Ce César d’honneur, Louis de Funès, le plus grand acteur français de comédie, alors âgé de 65 ans, l’avait bien mérité. Quelle n’a pas été sa surprise de voir débouler sur scène, peu après l’hommage officiel que lui a rendu l’Académie, Jerry Lewis, 53 ans, son alter ego américain, qui a bien failli lui voler la vedette. Son premier geste a été de l’embrasser de force sur la bouche devant un public hilare !
Il a ensuite improvisé un sketch absolument irrésistible, faisant mine de lui donner son trophée à plusieurs reprises pendant son discours et se ravisant à chaque fois au dernier moment. « C’est un plaisir et un privilège, cher Louis, de vous présenter ce César qui récompense l’ensemble de votre carrière. J’ai regardé vos films quand j’étais tout petit. (Rires.) » S.B.
Romy Schneider (1980)
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Au sein de cette grande famille du cinéma, la scène des César a toujours été le théâtre de règlements de compte plus ou moins violents. Cette 5e édition n’y échappe pas. Sacrée meilleure actrice pour son rôle dans La Dérobade, de Daniel Duval, Miou-Miou décide de briller par son absence. Furieuse, après l’annonce d’Omar Sharif, Romy Schneider, alors maîtresse de cérémonie, fulmine et décide de prendre la parole : « Ce n’est pas correct, ni très gentil. C’est un manque de respect pour notre métier de ne pas venir. Que l’on soit nominé, ou pas. » La comédienne incriminée, malgré plusieurs performances XXL dans des films références ensuite, comme Tenue de soirée (1986), de Bertrand Blier, Milou en mai (1990), de Louis Malle, et Germinal (1993), de Claude Berri, ne sera plus jamais césarisée. F.A.
Coluche (1984)
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Le discours ne pouvait être qu’à la hauteur du personnage. Quand, sur la scène du théâtre de l’Empire, Coluche reçoit le César du meilleur acteur pour son rôle de pompiste alcoolique dans Tchao Pantin, de Claude Berri, il se paie la tête de ceux qui l’ont consacré face à la salle hilare : « Je me croyais franchement à l’abri vu que je faisais du cinéma qu’on ne récompense pas et qui fait des entrées quand même. »
La suite est à l’avenant. En 2008, dans le magazine GQ, Gérard Lanvin confiera que le trublion n’avait pas eu besoin d’entrer dans la peau du personnage. « Ces cons-là m’ont filé un César alors que je n’ai strictement rien fait. On m’a juste filmé dans ma déprime », lui avait-il dit. BAP.T
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Vanessa Paradis (1991)
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D’une Judith à l’autre et c’est la gaffe. Un an après avoir reçu le César du meilleur espoir féminin pour Noce blanche, de Jean-Claude Brisseau, Vanessa Paradis le décerne à son tour, invitée par Richard Bohringer à le rejoindre sur scène. Parmi les nommées, deux Judith, Godrèche et Henry, respectivement pour La Désenchantée, de Benoît Jacquot, et La Discrète, de Christian Vincent. Stressée, la jeune femme se trompe, annonçant la première au lieu de la seconde. « Merde ! Pardon… Oh je suis désolée… » Sa gêne est palpable, on sourit en pensant au titre du film de Jacquot. Elle en rira en 2010, au moment de remettre le prix du meilleur réalisateur, dans un sketch avec Valérie Lemercier et Gad Elmaleh. BAP.T.
Romane Bohringer (1993)
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Ses larmes sont immédiates. À l’annonce de son nom comme lauréate du meilleur espoir féminin pour son interprétation dans Les Nuits fauves, ce 8 mars 1993, la comédienne d’à peine 20 ans a la voix qui tremble : « J’espère que tu es fier de moi, Cyril. Moi, si tu savais comme je suis fière d’avoir été ta Laura. Vraiment, c’est le plus beau cadeau qu’on m’ait fait dans ma vie. » Elle s’adresse alors à Cyril Collard, le scénariste et réalisateur, emporté trois jours plus tôt des suites du sida. Un fléau justement au centre de son œuvre, quadruplement primée ce jour-là, notamment dans la catégorie meilleur film. « Je suis sûre que là-haut, tu as déjà trouvé une pellicule et une caméra », conclut Romane. Bouleversant. F.A.
Annie Girardot (1996)
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Ce soir-là, l’émotion était à son comble quand l’actrice a été récompensée pour la première fois à l’âge de 64 ans pour son rôle de madame Thénardier dans Les Misérables, l’adaptation au cinéma de l’œuvre de Victor Hugo par Claude Lelouch. En proie à la sidération et applaudie à tout rompre par une salle debout, Annie Girardot n’a pas pu retenir ses larmes et a prononcé un discours sur scène qui a marqué à tout jamais l’histoire des César. « Cela fait tellement longtemps. Je ne sais pas si j’ai manqué au cinéma français, mais à moi le cinéma français a manqué follement, éperdument, douloureusement. Votre témoignage et votre amour me font penser que peut-être, je dis bien peut-être, je ne suis pas encore tout à fait morte. » S.B.
Jamel Debbouze et Adriana Karembeu (1999)
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La séquence est courte, mais n’en est pas moins culte. Le trublion de Canal+ est alors l’humoriste en vogue, elle, l’une des plus belles femmes du monde, et ils forment un improbable duo de remettants. Aussitôt, Jamel se lance dans une drague aussi maladroite que jubilatoire.
L’interrogeant sur la taille de ses jambes (1,24 mètre), lui demandant si elle est la femme de Zinédine Zidane (elle était celle de Christian Karembeu) et allant jusqu’à s’avancer tout près de son décolleté vertigineux ! L’assemblée est hilare, mais Adriana semble embarrassée. Elle reconnaîtra plus tard en avoir souffert : « Parce que c’était improvisé. Je ne savais pas qui était Jamel et je ne parlais pas français. » Une autre époque, déjà… F.A.
Valérie Lemercier (2007)
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Même chapeau noir, même redingote et mêmes papillotes, la présentatrice de cette 32e cérémonie enflamme le théâtre du Châtelet. Pendant quelques secondes, entourée de danseurs, elle reproduit la chorégraphie mythique de Louis de Funès dans Les Aventures de Rabbi Jacob (1973), de Gérard Oury. Cette fameuse danse hassidique traditionnelle que son personnage doit alors exécuter bien malgré lui dans les rues de Paris. Une séquence drôle, originale, mais également lourde de sens. La comédienne (et l’Académie) souhaitant alors rendre hommage à la star, récompensée in extremis d’un César d’honneur trois ans avant sa mort. Afin de réparer cette maladresse, autant que pour réhabiliter l’humour populaire, souvent méprisé par les élites du cinéma de son époque. Une réussite. F.A.
Jean-Paul Belmondo (2017)
Il est apparu sur scène devant une standing ovation méritée. En 2017, Jean-Paul Belmondo se tient fièrement debout, sa canne à la main, les yeux embués de larmes. Autour de lui, ses amis forment une haie d’honneur : Charles Gérard, Françoise Fabian, Claudia Cardinale… Il prend la parole, en dépit de ses difficultés d’élocution depuis son AVC en 2001.
« Je vous remercie pour vos applaudissements qui me vont droit au cœur. Jeune, tout le monde trouvait que j’avais une sale gueule. Alors ma mère m’a dit que je devais être comme mon père, avoir du courage. Je n’en ai jamais manqué, ce qui fait que je suis là. » En 1989, le « Magnifique » n’avait pas récupéré son César du meilleur acteur gagné pour Itinéraire d’un enfant gâté, de Claude Lelouch. En cause : son père, sculpteur, brouillé avec… l’artiste César lui-même ! S.B.
Brad Pitt (2023)
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Cette 48e cérémonie restera marquée par l’arrivée surprise sur la scène de l’Olympia de Brad Pitt pour rendre hommage à David Fincher, récompensé d’un César d’honneur. Le cinéaste l’a dirigé à trois reprises dans Seven (1995), Fight Club (1999) et L’Étrange Histoire de Benjamin Button (2008). « Bonsoir, je m’appelle Brad Pitt et je suis un rescapé », plaisante l’acteur en allusion à la noirceur de ses films. Plein d’humour (« Soi-disant, pendant qu’il filmait la naissance de sa fille, il aurait demandé au gynécologue si on pouvait la refaire ») et d’affection (« Ma vie a changé pour toujours ce jour de 1994 où j’ai pris un café avec David Fincher »), son discours séduira toute la salle. La grande classe ! BAP.T.
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