
« L’arme absolue », écrivait le général Pierre Marie Gallois, l’un des pères de la dissuasion nucléaire française. Seul pays de l’Union européenne à disposer de l’arme atomique, la France est propulsée au cœur des angoisses sécuritaires du Vieux Continent, contraint de réagir face aux risques de désengagement américain. Emmanuel Macron ne s’y est pas trompé, en déclarant être prêt à « ouvrir la discussion » quant à un éventuel élargissement de la dissuasion nucléaire française à l’Europe. Des propos lourds de sens qui ont suscité l’ire de Marine Le Pen. Depuis le Salon de l’agriculture, la chef de l’opposition a affirmé que la France ne « devait pas partager sa dissuasion et encore moins la déléguer ».
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Une polémique que le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a tenté d’éteindre en précisant que la « dissuasion nucléaire est et restera française, de la conception et la production de nos armes, jusqu’à la mise en œuvre sur décision du président de la République ». Dans l’entourage du ministre, on ajoute qu’il est nécessaire de « rediffuser notre culture stratégique », en répondant, notamment, à « beaucoup de pays qui nous posent des questions sur le fonctionnement de notre dissuasion ».
« Dès Le Livre blanc de la défense de 1972, la projection nucléaire française allait au-delà de notre simple sanctuaire national et concernait, aussi, nos alliés européens »
Pas de partage direct donc, mais un retour à une « position gaullienne » qui place les intérêts stratégiques vitaux de la France au-delà de nos frontières. « Dès Le Livre blanc de la défense de 1972, la projection nucléaire française allait au-delà de notre simple sanctuaire national et concernait, aussi, nos alliés européens », explique Benoît Grémare, chercheur associé à l’Institut d’étude de stratégie et de défense. À quoi ressemblerait un élargissement vers l’UE ? « Plusieurs scénarios sont envisageables, poursuit Benoît Grémare. Le plus plausible est de voir se mettre en place un parapluie nucléaire français, en complément ou en substitut au parapluie américain, conditionné à une primo-offensive nucléaire russe. »
Une demande déjà formulée par la Pologne et reprise par le chancelier allemand Friedrich Merz. Face à ces requêtes, Emmanuel Macron fait lui savoir qu’il est temps de proposer un « dialogue stratégique » aux partenaires européens dont les « capacités embarquées sont dépendantes des États-Unis ». Faut-il comprendre par-là que les avions de chasse et sous-marins nucléaires français pourraient être déployés aux frontières orientales de l’Europe ? Si oui, à quel prix ? À peine évoquée, la proposition d’Emmanuel Macron instaure un flou total.
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