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« Je viens d’avoir une longue et très productive conversation téléphonique avec le président russe Vladimir Poutine. Nous avons parlé de l’Ukraine, du Moyen-Orient, de l’énergie, de l’intelligence artificielle, du pouvoir du dollar et de divers autres sujets. Nous avons tous deux réfléchi à la grande histoire de nos nations et rappelé que nous avons combattu ensemble avec tant de succès pendant la Seconde Guerre mondiale, où la Russie a perdu des millions de personnes et nous aussi. Nous avons tous deux parlé des forces de nos nations respectives et […] des grands avantages que nous aurons un jour à travailler ensemble. » Dans le Bureau ovale où le président américain répond aux questions des journalistes, l’atmosphère est plus joviale. Pour la première fois depuis très longtemps, les présidents des deux plus gros arsenaux nucléaires de la planète se sont parlé. Et ils ont parlé de faire la paix.
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La journée du mercredi 12 février avait été forte en émotions. Elle avait débuté en Allemagne où Donald Trump avait envoyé Pete Hegseth, son secrétaire à la Défense, à la Conférence sur la sécurité de Munich. Avec sa gueule de GI façon poupée Barbie, Hegseth n’y est pas allé par quatre chemins. Première salve : « Les Européens vont devoir fournir la contribution la plus élevée du financement pour l’Ukraine… Les États-Unis ne toléreront plus une relation déséquilibrée avec leurs alliés qui doivent impérativement augmenter leur budget de défense. » Deuxième salve : « Il est irréaliste d’espérer que l’Ukraine revienne à ses frontières de 2014 », avant d’enfoncer le clou en expliquant que le pays ne rejoindrait pas l’Otan. À cela, il fallait ajouter la confirmation dans la journée par le Sénat de la nomination de Tulsi Gabbard, opposante de toujours aux interventions américaines à l’étranger, comme directrice du renseignement. Le plan de route est tracé. Trump avance ses pions sur l’échiquier mondial. Il continue à prendre tout le monde de vitesse.
L’impossible victoire de Kiev
Pour l’Ukraine, ces événements sont cruels. Pour ses sponsors européens aussi. Certains refusent d’y croire. Sur la chaîne LCI, on diffuse un reportage sur des armes secrètes qui viendraient inverser le sort des armes en faveur de l’Ukraine… En parallèle, le colonel Michel Goya s’acharne à expliquer que l’Ukraine peut encore gagner. « Il y a cette vision, cette théorie de la victoire… en 2025, dit l’ancien commandant des troupes de Marine. Si on tient, si on continue le combat, on peut peut-être, fin 2025, obtenir un changement de rapport de force. » On notera au passage l’usage de « on »… Et de se rappeler qu’officiellement, la France n’est pas en guerre avec la Russie, et que Michel Goya n’est pas Ukrainien…
Volodymyr Zelensky suit bien sûr ces événements avec effroi. Il se dit aussitôt « prêt à la paix avec Poutine ». Lui aussi s’entretient avec Trump. Ce dernier le rassure au téléphone, mais déclare ensuite qu’il veut des élections et que le même Zelensky n’est pas certain de les remporter… Le président ukrainien avait pourtant lâché beaucoup de lest. La veille, il s’était déclaré favorable à céder à Trump 500 milliards de dollars de terres rares à destination de l’industrie des hautes technologies. Trump les a revendiqués comme « dédommagement de l’argent accordé à l’Ukraine » depuis le début de la guerre. Voulant retrouver l’initiative, Zelensky propose d’échanger des territoires avec la Russie, en particulier les quelques centaines de kilomètres carrés que les Ukrainiens contrôlent toujours dans la région de Koursk à la suite d’une audacieuse offensive en territoire russe. Les Russes affirment aussitôt par l’intermédiaire de Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, qu’il n’y aura aucun échange de territoires.
Moscou est clair : il n’y aura aucun échange de territoires
Pékin en arrière-plan
Le coup de grâce pour Zelensky est venu dans la soirée avec l’échange téléphonique entre Vladimir Poutine et Donald Trump et l’imminence d’une rencontre qui, d’après l’homme de Washington, pourrait se tenir en Arabie saoudite. Mais c’est le ton employé par le nouveau locataire du Bureau ovale au sujet de cette conversation qui est peut-être le plus choquant. Poutine semble être un vieux camarade. Donald Trump le réhabilite dans la communauté internationale. Qu’il soit recherché par la Cour pénale internationale (CPI), il s’en fiche. De toute façon, les États-Unis n’ont jamais ratifié la CPI. Pour Donald Trump, il n’y a en définitive qu’une chose qui compte : que la Russie ne soit pas totalement dans le giron de la Chine, le véritable compétiteur sur l’échiquier mondial.
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Au cours de son engagement dans la guerre du Vietnam, le capitaine John Kerry, futur sénateur américain, s’était fait remarquer par cette phrase : « Comment expliquez-vous à un homme qu’il doit être le dernier à mourir au Vietnam ? » Dans les tranchées du Donbass, en apprenant le bouleversement en cours, les soldats ukrainiens ont dû se demander quel pouvait être dès lors l’intérêt de monter à l’assaut le lendemain…
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