Le JDD. Quand vous avez repris la direction du festival, quelle a été votre première intuition pour faire évoluer cet événement ?
Pierre-Yves Bérenguer. Je viens d’un parcours où la transversalité entre les disciplines est au cœur du travail culturel. On a donc imaginé un événement qui le connecte aux autres formes artistiques – cinéma, théâtre, arts visuels – sans jamais le reléguer. Ce n’est plus un « salon » à proprement parler, mais une grande fête du livre, qui assume que la littérature circule, inspire, se transforme.
Vous ne craignez pas de diluer le cœur littéraire ?
Non, car le livre reste au centre de tout. Mais il faut accepter qu’on y vienne parfois par un autre chemin. L’exemple de Monte-Cristo est frappant : après le film, les ventes du roman ont explosé. C’est une bonne chose, pour le livre comme pour le cinéma. Le festival doit assumer ce rôle de passerelle.
« L’exemple de Monte-Cristo est frappant : après le film, les ventes du roman ont explosé »
Vous attirez aussi un public très jeune : 45 % des visiteurs avaient moins de 25 ans l’an dernier. Comment renforcer ce lien ?
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C’est l’une de nos priorités. Cette année, on crée un grand village des enfants au cœur de la nef, avec une scène dédiée, des ateliers, une vraie programmation jeunesse. Tous les grands éditeurs jeunesse sont de retour. On veut aussi faire revenir les familles, en misant sur une politique tarifaire très accessible : gratuit pour les moins de 25 ans, 5 euros en prévente. C’est une décision politique, d’autant plus que nous ne sommes financés par les pouvoirs publics qu’à hauteur de 8 %.
Et quel est, justement, votre modèle économique ?
Nous développons une stratégie sur trois ans pour réduire la pression financière sur les exposants. Cette année, on a déjà 15 % de partenaires privés, un progrès énorme. Le but, c’est d’équilibrer et de sécuriser l’avenir du festival.
Le livre d’occasion, la concentration éditoriale, la rémunération des auteurs…le secteur est sous tension. Le festival est-il aussi un lieu de débat ?
Il doit l’être. Le vendredi 11 avril sera dédié aux professionnels, avec des rencontres sur tous ces sujets, y compris l’économie du livre d’occasion. Le festival doit refléter les débats du monde du livre, pas seulement les célébrer.
Le Maroc est à nouveau invité d’honneur, après l’avoir été en 2017. Pourquoi ce choix ?
Pour quatre raisons : la richesse littéraire du pays, son ambition de devenir un hub éditorial en Afrique, le réchauffement diplomatique avec la France, et l’importance de la diaspora franco-marocaine. Cette invitation s’inscrit dans un dialogue culturel durable, que nous voulons approfondir.
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