ne sais pas, il faudra peut-être poser la question aux responsables”, a répondu Grégory Baugé, entraîneur de la vitesse.
“On est là pour les entraîner, les soutenir, ils étaient prêts mais ils ont été très vite, il y a plus fort que nous. Les mecs sont forcément déçus devant leur public, leur famille. Il va falloir se remobiliser.”
Florian Grengbo, pas aligné en individuel, quitte les Jeux avec un goût amer et l’envie de faire changer les choses. “C’est dur de se dire qu’il y a trois ans, on était médaillé, on était plus jeune et là, dans la force de l’âge, on n’a pas progressé”, déplore-t-il. “On a passé trois années compliquées. Il y a plein de soucis, je ne suis pas là pour dire des choses dans les médias. Au-delà de ça, on a des forces à développer, notre collectif est très performant.”
Son partenaire Sébastien Vigier, encore engagé sur la vitesse et le keirin, se posait aussi beaucoup de questions, même s’il “s’en fiche” d’être le premier relais de vitesse depuis 24 ans à quitter les Jeux sans médaille. “Le sport a beaucoup évolué”, fait-il remarquer. “Si on compare les performances, le nombre de nations, la densité, ce n’est plus le même sport. On a progressé mais les autres nations ont plus progressé que nous. C’est plus au système de la nation de voir si on peut faire mieux et peut-être qu’on ne peut pas faire mieux. Peut-être qu’avec les talents qu’on a, on est à la limite. Il faut analyser le système et il a peut-être atteint ses limites, la densité a évolué, d’autres pays sont montés. Il y a quatre ans, on était quatre équipes à jouer les médailles, aujourd’hui, on est six ou sept.”
“C’est un sport qui procure beaucoup de médailles, les pays investissent beaucoup et ça nous donne un sport très relevé qui a énormément progressé.”
Que préconise-t-il? “Ce n’est pas mon travail, je suis athlète”, conclut-il. “On en a déjà parlé plein de fois, on a eu des ressources pour ces Jeux comme on n’a jamais eues et ça se voit sur les résultats donc on a quand même bossé. Il y a des gros résultats dans toutes les disciplines à la FFC, on a beaucoup progressé, on est allé chercher quatre dixièmes sur un record c’est énorme. Peut-être qu’on est au maximum, qu’on n’a pas les talents nécessaires en France pour faire mieux que ça.”
Source : Lire Plus