- L’explosion qui est survenue dans un immeuble de la rue Saint-Jacques, dans le 5e arrondissement de Paris a fait une cinquantaine de blessés, dont quatre personnes qui sont encore en urgence absolue selon le Parquet de Paris.
- Si l’enquête est encore en cours, l’hypothèse de l’explosion à la suite d’une fuite de gaz est la plus probable selon Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, et les nombreux témoignages de riverains.
- Après le drame de la rue de Trévise en 2019, la question de l’état du réseau de gaz à Paris se pose.
L’explosion d’un immeuble ce mercredi dans le 5e arrondissement de Paris ravive de douloureux souvenirs aux Parisiens. Si le dernier bilan communiqué par le Parquet s’élève à une cinquantaine de blessés, dont six en urgences absolues. Beaucoup ont immédiatement repensé au drame de la rue de Trévise en 2019 au cours duquel quatre personnes, dont deux pompiers, avaient perdu la vie.
D’autres drames du même type ont eu lieu ces dernières années dans la capitale. Leur point commun : une explosion au gaz. Si l’enquête est en cours pour déterminer avec certitude l’origine de l’explosion de la rue Saint-Jacques, tous les nombreux témoignages recueillis sur place font état d’une forte odeur de gaz. Des éléments appuyés par les prises de paroles de la procureure de Paris, Laure Beccuau, et du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, qui ont tout deux avancés que cette piste était la plus probable.
1.921 kilomètres de réseau de gaz
Avec près de 500.000 foyers raccordés au gaz dans la capitale, soit 35 % de l’énergie fournie, faut-il craindre d’autres drames de ce type ? Le réseau de gaz de la Ville de Paris est-il en cause ?
Selon certains, la vétusté des installations de la capitale pourrait être pointée du doigt. C’était l’opinion d’Alexandre Vesperini, membre de la commission supérieure de contrôle du gaz, un organisme chargé de vérifier l’état du réseau dans la capitale, au moment du drame de la rue de Trévise. Il s’était confié au Parisien, arguant même que le gaz constitue « le problème numéro un de Paris » selon des sapeurs-pompiers et la « hantise de tous les maires d’arrondissement ».
Cette sortie avait, à l’époque, suscité une réaction de GRDF, concessionnaire en charge du réseau de distribution du gaz, qui dans un communiqué de presse, avait rappelé que le réseau faisait l’objet d’une « surveillance permanente et d’un contrôle rigoureux », avant de préciser que cela se traduisait par un investissement de 50 millions d’euros par an et 40 kilomètres renouvelés chaque année, sur les 1.921 kilomètres que compte le réseau.
Des nouveaux tuyaux plus flexibles
Si la Brigade des Sapeurs-pompiers de Paris, contactée par 20 Minutes, s’est refusée à tout commentaire à ce sujet, un maire d’arrondissement a lui accepté de nous répondre et n’est pas si catégorique. Jean-Pierre Lecoq, maire du 6e arrondissement de Paris, s’intéresse à la question depuis plus de quinze ans : « Les anciens tuyaux sont en tôle bitumée. Avec le temps, ils sont sujets à l’usure et peuvent casser. D’où l’apparition de poches de gaz. » Des événements « rares mais malheureusement redoutables ».
Ces anciens tuyaux sont remplacés par des nouveaux, « en caoutchouc », « plus flexibles » et qui s’adaptent mieux au gaz parce qu’ils sont « déformables », précise Jean-Pierre Lecoq qui assure que 95 % du réseau de son arrondissement en est désormais équipé.
La tuyauterie privée négligée ?
Si on ne connaît pas la part de ces nouveaux équipements dans le réseau parisien, le maire du 6e arrondissement pointe un autre motif d’inquiétude, qui ne fait pas directement partie de ce réseau : la tuyauterie « privée ». « Une fois arrivé au pied des immeubles, le gaz se retrouve dans les colonnes montantes, qui, elles, sont de la responsabilité des propriétaires, des copropriétés ou des syndics. »
C’est ce que l’on appelle communément le « bout parisien », une exception de la capitale, là ou habituellement, GRDF à la charge du réseau jusqu’au robinet d’arrêt du compteur des particuliers. Selon le médiateur de l’énergie, ce « bout parisien », selon les immeubles, peut faire une dizaine de centimètres mais dans certains cas s’étendre sur dix mètres. « C’est souvent là que ça peut rater », explique Jean-Pierre Lecoq. En effet, selon l’intérêt des propriétaires ou des syndics de copropriétés, ces parties peuvent parfois être négligées.
Si les propriétaires en ont la charge, ils n’ont pas le droit d’y toucher, et doivent s’adresser au gestionnaire de réseau pour l’entretenir ou le faire renouveler. Ce qui a souvent causé des quiproquos juridiques selon le Médiateur de l’énergie.
Un élu demande plus de transparence à GRDF
Heureusement, une réforme législative, actée par la loi « 3DS » du 21 février 2022 va mettre fin à cet imbroglio pour transférer automatiquement la responsabilité de ces colonnes et « bouts parisiens » à GRDF au plus tard le 1er juillet 2023, si ce transfert n’est pas demandé en amont par les copropriétés. Une réforme qui devrait limiter le niveau de négligence des installations dans les immeubles de la capitale.
« Je crois qu’il est primordial désormais pour le gestionnaire de communiquer sur l’état du réseau, commente Jean-Pierre Lecoq, GRDF doit plus de transparence aux Parisiens. Non pas pour faire peur, mais au contraire, pour montrer que le changement avance et que chacun soit conscient de ce qu’il en est effectivement. » Contactés par 20 Minutes, la Mairie de Paris et GRDF n’ont pas répondu à nos sollicitations.