Le JDD. Cette semaine, Marco Rubio s’en est pris à votre ministre des Affaires étrangères et Elon Musk l’a carrément qualifié de « petit homme ». Cela change-t-il la perception des Polonais, très atlantistes, à l’égard des Américains ?
Dorota Piontek. Je ne le crois pas. Car, en cette période très particulière d’élection présidentielle, Radek Sikorski est surtout perçu comme un ministre du gouvernement Tusk. Il est vu par ceux qui soutiennent la paix comme une sorte d’ennemi agissant contre les intérêts de la Pologne. Ils ne ressentent pas cette insulte comme dirigée contre le peuple polonais et n’en veulent donc pas aux Américains. Et puis nous avons une sorte de relation clientéliste à l’égard de l’Amérique. On aime cette dépendance.
En écoutant SlawomirMentzen, on pourrait jurer parfois entendre Trump…
En suivant la campagne américaine, j’avais parfois l’impression de suivre nos propres élections. Nous vivons aussi une ère de divisions politiques et de polarisation culturelle semblable. Il y a ce sentiment d’abandon, ce manque de confiance envers les institutions en général. Le fait que Mentzen ait été un homme d’affaires, comme Trump, pourrait l’aider à asseoir sa crédibilité. Car nos politiciens sont souvent perçus comme sans lien avec la vie réelle. Nous avons une expression pour désigner ces politiques déconnectés, les « gros chats », des gens qui n’ont plus aucune motivation car ils ont déjà tout. Or Mentzen semble être une personne impliquée, soucieuse du bien-être des autres, désireuse d’apporter des changements, de travailler. Même si les gens ne sont pas d’accord avec les éléments précis de son programme, ils ressentent son énergie, sa force, son dévouement.
Certains médias le décrivent comme pro-russe. Est-ce une réalité ?
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Il n’a en tout cas pas publiquement exprimé de sympathie. Mais, comme Orbán ou Trump, il apprécie les régimes autoritaires. Sur l’Ukraine, il est vrai qu’une partie de la société polonaise est lassée, se plaint des conséquences sur le marché du travail. Il y a ce sentiment très subjectif que nous sommes moins bien traités que les Ukrainiens. L’économie se porte pourtant très bien.
Peut-il créer la surprise et se qualifier au second tour ?
Il y a une barrière psychologique à franchir. Slawomir Mentzen s’efforce de changer les mentalités, de montrer qu’il est capable de rivaliser et de dépasser les deux partis dominants. Si les gens commencent à croire qu’il peut gagner, il pourrait dépasser Karol Nawrocki, le candidat du PiS. Mais Jaroslaw Kaczynski, lorsqu’il se rendra en fin de compte de l’urgence, fera tout pour aider son poulain.
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