L’essentiel
- Laure Zacchello, une mère de famille de 43 ans, a disparu depuis le 21 juin 2024 au Pays basque. Son mari, Alexis Juret, fait figure de principal suspect.
- L’homme est soupçonné d’avoir simulé son agression pour maquiller le meurtre de sa femme. Il est mis en examen pour « meurtre sur conjoint » et placé en détention.
- La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Pau doit se prononcer ce mardi sur sa demande de remise en liberté.
Les proches de Laure Zacchello ne se font plus d’illusions. « Malheureusement, on sait qu’aujourd’hui, on recherche un corps. Nous n’avons plus d’espoir de la retrouver vivante », confie Me Frédéric Dutin, l’avocat de ses parents. Cette mère de famille basque est portée disparue depuis plus de six mois. Malgré les appels à témoins, les battues et les multiples investigations, les enquêteurs peinent à retrouver la trace de cette femme de 43 ans. Dans cette affaire, qui rappelle à maints égards celle de Delphine Jubillar, son mari, dont elle était séparée, fait figure de principal suspect. Il a été mis en examen pour « meurtre par conjoint » et placé en détention provisoire à Mont-de-Marsan, dans les Landes. Ce mardi, il sera fixé sur sa demande de libération conditionnelle.
Tout a commencé par une histoire de « doudous » oubliés un soir de la Fête de la musique. Le 21 juin, Alexis Juret confie ses trois enfants de 5, 7 et 9 ans à ses parents afin d’aller profiter de la soirée avec des amis. Jusque-là, rien d’anormal : les grands-parents, qui vivent comme leur filsà Urrugne, dans les Pyrénées-Atlantiques, ont l’habitude de s’occuper de leurs petits-enfants. Mais ce soir-là, le quadragénaire, professeur de mathématiques, a oublié de leur donner les peluches des plus petits. Ses proches sont surpris : l’homme est décrit par tous comme extrêmement méticuleux. Et surtout, son téléphone sonne dans le vide. Après plusieurs essais infructueux, la sœur d’Alexis Juret – présente chez ses parents – décide de faire un saut dans la maison avec l’aînée de ses nièces. Il est alors un peu plus de 21 heures.
« J’ai vu qu’il bougeait ses quatre membres »
A peine sont-elles arrivées que la fillette aperçoit son père allongé, inconscient, devant le pavillon. Sa tante, médecin, lui intime de remonter dans la voiture le temps qu’elle fasse ses premières constatations. Aux policiers, elle confiera avoir d’abord cru que son frère était mort. « Il a commencé à gémir […], j’ai vu qu’il bougeait ses quatre membres mais il avait très mal aux bras », précise-t-elle. Elle note la présence d’un imposant parpaing à quelques centimètres de sa tête. En attendant l’arrivée des secours, elle se met à la recherche de sa belle-sœur, Laure, dont la voiture se trouve dans la cour.
La présence du véhicule la surprend : son frère et sa belle-sœur sont séparés depuis le début de l’année. Pour ne pas perturber les enfants, ils ont fait le choix de se relayer dans la maison familiale. Ce jour-là, Laure Zacchello devait quitter les lieux à midi, et lui arriver à 14 heures. Un emploi du temps strict pour éviter de se croiser tant la situation est conflictuelle. « Ces derniers mois, Laure portait systématiquement une caméra sur elle dès qu’elle savait qu’elle allait croiser son ex-conjoint », assure Me Frédéric Dutin, l’avocat de ses parents. Cette ex-infirmière militaire, reconvertie en thérapeute, avait également pris l’habitude de caler une chaise devant sa porte lorsqu’elle dormait et gardait systématiquement ses documents avec elle. « Elle se sentait traquée et ne dormait plus, c’était une situation très lourde », insiste le conseil.
« La violence du choc lui a fait totalement oublier cet après-midi »
En février 2024, Laure Zacchello a déposé une main courante pour le vol des clés de son cabinet. S’ensuit alors une altercation entre les ex-conjoints. Quelques jours plus tard, c’est au tour d’Alexis Juret de pousser la porte du commissariat, accusant son ex-compagne de l’avoir mordu. Selon l’avocat des parents, cette dernière avait décidé d’engager une procédure devant l’échec du divorce par consentement mutuel. Ce que nie l’avocat d’Alexis Juret, Me Vincent Faget. « Il n’y a aucune assignation dans ce dossier. Depuis mars, ils étaient tombés d’accord sur les modalités de la garde alternée. C’était un divorce qui était en pourparlers. »
Mais ce 21 juin, nulle trace de Laure Zacchello. La sœur d’Alexis Juret inspecte toutes les pièces, tente de lui téléphoner, mais l’appareil est posé dans la cuisine. Son sac et ses papiers sont également retrouvés dans la maison. Les jours passent et la mère de famille est introuvable, malgré les moyens déployés. Pour ses proches, l’hypothèse d’un départ volontaire est totalement exclue. « C’est une femme qui était très proche de sa famille et particulièrement investie dans l’éducation de ses enfants », insiste Me Frédéric Dutin. Son ex-conjoint, lui, jure n’avoir aucun souvenir des faits. « La violence du choc lui a fait totalement oublier cet après-midi. Mon client demande, depuis le début de l’affaire, que les recherches pour retrouver sa femme se poursuivent », précise son conseil.
« Survivaliste, sportif et chasseur »
Dès le début de l’affaire, pourtant, les soupçons se portent sur Alexis Juret : il est soupçonné d’avoir feint son agression pour maquiller le meurtre de sa femme. L’information judiciaire est d’emblée ouverte pour « homicide par conjoint ». Plusieurs éléments intriguent les enquêteurs. Si la maison ne présentait aucune trace d’effraction, les deux armoires fortes contenant des armes ont été ouvertes avec la clé. Or, les armes ont disparu. Celles-ci étaient détenues légalement : Alexis Juret, ancien officier de réserve de la gendarmerie, est « un survivaliste, sportif et chasseur qui connaît parfaitement bien l’arrière-pays », avait précisé, une semaine après les faits, le procureur de la République de Bayonne, Jérôme Bourrier, évoquant la « personnalité froide et mutique, sans empathie » du mis en cause. L’une des armes sera retrouvée quelques jours plus tard dans un puits, à proximité de la maison.
Un autre élément retient l’attention des enquêteurs. Lors de sa déposition, la sœur d’Alexis Juret a affirmé avoir vu un parpaing à proximité du corps inconscient de son frère. Or, explique-t-elle, lorsqu’elle est revenue après avoir cherché sa belle-sœur, celui-ci avait disparu. « C’est un esprit très ordonné, il a remis presque mécaniquement le parpaing avec les autres [la maison était alors en travaux]. Il faut y voir un geste mécanique », explique son avocat, Me Vincent Faget. Longuement interrogé par les magistrats instructeurs à la mi-décembre, Alexis Juret a répété cette version des faits, affirmant qu’il était totalement étranger à la disparition de son épouse. Une nouvelle audition est prévue à la fin du mois. En parallèle, des recherches doivent être menées en France et en Espagne pour tenter de retrouver le corps de la victime.