Le mis en cause est arrivé aux alentours de 11h30 à proximité du tribunal. Caché sous un parapluie, il est entré via une porte dérobée située à l’arrière du bâtiment, entouré d’une dizaine de photographes ayant compris le subterfuge. L’ambiance est particulièrement électrique ici à Vannes. Outre plusieurs organisations syndicales et féministes rassemblées devant le tribunal et venues pour dénoncer notamment les manquements de l’Ordre des médecins, ce sont près de 467 journalistes et dessinateurs de presse qui sont accrédités pour ce nouveau procès historique.
Quelques mois après la fracassante affaire Pelicot dans le Vaucluse, un nouveau cas sordide secoue donc la France. Aujourd’hui âgé de 74 ans, Joël Le Scouarnec est poursuivi pour des centaines de viols et agressions sexuelles sur d’anciens patients mineurs. Au total, l’homme est passé par une douzaine d’établissements de l’ouest de la France et a sévi plusieurs fois dans chacun d’entre eux, sans être jamais inquiété. Ces trois décennies marquées par ces faits extrêmement graves ont pris fin en mai 2017, grâce à la plainte d’une jeune voisine du médecin, âgée de six ans et l’accusant de l’avoir violée à Jonzac (Charente-Maritime).
L’audience s’est ouverte à 13 heures. Joël Le Scouarnec est entré dans le box en se tenant droit, vêtu d’une veste noire. Cheveux blancs, crâne dégarni, il décline distinctement son identité au micro. L’audience commence par les demandes de constitution des parties civiles et, déjà, les premiers échanges tendus.
L’ordre des médecins du Morbihan demande à en faire partie, estimant que Joël Le Scouarnec « a gravement déconsidéré la profession ». Cette requête fait immédiatement réagir Frédéric Besnoit, avocat de l’association La Voix de l’enfant. « Cette demande est presque indécente et juridiquement contestable », harangue-t-il. En effet, dans ce dossier, les parties civiles estiment pour la plupart que l’ordre des médecins a fermé les yeux sur les agissements du chirurgien pédophile. D’ailleurs, l’avocate qui représente l’association Face à l’inceste rappelle que le Conseil départemental et national de l’ordre des médecins est visé par une plainte « pour non-obstacle à la commission d’infractions ».
L’avocate, Negar Haeri, qui représente le Conseil national de l’ordre des médecins, a pris la parole pour indiquer vouloir défendre « les intérêts collectifs de la profession qui ont été salis par les agissements de Joël Le Scouarnec ». En se tournant vers ses confrères, elle déclare comme pour les convaincre : « La place du Conseil national de l’ordre est aux côtés des victimes même si je comprends les contestations de certaines parties civiles. »
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En prononçant ses mots, elle espère que distinction soit faite entre le Conseil national et les conseils départementaux ou régionaux de l’ordre des médecins. Les autres avocats se relaient ensuite à la barre pour relayer les demandes ou renouvellement de constitution de partie civile pour leurs clients, qu’ils soient victimes directes ou indirectes (grands-parents, parents, frères, sœurs…). La Cour se prononcera sur ces demandes à la toute fin du procès, en juin. Elle peut décider de refuser certaines demandes notamment pour des victimes trop indirectes.
Outre cette étape judiciaire, ce lundi est aussi consacré à l’organisation des jours à venir. Les victimes le souhaitant seront entendues du 5 mars au 16 mai, dans l’ordre chronologique des violences sexuelles commises par Joël Le Scouarnec. Cette semaine sera sinon consacrée aux témoignages des proches de l’ancien médecin (ses trois fils et son ex-femme). Se retrouveront également à la barre, son frère et sa sœur (dont les enfants ont été abusés par Le Scouarnec), ainsi qu’une cousine et une amie de l’accusé. Ce dernier sera interrogé dès jeudi sur son parcours professionnel afin de mieux comprendre comme a pu agir aussi facilement ce « routard du viol ».
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