
À quoi sert la philosophie ? Chaque rentrée scolaire, il est un petit malin de terminale pour poser cette question à son enseignant. À cette interrogation, Descartes répondait par une pirouette : « [Elle] donne moyen de parler vraisemblablement de toutes choses, et de se faire admirer des moins savants. »
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En réalité, le philosophe ne s’est pas dérobé. Le Discours de la méthode constitue sa réponse la plus aboutie, affirme Robert Redeker dans un ouvrage captivant, Descartes, le miroir aux fantômes, publié aux éditions du Cerf. Selon Descartes, il existe trois moments dans le cheminement philosophique, au cœur de son célèbre « cogito ergo sum » (« Je pense donc je suis »). Si je doute, c’est que quelque chose d’existant doute. Je ne suis certain de mon existence que pour autant que je pense, le doute étant une modalité de la pensée. Par conséquent, je suis une chose qui pense, donc une « substance pensante », une âme douée de raison.
Le « je » devient ainsi le commencement absolu de toute démarche de connaissance : l’expérience interne est garante de l’expérience externe. Autrement dit, des objets m’apparaissent d’abord parce que je pense.
Avec Descartes, l’autonomie de la pensée structure désormais la philosophie. « Dès lors, la rupture avec la tradition et avec l’autorité, deux aspects d’un même geste tranchant, indéfiniment polycopié et généralisé depuis en refus de toute tradition et de toute autorité, s’érige en maximes dominantes de l’éthique du savoir », affirme l’écrivain.
Le doute cartésien n’érige pas de dogmes nouveaux en niant le réel
Le Discours de la méthode devient « le Nouveau Testament de la philosophie ». En cela, l’année 1637 augure une rupture et une entrée dans la modernité. « Le mirage anthropologique moderne prend racine dans les livres de Descartes, décrypte Robert Redeker, finalement, je suis mon œuvre. » Est-ce à dire que le philosophe français est à l’origine de la déconstruction déployée dans l’histoire de la philosophie et dont nous vivons désormais l’aboutissement ?
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En partie, à en croire l’auteur. Mais à la différence des « déconstructeurs » de la French Theory, Descartes a opéré une révolution en vue de la connaissance objective. Le doute cartésien n’annihile pas le bon sens, il n’érige pas de dogmes nouveaux en niant le réel, il se met en quête du savoir pour que la vérité se fasse jour.
Descartes, le miroir aux fantômes, Robert Redeker, Cerf, 260 pages, 22 euros.
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