En Martinique, 26 % de la population seulement a moins de 25 ans, selon l’Insee. Non parce que les enfants ne naissent pas, mais parce qu’ils partent. Un exode qui fragilise l’équilibre démographique : la Martinique est la région française avec la part la plus élevée de plus de 60 ans. S’ajoute à ce problème celui de l’oisiveté : un quart des jeunes Martiniquais n’est investi ni dans un emploi, ni dans des études ou dans une formation. Une proportion deux fois plus importante qu’en métropole, qui pèse notamment sur le secteur touristique qui manque de personnel.
D’autant que l’automne, rythmé par des manifestations contre la vie chère, a détérioré la réputation de l’île. « Des images de blocages ou de voitures brûlées ont été diffusées dans toute la métropole. Elles ont pu dissuader les touristes de venir alors qu’ils n’ont pas été touchés par les émeutiers », témoigne Patrice Fabre, président du Groupe Fabre Domergue, propriétaire des hôtels Karibea.
Un contexte qui n’a pas refroidi toutes les velléités entrepreneuriales. Les projets sont nombreux, comme celui d’un second hôtel cinq étoiles. Guillaume Gallet de Saint-Aurin, cofondateur du cabinet Sintorin, se réjouit : « Plus de deux cents millions d’euros sont investis dans les projets hôteliers, et deux cents autres à venir. Jamais nous n’avons eu autant de projets ! »
En réfléchissant à long terme au tourisme de l’île, l’école Vatel, premier groupe mondial de l’enseignement du management de l’hôtellerie, a ouvert ses portes en Martinique à la rentrée 2021. Un projet qui répond aux attentes de la profession : « Nous avons interrogé les professionnels pour évaluer la demande d’emploi, raconte Patrice Fabre : plus de dix mille postes sont nécessaires. Le besoin de formation est urgent ! » Installée à Fort-de-France, en partenariat avec le groupe Fabre Domergue, l’école compte une cinquantaine d’étudiants en alternance.
« Nous avons fait un choix qui convient aux entreprises », se félicite Frédérique Dispagne, directrice de l’établissement, elle-même diplômée de Vatel Paris. Le programme, calqué sur les saisons touristiques, prévoit que les étudiants soient en entreprise de mi-novembre à fin avril, et en cours théoriques le reste de l’année, hors saison. « Parmi nos étudiants, seulement un est en alternance à Paris et deux en Guadeloupe, poursuit-elle. Le reste travaille dans les hôtels et restaurants locaux, avec l’ambition d’y rester. »
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Le besoin est urgent : plus de 10 000 postes sont nécessaires
Mais pour réellement relancer le secteur touristique, un autre travail de fond doit être mené : celui de la valorisation des métiers de services. « Nous avons du mal à recruter parce qu’il y a un manque de formation, c’est vrai. Mais pas uniquement, explique Enguerrand Fabre, directeur du Groupe Fabre Domergue. Beaucoup ne souhaitent pas exercer ces métiers en les jugeant dégradants. » Pour Frédérique Dispagne, il existe une regrettable confusion entre « le service et la servitude ».
Leur travail consiste à redorer l’image des postes en hôtellerie-restauration. Surtout qu’ils permettent de faire découvrir la culture locale, de plus en plus recherchée. « Nous remarquons une mutation du type de tourisme, explique Patrice Fabre. Il y a une forte demande de retour à ce qui est local, la volonté de se plonger dans le décor de l’île avec tout ce que ça implique, notamment de richesses gastronomiques ! »
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