
Au lendemain d’« une conférence de presse qui a mal tourné » à la Maison-Blanche, commente sobrement Emmanuel Macron, les Européens sont confrontés à « une nécessité d’agir ». D’autant plus quand le président de la République revendique d’avoir œuvré en faveur de la venue de Volodymyr Zelensky à Washington. Le regrette-t-il ? « Je pense que c’était une bonne chose qu’ils puissent se voir, insiste Emmanuel Macron. À partir du moment où on est convaincu que les États-Unis doivent rester engagés, il est important de faciliter tous les contacts possibles. Il faut des contacts, des contacts, des contacts. »
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La « nécessité d’agir » sera déployée en deux temps, avec une première étape aujourd’hui à Londres, avant une seconde jeudi, à Bruxelles, dans le cadre de l’Union européenne. Autour de Volodymyr Zelensky, seize chefs d’État européens tenteront, ce soir, d’afficher un front uni et surtout de « se coordonner » autour d’une position ferme et claire après une semaine contrastée à la Maison-Blanche. Soucieux de maintenir sa position pivot aux côtés du Premier ministre britannique, auquel le Président français reconnaît entre les lignes qu’il est sans doute meilleur facilitateur pour renouer le dialogue et un futur entretien entre Trump et Zelensky, Emmanuel Macron tente de maintenir sa position de protecteur des intérêts du Vieux Continent. Certes, l’épisode du Bureau ovale « crée beaucoup d’émotion, elle est légitime », tempère le président français à la manière d’un juge de paix. « Mais je dis qu’il faut à la fois avoir du respect pour tous ceux qui ont contribué à aider l’Ukraine, comme il faut avoir du respect pour ceux qui se battent pour leur liberté et leur indépendance », abonde-t-il.
Rien n’est exclu, je l’ai toujours dit. Le dialogue avec le président Poutine pourra avoir lieu au moment opportun.
Emmanuel Macron
Une volonté d’apaisement et de clarification, tel sera le message que tenteront d’adresser collectivement les Européens dans leur appel de Londres. « Nous sommes pour la paix, il ne faut pas qu’il y ait une inversion des valeurs. Mais pas pour une capitulation qui se fasse sur fond de débandade ou d’abandon des Ukrainiens », résume Emmanuel Macron. « Si les États-Unis concluaient un cessez-le-feu uniquement avec la Russie, ils se mettraient en contravention avec le droit international, ce qui serait, pour un membre du Conseil de sécurité, une rupture profonde, met en garde le chef de l’État. S’ils venaient à conclure un accord avec la Russie sans que les Européens soient autour de la table, et qu’il s’agisse de questions de sécurité, ce serait une rupture au sein de l’Alliance. » Un scénario auquel le président ne croit pas, rappelant que lors des conférences de presse en marge de sa visite à Washington, son homologue a « clairement parlé d’un “back-up” américain ». Où l’on comprend qu’à Londres, le message adressé sera aussi celui d’une confiance renouvelée dans la relation transatlantique. Quant à la question de savoir à quel moment le dialogue devrait être engagé directement entre les Européens et le président russe, « rien n’est exclu, je l’ai toujours dit, démine le président français. Le dialogue avec le président Poutine pourra avoir lieu au moment opportun. J’ai une approche extrêmement pragmatique avec une obsession qui est la sécurité des Français. »
À Bruxelles, l’enjeu pour Emmanuel Macron est de dépasser l’échéance de la paix en Ukraine pour déployer sur le long terme, une autonomie stratégique et de défense commune. « Cela prendra 5 ans, 10 ans, mais ce n’est pas grave », prévient le Président français, qui revendique de plaider depuis sept ans en ce sens, sans avoir toujours été entendu. « Je crois qu’aujourd’hui, c’est le moment d’un réveil stratégique, parce que tous les pays qu’il y a un trouble, une incertitude, sur le soutien américain dans la durée ». Face aux réticences toujours prégnantes d’une partie des anciens pays de l’Est, passés sous bouclier américain depuis la chute du mur de Berlin et qui y restent aujourd’hui fortement accrochés, le Président français s’appuiera sur les déclarations du nouveau chancelier allemand Friedrich Merz, atlantiste convaincu, qui plaide aujourd’hui pour « une capacité de défense européenne autonome » en guise d’alternative à « l’Otan dans sa forme actuelle ». Un chantier industriel, stratégique qui nécessite « une capacité de financement européenne massive rapide », prévient Emmanuel Macron, qui compte s’appuyer sur la relative déstabilisation que provoquent les déclarations du Président américain auprès d’une partie des Européens pour débloquer son projet jeudi à Bruxelles.
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