Yann n’a qu’une obsession : trouver (enfin) un boulot stable. Et, accessoirement, il rêve de parcourir le monde… Alors, quand il apprend que le Guide du Routard cherche de nouveaux globe-trotters, il fonce ! Pistonné, puis embauché sur un malentendu, il décroche aussitôt une première mission. Partir à l’assaut de Marrakech pour inspecter quarante adresses en cinq jours. Juste un détail ? S’il a prétendu être un grand voyageur lors de son entretien d’embauche, il n’a en réalité jamais mis un orteil hors de chez lui.
Donc, ce qu’il pensait être le « meilleur job du monde » se transforme en véritable chemin de croix ! Ceci n’est (heureusement) pas l’histoire vraie de la dernière recrue du célèbre guide de voyage, mais bien le scénario du nouveau film signé Philippe Mechelen et produit par StudioCanal, et qui sort cette semaine sur nos écrans. Une comédie délirante, survitaminée, portée par un casting cinq étoiles. Avec, notamment, la nouvelle star, Hakim Jemili, dans le rôle principal, Christian Clavier, et feu Michel Blanc, qui jouait là sa dernière partition…
Le Routard fait son cinéma
C’est la toute première fois qu’un long métrage s’inspire librement du Routard. « Des documentaires, il y en a eu beaucoup, mais un scénario fictif à la hauteur, jamais », souligne Philippe Gloaguen, son fondateur. « Alors, pourquoi ce projet-là ? Déjà parce que l’équipe a passé deux ans dans notre rédaction, partageant nos repas et rencontrant nos collaborateurs. Ils ont pris le temps de comprendre notre philosophie. »
Le Routard domine le marché avec plus de deux millions d’exemplaires vendus chaque année
S’il dit avoir souvent vu des « opportunistes » s’intéresser à son guide, fondé en 1973, le gardien du temple attendait la bonne rencontre. Et Philippe Mechelen, notamment créateur de la saga Les Tuche, réalisateur et scénariste du film, est lui-même un vrai lecteur du Routard, autant qu’un passionné de voyages depuis toujours. « Finalement, il a parfaitement su capter l’esprit du guide avec une approche authentique et bienveillante. Car n’oublions pas qu’à l’étranger… l’étranger, c’est nous ! Le film montre justement bien cet esprit-là, opposé à l’attitude conquérante de certains touristes. »
Petits budgets
Et inutile de dire que le Parisien en connaît un rayon. Depuis cette première épopée, réalisée il y a plus de cinq décennies, lorsqu’il décidait de partir seul sur la route des Indes. Une aventure démarrée porte de Charenton, avec son sac à dos et seulement quelques francs en poche, qui donnera naissance au rêve de sa vie. Car, à son retour, le directeur du magazine Actuel, un certain Jean-François Bizot, accepte de publier son reportage. Mais pas seulement. « T’es le Gault et Millau du pauvre, toi ! lance-t-il à Gloaguen. Il n’y a pas de guide sur l’Inde en France. Eh bien, on va en faire un ! » Mais alors pourquoi ne pas en faire d’autres ? L’idée commence à germer…
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Après quelques années de galère, Hachette flaire la bonne affaire et décide d’éditer cet ovni littéraire sous forme de série. Philippe Gloaguen et Michel Duval (le cofondateur) s’appliquent à faire de leurs livres des partenaires de périples indispensables pour tous voyageurs aux petits budgets. En surfant (notamment) sur la mode de l’auto-stop, le développement des auberges de jeunesse, la culture du camping et l’arrivée en France des charters (et plus tard des compagnies low cost). Le voyage (presque) accessible à tous en somme. Et mission accomplie dès 1980, moins de dix ans après son lancement. Puisque le Routard compte alors (déjà) dix guides en boutique… et la barre des 100 000 exemplaires vendus est franchie !
Réalisé par des enquêteurs-rédacteurs qui traquent les bons plans et magnifient la débrouillardise
Pour celui qui découvrait les joies du voyage à 13 ans, avec son père, en entamant un road trip à travers la Bretagne, le succès est incontestable. Il faut dire que par son format, assez génial, le Guide du Routard peut se glisser partout. Dans un sac à dos, une poche de pantalon, une petite valise… On l’épluche, on surligne ses adresses, on corne ses pages. Avec, entre autres, sa fameuse rubrique « Dangers et enquiquinements » qui permet souvent d’éviter bien des mésaventures. « Vérifier les pneus d’une voiture de location peut vous sauver la vie ! » rappelle en ce sens Gloaguen, avec un brin de malice. Enfin, on n’est pas peu fier de le glisser comme un « trophée » dans sa bibliothèque, une fois rentré chez nous.
Un vrai travail de terrain
Et même s’il a des concurrents, comme l’américain Lonely Planet, en France le Routard domine outrageusement le marché avec plus de 2 millions d’exemplaires vendus chaque année. Depuis sa création, il s’en est écoulé la bagatelle de 55 millions. Ses best-sellers ? Espagne, Italie, pour l’Europe ; New York, Vietnam et Thaïlande pour les destinations lointaines.« Nous restons une référence et nous avons une vraie communauté de fidèles. Beaucoup de lecteurs qui nous écrivent pour nous conseiller… ou nous déconseiller des adresses ! En tout, cela représente environ dix mille lettres et vingt-cinq mille mails par mois », se félicite Philippe Gloaguen.
Mais les véritables raisons de la popularité du guide reposent sur cet incommensurable travail de terrain. Réalisé par des enquêteurs-rédacteurs qui traquent les bons plans et magnifient la débrouillardise avec une liberté de ton unique. La réalisation d’un nouveau guide nécessite une équipe de quatre à cinq experts mobilisés sur place pendant près d’un an ! Et, rassurez-vous, ils sont bien plus aguerris que Yann, le personnage principal du film ! Prochain défi ? Refaire intégralement l’interface du site du Routard. Gratuit, grâce aux nombreux annonceurs qu’il attire, ce portail (lancé en 2001) qui séduit près de 5 millions de visiteurs uniques par mois va en effet faire peau neuve très prochainement. « Je ne peux pas vous en dire plus pour l’instant, mais vous ne serez pas déçu, promet son fondateur. Parole de routard ! »
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