Il l’a martelé tout au long de sa campagne électorale : « Moi au pouvoir, jamais la guerre en Ukraine n’aurait eu lieu. » À chaque meeting, la même promesse : « Si je suis élu, la guerre s’arrêtera en 24 heures chrono. » Donald Trump était certain que la relation qu’il avait tissée avec Vladimir Poutine lors de son précédent mandat serait un atout majeur. Assis depuis deux semaines dans le fauteuil du Bureau ovale, il a pu constater que sur l’Ukraine, il s’était sans doute un peu trop avancé.
D’abord, la situation sur le terrain. En ce début février, le tempo opérationnel s’accélère. Les forces russes progressent. Pokrovsk, Toretsk, Kourakhovo ou Tchassiv Yar, les forteresses ukrainiennes tombent et l’inquiétude grandit. Le risque d’effondrement de l’armée ukrainienne est bien réel. Au sud de Donetsk, les Russes ne sont plus qu’à 4 kilomètres de l’oblast de Dnipropetrovsk, plus favorable pour progresser par sa géographie, et la diminution des zones urbaines et des friches industrielles pour dresser des positions défensives.
La situation militaire continue de se détériorer, remettant en question nombre de certitudes présentées à l’opinion publique comme vérités incontestables depuis le début de la guerre. L’économie ukrainienne est en ruine. Des millions de ses ressortissants sont partis à l’étranger. À cran, la population supporte de moins en moins les recruteurs raflant dans les rues les hommes en âge de combattre. Politiquement, l’autorité de Volodymyr Zelensky est de plus en plus contestée. Cette situation n’est évidemment plus la même qu’à l’époque où Trump faisait campagne. Si, prêtant attention au souhait de Trump d’arrêter la guerre, Poutine s’était montré favorable à un rapprochement, l’avance plus marquée de son armée le conduit logiquement à faire monter les enchères.
Face à cela, Donald Trump a dû réviser son plan de paix plusieurs fois. Il n’a pas l’initiative sur l’Ukraine. Sous la supervision du général Kellogg, connu notoirement pour ses positions anti-Russes et qui a dû mettre de l’eau dans son vin, ce plan envisage une neutralité de l’Ukraine sur dix ans avec une assistance militaire des États-Unis et de l’Otan. En échange de quoi l’Ukraine renoncerait à adhérer à l’Otan, une ligne rouge pour Moscou.
De son côté, l’Union européenne serait chargée de reconstruire le pays dont l’adhésion pourrait intervenir avant 2030. Le plan américain ne reconnaît pas les annexions territoriales opérées par les Russes, que ce soit de la Crimée ou des quatre oblasts conquis, mais Kiev s’engagerait à ne pas modifier le statu quo. Dans les faits, il est devenu clair que les Ukrainiens ne sont plus en mesure de restaurer leurs frontières de 1991. Moscou verrait en parallèle les sanctions qui lui ont été infligées progressivement levées. Une taxe sur les exportations énergétiques russes serait en outre utilisée pour reconstruire l’Ukraine.
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Le plan américain exige aussi la tenue d’élections avant août 2025, ce qui met sur Volodymyr Zelensky une pression supplémentaire. Celui-ci a en effet suspendu les élections après la fin de son mandat, officiellement en raison de la guerre. Il a annoncé cette semaine pour la première fois qu’il était disposé à négocier avec Vladimir Poutine. Mais les Russes veulent négocier directement avec les Américains, et voient d’un très mauvais œil le maintien au pouvoir de celui qui leur a tenu tête pendant les trois ans de guerre. D’où l’idée américaine des élections qui pourraient placer à la tête de l’Ukraine une figure plus conciliante.
L’administration Trump a fait fuiter que si les Russes refusaient l’accord, ils alourdiraient les sanctions et exigeraient de l’Europe qu’elle augmente son financement des dépenses militaires de l’Ukraine, Trump étant déterminé à réduire l’apport américain. Au cours d’une conférence de presse cette semaine, Volodymyr Zelensky a d’ailleurs révélé que les 100 milliards de dollars d’aide américaine ne s’étaient jamais matérialisés.
Officiellement, le montant de l’aide est de 177 milliards. Où est passé l’argent ? Cette nouvelle tombe très mal, en ces temps où Donald Trump a lancé la chasse au gaspillage, avec un redoutable Elon Musk comme contrôleur fiscal en chef. Les Américains ménagent encore les Russes en écartant l’idée de déployer des troupes européennes en Ukraine. Et pour faire en sorte que les Ukrainiens acceptent, ils ont indiqué qu’en cas de refus du plan, l’aide de Washington s’arrêterait immédiatement, ce qui aurait pour conséquence de conduire Kiev à une capitulation presque certaine.
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