Tous les héros ne portent pas de cape. Victime d’un arrêt cardiorespiratoire le 18 juin 2024 lors d’un match de foot en salle, le milieu de terrain du LOSC a été autorisé à rejouer, équipé d’un défibrillateur sous-cutané. Et comme l’histoire devait être belle, l’international algérien est même parvenu à ouvrir le score à la 80e minute, ouvrant la voie à la victoire des siens à Rennes (0-2).
Miraculeux. Après huit mois d’entraînement acharné, une intervention chirurgicale et un suivi médical millimétré, la renaissance. « Je passe du tout au rien, lâche-t-il à la fin du match. Entrer sur le terrain, cela fait six mois que je le visualise. J’étais devenu comme un recruteur en tribunes, à tout analyser. J’ai bossé dur pour revenir mais le plus important, c’était ma santé. »
Une victoire aussi pour la chirurgie cardiaque toujours plus pointue qui offre désormais une extra-balle à ces joueurs en détresse. Ce boîtier d’un centimètre d’épaisseur, de la taille d’une carte de crédit, a été inséré dans le creux de la clavicule de Nabil Bentaleb. Directement relié au cœur, ce dispositif autonome corrige les anomalies et déclenche automatiquement un choc électrique en cas de risque d’arrêt cardiaque. « Les réglages sont extrêmement minutieux et adaptés au rythme soutenu d’un footballeur professionnel », m’explique le professeur François Carré, cardiologue au CHU de Rennes.
Il est l’un des huit spécialistes qui ont été consultés par la commission médicale de la FFF pour valider le retour du joueur sur les terrains. « Mais il n’est pas infaillible. Il peut y avoir un choc inapproprié si le cœur s’emballe et va au-delà des seuils enregistrés. L’autre risque, c’est qu’un contact violent pendant un match vienne le détériorer. Ce joueur sera suivi de très près tout au long de la saison. »
Avant lui, le footballeur danois Christian Eriksen, victime d’un arrêt cardiaque lors de l’Euro 2021, a pu grâce au même défibrillateur rejouer sept mois plus tard, mais en Angleterre : son précédent club, l’Inter Milan, a dû rompre son contrat, l’Italie étant le seul pays européen interdisant la pratique aux joueurs équipés de ce dispositif. Les autres font preuve de souplesse.
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La mort foudroyante du Camerounais Marc-Vivien Foé en 2003 sur la pelouse de Gerland à Lyon, a déclenché des changements radicaux en matière de prévention et de prise en charge de ce type d’accidents. « En France, actuellement, on arrive à un taux de survie de plus de 70 % pour des sportifs de haut niveau victimes d’un arrêt cardiaque en compétition. Il est de moins de 10 % quand il se produit dans la rue », poursuit le médecin.
Dès lors, où se situe la limite ? Quand performance rime avec souffrance, que d’autres enjeux, notamment économiques, troublent la perception, les footballeurs n’ont-ils pas tendance à devenir sourds aux limites de leur propre corps ? « Je me souviens de ce joueur ivoirien* qui souffrait d’une pathologie grave du cœur et s’était vu refuser le droit de jouer en France, conclut François Carré. Il me disait : “Le foot c’est ma vie, je fais vivre tout mon village, je dois jouer !” Il est parti en Chine et il est mort sur le terrain quelques mois plus tard. »
*Le 5 juin 2017, le milieu défensif Cheick Tioté, 30 ans, vainqueur de la Coupe d’Afrique des Nations avec la Côte d’Ivoire en 2015, décède d’une crise cardiaque lors d’un entraînement avec son club de Pékin.
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