Le JDD. Votre déplacement en Israël est une première pour un dirigeant du RN. Quelle est la portée politique de cette visite et que souhaitez-vous démontrer à travers votre participation à cette conférence ?
Jordan Bardella. C’est un événement historique, qui témoigne de la place du Rassemblement national sur l’échiquier politique français et international. À l’invitation du gouvernement israélien, ma présence à Jérusalem pour cette conférence d’ampleur contre l’antisémitisme traduit notre engagement absolu dans ce combat. J’entends y rappeler que l’antisémitisme est un poison, qui ne doit souffrir d’aucune complaisance, en France comme partout dans le monde.
Le RN est aujourd’hui un parti de gouvernement, pleinement inscrit dans la défense des valeurs républicaines et la sécurité des Français, dont celle de nos compatriotes de confession juive qui subissent une montée alarmante de la haine et des violences.
J’aurai l’occasion de me rendre dans les territoires attaqués par le Hamas le 7 octobre dernier, mais également d’y rencontrer la communauté française installée dans le pays. Israël est un État ami de la France et nous avons vocation à dialoguer avec l’ensemble des Nations qui luttent contre le terrorisme islamiste.
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Vous allez intervenir sur la montée de l’antisémitisme en France depuis le 7 octobre. Selon vous, quelles en sont les principales causes et quelles réponses politiques proposez-vous face à ce phénomène ?
Dans les quelques mois qui ont suivi le 7 octobre, plus de 1 500 actes et propos antisémites ont été recensés en France. À titre de comparaison, on n’en recensait environ 500 sur toute l’année 2022. C’est un constat alarmant et révoltant. La principale cause de la recrudescence de cet antisémitisme d’atmosphère en France et sur l’ensemble du continent européen, c’est l’idéologie islamiste, renforcée par la naïveté de notre politique d’immigration, par le laxisme de nos lois comme par la complicité clientéliste d’une gauche devenue le porte-voix des thèses du Hamas en France.
Depuis des décennies, nous sommes en première ligne dans la dénonciation de ce totalitarisme du XXIe siècle, dont le fondement est la haine de l’Occident, des chrétiens, des juifs, de tous ceux qui ne lui ressemblent pas.
Protéger les Français en luttant contre l’islamisme appelle une réponse multidimensionnelle : réduction drastique de l’immigration, promulgation d’une loi bannissant l’idéologie islamiste, expulsion des étrangers radicalisés, fermeture des mosquées radicales, dissolution de toutes les officines islamistes présentes sur le territoire. Je veux être très clair : la lutte contre l’antisémitisme doit être implacable.
« La France insoumise a troqué le drapeau national contre le drapeau palestinien »
Vous avez régulièrement dénoncé La France insoumise, accusée d’alimenter un nouvel antisémitisme sous couvert d’antisionisme. En quoi considérez-vous que LFI joue un rôle dans cette montée des tensions en France ?
Dans les heures qui ont suivi le massacre du 7 octobre, on a vu des dirigeants de LFI incapables de nommer clairement le Hamas comme responsable et organisation terroriste. Ils ont tergiversé, bégayé, cherché à atténuer la barbarie. Quand une parlementaire de ce parti va jusqu’à qualifier le Hamas de « mouvement de résistance », on franchit la ligne de l’acceptable. La France insoumise a troqué le drapeau national contre le drapeau palestinien, et nourrit une obsession de l’État d’Israël qui n’est pas seulement clientéliste : c’est une idéologie structurée, basée sur le rejet d’un prétendu « impérialisme occidental » dont Israël serait, selon eux, le fer de lance.
Les accusations de « génocide » visent à faire porter au peuple juif la culpabilité d’un crime contre l’humanité qu’il a lui-même réellement subi au XXe siècle : c’est particulièrement indécent. La gauche porte désormais en étendard la haine d’Israël.
Par ailleurs, il y a quelques heures à peine, le groupe de La France insoumise a invité à l’Assemblée nationale, au cœur des institutions de la République française, le CCIE, ex-CCIF, dissout pour ses proximités avec l’islamisme… LFI se met dans la roue de toutes les revendications islamistes.
Le RN s’est longtemps heurté à une défiance de la part d’une partie de la communauté juive en raison du passé du Front national. Ce déplacement est-il une manière de tourner définitivement cette page ?
Le Rassemblement national n’est plus le Front national. Certaines déclarations, appartenant au passé, ont pu susciter un émoi légitime. Marine Le Pen s’en est toujours dissociée et personne ne peut sincèrement nous reprocher de ne pas en avoir tourné la page. Je constate d’ailleurs que de plus en plus de Français juifs nous accordent leur confiance. Des figures éminentes comme Serge Klarsfeld ont reconnu que face à la menace islamiste et à l’antisémitisme d’extrême-gauche, le RN apparaît aujourd’hui comme un parti républicain sérieux. Nous continuerons à démontrer, par nos actes et avec notre sincérité, que nous sommes au côté de tous les Français, quelle que soit leur confession.
Le RN se présente aujourd’hui comme un « bouclier » pour les Français juifs face à la menace islamiste. Pourtant, certains restent méfiants vis-à-vis de votre parti. Comment comptez-vous les convaincre de votre sincérité ?
La confiance ne se décrète pas, elle se construit, par les actes. Depuis 2012, comme présidente du parti, Marine Le Pen a cherché à faire du mouvement un « bouclier » pour nos compatriotes juifs face à la montée de l’islamisme. J’entends poursuivre cet édifice. Admettez que nous avons été les premiers à porter une analyse lucide et sincère de la situation et des périls qui pèsent aujourd’hui sur la France ! Je crois que nos compatriotes le savent. L’accueil bienveillant que nous avons reçu lors de la grande marche contre l’antisémitisme dans les rues de Paris, séchée par le Président de la République, n’en est-elle la meilleure preuve ?
« Marine Le Pen cherche à faire du RN un “bouclier” pour nos compatriotes juifs face à la montée de l’islamisme »
Quels échanges souhaitez-vous avoir et quel message porterez-vous sur la relation entre la France et Israël ?
Récemment, en marge d’un déplacement à Washington, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec le ministre israélien de la Diaspora Amichai Chikli, avec qui j’entretiens d’excellentes relations. Le message que je veux porter, c’est que la France se tient aux côtés d’Israël dans son combat contre le terrorisme islamiste. Israël est une démocratie, un allié stratégique et la France se doit de renouer avec des positions claire en matière diplomatique. Par ailleurs, la France abrite la plus importante communauté juive d’Europe, et la nationalité française est l’une des plus présentes en Israël.
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