
La finance durable a, de tout temps, été affaire de conviction. Depuis son origine au début du XXe siècle, dans les milieux religieux anglo-saxons qui refusaient d’investir dans l’alcool, le tabac ou l’armement, en passant par les années 1980, lorsqu’elle s’est institutionnalisée. « Je ne veux pas m’enrichir pour des activités que je réprouve ! », résume Hervé Guez, directeur des gestions de Mirova, une société de gestion d’actifs dédiée à la finance durable, affiliée à Natixis IM.
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En 2021, l’élan ESG – pour Environnement, Social et Gouvernance – atteint des records. Le directeur de gestion se souvient : « L’écosystème financier n’avait que cette notion de finance responsable à la bouche… Il y a eu un vrai emballement, de nombreux acteurs ont voulu investir dans ces fonds ESG alors très perfor- mants. » Mais la guerre en Ukraine, ainsi qu’un mouvement anti-ESG né aux États-Unis, ont cassé cette dynamique avec des contreperformances notables, notamment dans les fonds axés sur l’environnement investis en actions européennes, qui ont perdu en moyenne 14 % en 2022, selon l’indice de référence Morning-star : « Face aux contreperformances dues en partie à la montée des taux, certains ont fait marche arrière », analyse Hervé Guez, qui reste néanmoins sur ses positions : « Pour nous, l’investissement durable est une tendance de fond, c’est le sens de l’Histoire. Nous sommes convaincus que les entreprises, soucieuses des enjeux environnementaux et sociaux, auront une capacité de résilience et de per- formance plus longue et supérieure. »
Une conviction que partagent la plupart des grandes banques généralistes qui proposent aussi ces produits à leurs clients désireux d’investir de manière responsable, à condition que le rendement soit au rendez-vous. « Il est légitime que les gens ne veuillent pas faire le choix du responsable au détriment de la performance financière, mais si vous observez les chiffres de manière globale, les fonds ISR [label français, NDLR] ne performent pas moins que les placements classiques, c’est parfois même l’inverse ! », souligne Grégoire Cousté, délégué général du Forum pour l’investissement responsable (FIR), rassemblant les acteurs qui promeuvent la finance responsable.
Mais encore faut-il que ces fonds soient connus des Français. « Aujourd’hui, même les banquiers ne sont pas toujours capables de déterminer précisément la nature de ces produits, car ils sont trop généralistes, dénonce l’expert. Il est impératif que l’on crée des fonds dédiés par thème. Ainsi, l’investisseur peut choisir d’investir dans un domaine précis comme l’eau, les éoliennes, l’emploi, ou l’égalité homme-femme. Des Américains avaient créé un fond cancer par exemple, et ça avait cartonné ! »
Différentes études montrent que la majorité serait prête à faire le choix du responsable si on le lui proposait, mais il reste du chemin à parcourir dans la pédagogie. Un sondage Ifop pour le FIR en 2024 montre que 43 % des épargnants français n’ont jamais entendu parler de ces investissements, et seuls 10 % d’entre eux avaient déjà investi dans un fond ISR.
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