Le pape François avait donné des signes en nommant des femmes à des postes clés du Vatican et en leur permettant d’être reconnues ministres institués de l’Église pour la catéchèse. Mais cela n’a pas suffi. Le Comité de la jupe, fondé en 2008 pour « emmerder » le patriarcat clérical, a décidé d’un « jeûne du sexisme » à l’occasion du Carême contre « l’anthropologie masculiniste de l’Église ». Avec d’autres activistes, dont le collectif Féminisme en Église qui célèbre un « Dieu·e » déconstruit, ces militantes revendiquent l’accès au diaconat et à la prêtrise et des messes « féministes ».
Sans sourire, la fondatrice du Comité, Anne Soupa avait même candidaté au poste d’archevêque de Lyon en 2020. Mais l’ouverture au sacerdoce n’est qu’un prétexte. Dans le sillage du Catholic Women’s Council, il s’agit moins de reconnaissance que de reconfigurer le rapport homme-femme jusqu’à dénaturer la spécificité théologique du catholicisme.
« Le christianisme porterait à lui seul le vice consubstantiel de la masculinité toxique »
Le christianisme aurait ainsi effacé méthodiquement la pluralité sexuelle des panthéons de l’Antiquité. Un examen sérieux nuance pourtant l’importance dévolue aux déesses et prêtresses des croyances antiques. Si le polythéisme accorde naturellement des places aux divinités féminines, elles ne sont le plus souvent que des parèdres au regard des dieux tutélaires qui président, seuls, au destin du monde. Les porteuses d’offrandes grecques, les prophétesses égyptiennes, les vestales romaines comme les « druidesses » celtes sont écartées du clergé aux mains des hommes. Le judaïsme interdit aux femmes, pourtant vecteur de judéité, de lire la Torah à haute voix devant le mur des Lamentations quand l’islam leur refuse la direction spirituelle d’une mosquée.
Mais le christianisme porterait à lui seul le vice consubstantiel de la masculinité toxique. Les Évangiles révèlent pourtant un Christ attentif aux femmes qu’ils rencontrent. Rompant avec la tradition hébraïque, « il a mis en valeur la dignité et la vocation de la femme par tout son comportement, sans se conformer aux usages qui prévalaient », affirmait Jean-Paul II dans sa lettre apostolique Mulieris dignitatem. Offusquant les pharisiens, il s’entretient avec la Samaritaine de théologie et pardonne la femme adultère. Il n’y a que des femmes au pied de la Croix et c’est à Marie-Madeleine qu’il réserve l’annonce de sa résurrection. Aucun monothéisme n’a voué un tel culte à une femme comme Marie, dont l’hyperdulie la place au-dessus des saints.
Mais « bien qu’elle dépassât en dignité et en excellence tous les Apôtres », selon Innocent III, le Christ ne la choisit pas pour le sacerdoce ministériel, pas plus que celles, nombreuses à le suivre. La succession apostolique sera masculine. Il s’agit moins d’un choix sociologique, comme le pérorent les féministes, que de se conformer à la singularité sacrificielle du sacerdoce, inconnue de l’Ancien Testament. En effet, le prêtre agit non comme représentant spirituel d’une assemblée mais in persona Christi. Il est le signe sacramentel du Christ, époux et pasteur de l’Église, qui accomplit le sacrifice et parle par Lui.
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Le curé n’est pas un animateur et son sacerdoce n’est pas l’étape d’une carrière qui viendrait combler un désir de reconnaissance sociale. Le prêtre fait partie de la communauté des croyants mais s’en détache par la « potestas » particulière qu’il reçoit de l’ordination et qui se manifeste par le célibat. Les diaconnesses ont bien existé jusqu’au XIIe siècle mais elles ont été instituées, non ordonnées.
Depuis le magistère n’a cessé de rappeler que le monopole masculin du sacerdoce appartenait au dépôt de la Foi, « fondée sur la Parole de Dieu écrite » jusqu’au pape François. Quelques brèches ont été ouvertes mais la centaine d’ordinations forcées, le lobbying d’associations telle Women Ordination Conference ou encore les provocations de minorités actives pour miner l’institution ecclésiale n’ont pas encore fait florès. Ces militantes auraient pourtant pu saisir les mutations d’une ecclésiologie qui s’évertue à « féminiser » les usages chrétiens en lien avec la perception moderne d’un Dieu plus « doux » qui effacerait celui, réputé sévère et oppressant, de l’Ancien Testament.
« L’Église n’a pas besoin de réformateurs mais de saints »
Le Comité de la jupe pense avoir identifié la racine du mal « dans la vision ontologique que l’Église a des femmes ». S’appuyant sur l’épître paulienne affirmant qu’« il n’y a plus ni homme ni femme » mais « une seule personne dans le Christ », les mouvements féministes rêvent d’une société religieuse indifférenciée, composée d’êtres « épicènes » interchangeables. Mais si le christianisme, à rebours de la romanité, a établi l’égalité de dignité entre les hommes et les femmes, il ne confond pas des rôles qui ont vocation à se compléter conformément à la loi naturelle.
« Bien qu’il y ait entre eux une différence essentielle et non seulement de degré : l’un et l’autre, en effet, chacun selon leur mode propre, participent de l’unique sacerdoce du Christ », affirmait l’Église dans Lumen Gentium. Thérèse d’Avila, Catherine de Sienne ou encore Simone Weil et Edith Stein ont montré que des femmes pouvaient participer à la transmission du mystère de la Foi sans se sentir obligées d’officier. À leur manière, elles répondaient au vœu de Bernanos : l’Église n’a pas besoin de réformateurs mais de saints.
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