D’Eric Khoo, avec Catherine Deneuve, Yutaka Takenouchi, Masaaki Sakai. 1h34.
Claire, chanteuse à la renommée internationale, part en tournée au Japon, où elle noie son chagrin et sa solitude dans le saké. Une fois son dernier concert achevé, sa vie sur Terre s’arrête aussi. Elle découvre avec stupeur qu’elle est coincée ici-bas avec Yuzo, l’un de ses plus vieux fans, tant qu’elle n’aura pas fait la paix avec son passé… Le réalisateur singapourien Eric Khoo s’aventure au pays du Soleil-Levant en emmenant l’extraordinaire Catherine Deneuve dans son bagage pour raconter cette histoire de fantômes belle, douce, sensible, poétique et mélancolique. La tradition veut que les morts cohabitent avec les vivants tant qu’ils n’ont pas trouvé les réponses à leurs questions. Un récit sur le travail du deuil, rythmé par les mélodies de Jeanne Cherhal, bouleversant mais aussi réconfortant.S. B.
A Real Pain ★★★
De et avec Jesse Eisenberg, Kieran Culkin. 1h29.
Deux cousins que tout oppose, David, introverti, et Benji, aux sautes d’humeur imprévisibles, se donnent rendez-vous à l’aéroport pour un voyage qui va les bouleverser : partir en Pologne sur les traces de leur grand-mère, qui a survécu à l’Holocauste. Rien ne se passe comme prévu… Après La Zone d’intérêt, de Jonathan Glazer, L’Ombre du commandant, de Daniela Völker, et La plus précieuse des marchandises, de Michel Hazanavicius, l’an dernier, au tour de Jesse Eisenberg de contribuer au devoir de mémoire avec ce récit d’introspection cathartique, alors qu’on vient de célébrer les 80 ans de la libération du camp de concentration d’Auschwitz-Birkenau. Cette fiction, construite à partir d’éléments autobiographiques, repose sur la dynamique du tandem antagoniste qu’il forme avec Kieran Culkin (Benji), dont l’exubérance, la grossièreté et les répliques cinglantes traduisent le mal-être. Un numéro d’équilibriste impressionnant de la part du phénomène révélé par la série Succession, aussi pénible qu’attachant à l’écran. Un film sincère, toujours entre humour et émotion. S. B.
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À bicyclette ! ★★★
De et avec Mathias Mlekuz, Philippe Rebbot. 1h29.
Après le suicide de son fils Youri en 2022, l’acteur Mathias Mlekuz et son ami Philippe Rebbot entreprennent à vélo le même voyage que lui il y a six ans, de La Rochelle à Istanbul. Aucun échange écrit en amont du tournage ici, pas de situations programmées non plus, si ce n’est le discours du départ, la rencontre finale avec la petite amie de Youri et à mi-chemin une scène très drôle dans l’Airbnb d’une comédienne autrichienne sans qu’elle soit dialoguée. Deux copains attachants par contre, sortes de Laurel et Hardy donnant au road trip des allures de buddy movie. Plus encore que le récit d’un deuil, A bicyclette ! est celui d’une belle amitié qui dans son alternance tragicomique déride autant les zygomatiques qu’il embue les yeux avec ses séquences improvisées levant les craintes du pathos, si bien que jamais le spectateur ne se sent vraiment de trop quand les gorges se nouent. Il est suffisamment rare de voir des comédiens boomers montrer à l’écran leur fragilité sans le fard de leur profession. Bap. T.
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Cronos ★★★
De Guillermo del Toro, avec Federico Luppi, Ron Perlman. 1h33.
En 1536, un alchimiste, qui a fui l’Inquisition espagnole pour se réfugier au Mexique, confectionne un curieux mécanisme capable d’offrir la vie éternelle à son utilisateur. Il est retrouvé mort… en 1937 ! De nos jours à Mexico City, un antiquaire découvre l’artefact dissimulé dans une sculpture d’archange. Quand il le prend en main, une minuterie s’enclenche… Quel bonheur de déguster le premier long métrage de Guillermo del Toro datant de 1993, inédit dans les salles françaises, qui marque la naissance d’un grand auteur et donne quelques clés de compréhension pour le reste de sa filmographie, notamment son goût pour l’étrange et le monstrueux. Le récit qui revisite le mythe du vampire fourmille d’idées de mise en scène tout en conservant une humilité dans l’exécution, ce qui le rend terriblement attachant.S. B.
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Becoming Led Zeppelin ★★★
De Bernard MacMahon. 2h02.
Ils étaient jeunes lorsque ces Britanniques fondèrent l’un des plus grands groupes de rock au monde – 20 ans pour le chanteur Robert Plant à la sortie de leur premier album en 1969. Mais ils avaient fait déjà leurs armes bien avant – on prétend que dans la seconde moitié des années 1960, entre 50 et 90 % des sessions studio ayant eu lieu à Londres portent la marque du guitariste Jimmy Page. C’est ce que retrace ce film donnant amplement la parole à chacun des quatre membres de Led Zeppelin – des archives sonores pour le batteur John Bonham, disparu en 1980. Resserrant la focale du microscope, ce documentaire se concentre sur cette genèse, laissant ensuite libre cours à Wikipédia d’écrire la suite de son ascension. L. P.
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Queer ★★
De Luca Guadagnino, avec Daniel Craig, Drew Starkey, Jason Schwartzman. 2h16.
À Mexico dans les années 1950, Lee, un Américain expatrié, écume les bars chaque soir pour des aventures sans lendemain. Un jour, il a le coup de foudre dans la rue pour Allerton, jeune homme avec qui il ne va pas tarder à développer une complicité intellectuelle et sexuelle… Adaptation de la nouvelle éponyme de William S. Burroughs, ce drame érotique dresse le portrait d’un individu consumé par une passion amoureuse non réciproque, et par conséquent toxique. On pense à Mort à Venise (1971), de Luchino Visconti, à travers ce personnage rongé par le désir et les regrets. S’il souffre de longueurs et déroute par ses parenthèses oniriques surréalistes, le récit, toujours sur le fil, déborde d’idées de mise en scène et Luca Guadagnino (Call Me By Your Name) filme le corps masculin comme personne. Souligné par une musique anachronique, un contre-emploi saisissant pour Daniel Craig. S. B.
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La Vie devant moi ★★
De Nils Tavernier, avec Guillaume Gallienne, Sandrine Bonnaire, Violette Guillon. 1h31.
En 1942, Tauba échappe de justesse avec ses parents à la rafle du Vel d’Hiv. Un couple de Français accepte de cacher cette famille juive polonaise dans une chambre de bonne, sous les toits de Paris. L’adolescente est alors contrainte à l’immobilité et au silence… Adapté de l’histoire vraie de Tauba Birenbaum, gardée pendant 765 jours par des Justes pendant la Seconde Guerre mondiale, ce film avance masqué : sous ses dehors de drame historique se dissimule un thriller anxiogène à huis clos, reposant sur un dispositif minimaliste et claustrophobe, adoptant le point de vue de la jeune fille empêchée comme Anne Frank. Dans ce récit à vocation pédagogique, alimenté de nombreuses images d’archives, Guillaume Gallienne mise sur la sobriété et l’intériorité en père parano, épiant les moindres faits et gestes des voisins de sa minuscule fenêtre, pour protéger les siens. S. B.
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Creation of the Gods II : Demon Force ★★
De Wuershan, avec Yosh Yu, Bo Huang, Kris Phillips. 2h24.
Le roi Shang, toujours sous l’influence de sa maîtresse possédée par un démon, décide d’envoyer son armée pour exterminer ses ennemis. Il mandate une générale prête à en découdre. Elle croise le chemin de Ji Fa, qui organise la résistance face à l’oppresseur. Cette suite reprend les ingrédients ayant contribué au succès de l’original sorti en 2023 (et qu’il faut avoir vu au préalable) : batailles épiques dignes de la trilogie Le Seigneur des Anneaux de Peter Jackson, intrigues shakespeariennes à la cour d’un despote acculé, légendes ancestrales, magie noire, créatures surnaturelles, divinités belliqueuses, malédictions, métamorphoses, romantisme tragique. Une superproduction chinoise qui offre une fresque historique ambitieuse, spectaculaire et lyrique, en dépit d’un scénario dense n’évitant pas quelques longueurs. Ce récit d’heroic fantasy généreux parle d’honneur, de sacrifice, de loyauté et de vengeance, puise dans le folklore pour construire un divertissement total, truffé d’effets spéciaux, qui appelle clairement un troisième volet ! S. B.
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To the North ★★
De Mihai Mincan, avec Nikolaï Becker, Soliman Cruz. 2h02.
En 1996, deux jeunes migrants roumain et bulgare embarquent clandestinement sur un porte-conteneurs à destination du Canada. Après avoir signalé sa présence, le second est jeté à la mer sur ordre de son capitaine taïwanais. Un matelot philippin vient en aide au premier en le cachant sur le navire. Inspiré d’une histoire vraie, ce premier long métrage en forme de huis clos maritime surprend à plus d’un titre. D’abord par son rythme flottant, ce qui ne l’empêche pas d’embarquer à son bord le spectateur pris dans ses oppressants filets avec son atmosphère (beau travail sur le son) et son réalisme. Par l’intelligence de son scénario ensuite, To the North préférant au tout noir ou tout blanc différentes nuances de gris sans sacrifier à celles-ci l’horreur du drame qui s’y joue. Bap. T.
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