La situation à Villeneuve-Saint-Georges préfigure-t-elle les municipales de 2026 pour la gauche ? Arrivé en tête au premier tour de cette élection partielle dans le Val-de-Marne, le candidat LFI Louis Boyard s’est pourtant lourdement incliné au second tour (38,75 %), dimanche 2 février, face à la nouvelle maire LR, Kristell Niamse (49 %). Et ce, malgré le maintien de la liste de l’ancien maire divers droite.
Selon la figure montante insoumise, la cause de cette défaite réside dans le refus de fusion de l’autre liste de gauche (20,70 %), composée des socialistes, écologistes et communistes. Ces derniers avaient conditionné leur alliance, en vain, au retrait de Mohammed Ben Yakhlef, candidat pro-Hamas en septième position sur la liste de Louis Boyard.
La coalition « Ensemble pour Villeneuve » s’est finalement retirée et a appelé à faire « barrage à la droite et à l’extrême droite ». Une consigne insuffisante aux yeux de Louis Boyard. « Où étaient les communistes, les socialistes, les écologistes ? Où étaient-ils quand nous avions besoin de soutien face aux accusations de communautarisme contre notre liste ? Ils n’étaient pas là », a-t-il dénoncé quelques instants après la proclamation des résultats.
À l’inverse, Daniel Henry, tête de liste de la coalition de gauche, rejette la responsabilité sur LFI et tance la nationalisation du scrutin des insoumis : « Les Villeneuvois sont les grands perdants de la division de la gauche, imposée d’en haut. » De son côté, sur X, le mouvement social-démocrate Génération.s déplore que « les stratégies hégémonistes et les mauvais procès entre partenaires tuent les chances de victoire de la gauche ». Et d’ajouter : « La gauche ne peut plus être otage des postures stériles de ceux qui, en son sein, préfèrent s’affronter entre eux plutôt que gagner. »
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Les dirigeants LFI ne cachaient pas la forme de test que représentait cette élection. « Villeneuve-Saint-Georges a la configuration des villes que nous souhaitons conquérir en 2026 », expliquait début janvier au Figaro Manuel Bompard, coordinateur national du mouvement. Ces prochaines municipales sont pour eux en enjeu majeur. Gagner des villes sur leur nom pourrait leur donner une crédibilité politique nouvelle, tout juste un an avant l’élection présidentielle.
Après avoir longtemps enjambé les scrutins intermédiaires, le parti de Jean-Luc Mélenchon pourrait bien parti à l’assaut de nombreuses villes : Sébastien Delogu à Marseille, François Piquemal à Toulouse, Nathalie Ozio à Montpellier, Emmanuel Fernandes à Strasbourg, Marianne Maximi à Clermont-Ferrand, Anaïs Belouassa-Cherif à Lyon ou encore David Guiraud à Roubaix. Certaines sont pour le moment acquises aux socialistes, l’ennemi désigné par le chef de file des insoumis.
« Aux yeux des insoumis, on est fréquentables seulement dans un accord Jurassic Park comme la Nupes ou le NFP »
« Leur objectif est de nous prendre des mairies alors qu’on ne cesse de remonter à la surface », assure au JDD un cadre du Parti socialiste. « Aux yeux des insoumis, on est fréquentables seulement dans un accord Jurassic Park comme la Nupes ou le NFP. Mais quand les dinosaures sortent de l’enclos, ça ne va plus. C’est pourtant ce qui est en train de se passer et Mélenchon ne le supporte pas », poursuit-il. Et d’affirmer : « En 2026, l’idée sera d’éradiquer les “sociaux-traitres” ».
De là à s’allier avec les écologistes pour s’emparer de plusieurs mairies aux mains des socialistes ? Un événement du 7 novembre en donne une indication. Un élu municipal écologiste de Montpellier, Manu Reynaud, a alors été exclu par son parti pour un « comportement contraire aux valeurs » de celui-ci, révèle Libération. Concrètement, il lui est reproché une trop grande proximité avec le maire socialiste de la ville, Michaël Delafosse. Contre ce dernier, Julia Mignacca, porte-parole locale des Écologistes, appelle à « constituer une opposition unifiée et résolue » avec La France insoumise en vue des élections municipales de 2026.
Dans la guerre entre le PS et LFI, les Verts sont souvent utilisés par les uns ou les autres pour isoler leurs concurrents. Mais en 2026, les écologistes seront également au centre du jeu. Il faudra défendre les nombreuses villes gagnées en 2020 comme Lyon, Bordeaux, Poitiers, Strasbourg ou Besançon.
Si un pacte de non-agression a été signé avant Noël entre les socialistes et écologistes, plusieurs affrontements devraient avoir lieu entre « partenaires ». À Paris et à Lille, où les sortants socialistes ne se représentent pas, les écologistes font le pied de grue. Rémi Féraud et Emmanuel Grégoire se disputent la succession d’Anne Hidalgo. Plusieurs verts ont également annoncé leur candidature. Puis dans la ville de Martine Aubry, les socialistes ont compris les ambitions de l’ex-députée européenne écologiste Karima Delli, omniprésente sur le terrain. D’autant qu’il faudra aussi compter sur les insoumis dans ces deux villes. Jean-Luc Mélenchon a dépassé les 40 % à Lille en 2022, mais aussi dans les 18e, 19e et 20e arrondissements de Paris.
« Il faut arrêter de jouer aux alchimistes de la politique et se concentrer sur ce qu’on a en commun »
Plus généralement, « la gauche doit forcément se rassembler si elle veut gagner en 2026 », affirme Rodrigo Arénas, député insoumis de Paris. « LFI ne peut pas gagner tout seul, mais les autres non plus. Je vois en ce moment Marion Maréchal tenter de rassembler les droites. Cette stratégie peut être majoritaire dans beaucoup de communes si nous ne nous rassemblons pas également à gauche. Il faut arrêter de jouer aux alchimistes de la politique et se concentrer sur ce qu’on a en commun », ajoute-t-il, tout en balayant les accusations de sabotage pointées par les socialistes.
« Je ne crois pas à un accord national avec LFI », indique de son côté un haut placé du PS, préférant miser sur les écologistes. « Mais il est possible d’avoir des accords ponctuels. Ça peut dépendre des personnalités dans les villes en question. Heureusement que tout le monde n’est pas Louis Boyard. De nombreux militants LFI sont issus du PS et avec ceux-là, la négociation est davantage réalisable », continue-t-il. Avant de conclure : « Jamais des municipales ne seront autant politiques. Et les résultats seront primordiaux pour se positionner en 2027. »
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