Du chagrin et de l’incrédulité. Dimanche, dans les rues de Mulhouse, les passants sont rares et se hâtent sous la grisaille et une pluie fine. Seul un ruban de balisage de la police témoigne du drame de la veille qui s’est déroulé en pleine après-midi. Un homme de 37 ans est soupçonné d’avoir tué à l’arme blanche une personne et d’avoir grièvement blessé deux agents du stationnement et cinq policiers municipaux, un « acte de terrorisme », selon le président Emmanuel Macron.
La place du marché est bordée par quelques restaurants, fast-food ou kebabs. « J’étais au marché, j’ai entendu des cris, la police, je voyais les gens courir, je suis vite rentrée chez moi », témoigne Sema Dehlas, 48 ans, les larmes aux yeux, revenue sur la place du marché où a débuté l’attaque la veille.
« Du squat, des armes, de la drogue »
Hamza Saddek, patron du Kawa café, à quelques mètres de la place, dit être « sous le choc » et exprime son « dégoût » après l’attaque commise dans ce quartier cosmopolite de la ville d’un peu plus de 100.000 habitants, au riche passé industriel. « Je sortais de la mosquée, ils étaient en train » d’arrêter le suspect principal, né en Algérie, ajoute Hamza Saddek.
Dans le quartier de Bourtzwiller à Mulhouse, les forces de l’ordre sont intervenues dimanche matin dans un immeuble fréquenté par l’assaillant. Son hébergeur a été placé en garde à vue dans la matinée. « Habituellement, ils vivaient à 3 ou 4, dont Brahim [l’assaillant] mais il ne dormait pas tout le temps ici », explique une voisine qui a assisté à la descente de police au petit matin, et préfère rester anonyme. « Ce n’est pas la première fois qu’il y a du squattage, des armes, de la drogue. Ce bâtiment a une sale réputation », a-t-elle déploré.
« Langue de Momo »
« Ça crée un sentiment supplémentaire d’insécurité dans la ville », estime Kingsle Bassey, 21 ans, alternant chez un buraliste de la ville. « On se croirait dans un film, c’est irréaliste, c’est choquant », ajoute-t-il, soulignant l’aspect « cosmopolite » du quartier. Farouk Kaddouri, 50 ans, parle de l’effet d’un « coup de tonnerre » quand il a appris la nouvelle samedi. « Ici, on a la langue de Molière et la langue de Momo », dit-il en référence à une ville où se côtoient de nombreuses communautés « dans le partage ».
« Ça va nous retomber dessus », redoute Bachir, 52 ans, un Algérien qui a grandi à Mulhouse. « Ça n’a rien à voir avec l’islam, l’islam c’est une religion de paix », insiste-t-il préférant ne pas donner son nom de famille. « C’est un malade », dit-il à propos du suspect. « C’était le moment de la prière, si c’était un vrai musulman, il aurait été à la mosquée et n’aurait pas été en train de tuer des gens », renchérit Hamza Saddek. « Pour commettre des actes de barbarie si atroces, il faut être dérangé », abonde Farouk Kaddouri.