
Le JDD. Vous avez achevé l’année dernière un plan de restructuration d’ampleur. Comment l’entreprise se porte-t-elle aujourd’hui ?
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Franck Vignard, DG France de BNP Paribas Personal Finance. Cette période de transformation est derrière nous. Aujourd’hui, nous ouvrons un nouveau chapitre, avec de nouveaux partenariats et une accélération sur les parcours numériques. Les consommateurs souhaitent accéder aux services financiers depuis leur smartphone ! Depuis soixante-dix ans, Cetelem accompagne les ménages dans le financement de leurs projets, en fonction de leurs besoins. Nous avons innové en permanence pour répondre aux changements sociétaux. L’enjeu est maintenant de les aider à réaliser la transition énergétique.
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Vous venez de mener une étude sur la consommation en 2025, en Europe. Quels en sont les grands enseignements ?
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Malgré une succession de crises sur les cinq dernières années, la consommation des ménages a bien résisté. Pour 73 % des Européens, elle a même augmenté sur les dix dernières années. Les notions de plaisir et de confort sont les principaux moteurs de cette consommation. Mais, depuis 2021, le pouvoir d’achat des ménages a été affecté par la hausse des prix de l’énergie couplée à une inflation qui a atteint jusqu’à deux chiffres en 2022. Six Européens sur dix déclarent ne pas avoir les moyens de consommer comme ils l’entendent, et il ressort que les Français sont ceux qui se restreignent le plus en raison des incertitudes économiques, politiques et sociales. On observe de l’attentisme, voire le report de certains projets.
Pourtant, pour la première fois depuis février 2021, l’inflation passe sous la barre des 1 % en France. Est-ce plutôt une bonne nouvelle pour la consommation ?
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Contrôler l’inflation était essentiel pour protéger les classes à revenus modestes et moyens ! Mais ce n’est pas suffisant, il reste une inflation cumulée qui n’est pas toujours compensée par l’augmentation des salaires, ce qui entraîne toujours une perte de pouvoir d’achat qui pèse sur la consommation. Cela incite les Français à épargner encore plus. Ils sont 43 % à souhaiter mettre davantage d’argent de côté en 2025 !
« Pour de nombreux Français, emprunter est un outil de gestion de leur budget »
Les chiffres de la Banque de France montrent une hausse des dossiers de surendettement des Français, plus 11 % en 2024 avec 134 803 procédures ouvertes… N’est-ce pas contradictoire ?
Le niveau de surendettement reste inférieur à celui de la période pré-Covid. Il est malheureusement souvent lié à des accidents de la vie, comme le chômage ou le divorce, qui entraînent un appauvrissement. C’est pourquoi nous allons inclure les séparations de couple dans nos dispositifs d’assurance. Mais n’allez pas vous imaginer qu’on octroie des crédits à tout-va. On en refuse plus d’un sur deux ! C’est crucial de proposer à chacun un prêt adapté à son projet et à sa capacité de remboursement. Chez Cetelem, 95 % des crédits sont réglés sans un seul incident de paiement et le taux d’impayés en 2024 était de seulement 1,68 %.
Quel est le profil type de vos emprunteurs ?
Globalement, ce sont des personnes de 45 ans qui sont plutôt bien stables dans la vie, issues de la classe moyenne, ou légèrement au-dessus. Ce ne sont pas les plus pauvres, contrairement à ce que l’on imagine parfois, car il faut avoir les moyens d’emprunter. Pour de nombreux Français, emprunter est un outil de gestion de leur budget. Il est plus intéressant d’acquérir une voiture sous la formule location et option d’achat (LOA) que d’acheter comptant !
Justement, la mobilité représente une part importante des crédits à la consommation… La transition vers l’électrique entraîne un bouleversement du marché. Êtes-vous touchés ?
La consommation est, en effet, affectée par la marche forcée imposée pour lutter contre le dérèglement climatique. On dit aux consommateurs : « Changez de voiture ! » ; « Isolez votre maison ! » Mais beaucoup se sentent démunis, car ce ne sont pas des projets qu’ils ont choisis ou anticipés. Dans l’absolu, ils sont convaincus de la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre et les dépenses énergétiques, mais c’est un investissement important et beaucoup n’osent pas engager de telles dépenses. C’est là que nous avons un rôle à jouer. Avec des formules compétitives pour l’acquisition de véhicules électriques notamment. Concernant la rénovation énergétique de l’habitat, nous finançons 36 % du crédit à la consommation en France, avec notre filiale Domofinance. Et surtout, nous accompagnons nos clients de A à Z. Les normes sont complexes, les subventions variables, on ne sait pas toujours quel choix faire et vers quel interlocuteur se tourner.
« Les Européens sont désireux d’adopter une consommation raisonnée »
Vous venez de signer un partenariat avec le géant Apple. N’est-ce pas une manière d’encourager la consommation de produits technologiques à fort impact environnemental ?
Le smartphone est devenu un produit essentiel dans la vie des citoyens, c’est un outil d’inclusion dont le coût est élevé. Avec nos partenaires, Apple mais aussi Orange, nous travaillons sur la seconde vie de ces équipements grâce au recyclage et au reconditionnement. Nous lançons également un dispositif permettant aux utilisateurs de rendre leur ancien appareil devenu obsolète afin qu’il soit reconditionné pour s’équiper d’un nouveau modèle.
L’impératif n’est-il pas précisément de moins consommer ?
Notre étude montre qu’effectivement les Européens sont désireux d’adopter une consommation raisonnée. Leur perception globale de la consommation est négative, associée à des notions de gaspillage et d’excès. Il y a un sentiment fort de culpabilité face aux impacts de la surconsommation, au point que neuf Européens sur dix se disent prêts à consommer moins. Et, paradoxalement, consommer peut aussi être bénéfique pour la collectivité. Investir dans des travaux pour améliorer l’efficacité énergétique de sa maison est une démarche vertueuse. Notre rôle est de faire en sorte que le coût d’un produit durable devienne compétitif. Car il faut garder en tête que si les consommateurs sont prêts à acheter moins et mieux, ils ne sont pas prêts à payer plus.
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