Un fait divers qui relance une bien mauvaise réputation… Dimanche dans les Pyrénées, un serpent a mordu un quadragénaire qui se trouve depuis dans un « état grave ». La victime était en pleine sieste au moment des faits. Inquiétant ? « Dans 95 % des cas, les serpents ont le réflexe de fuir face à l’homme ou de se camoufler tellement bien qu’on ne les voit pas. Pour eux, nous sommes des prédateurs et ils ne viennent pas au contact », nuance Cédric Baudran.
L’expert herpétologue de l’Office national des forêts (ONF) ne le nie néanmoins pas : ce qui est arrivé ce week-end n’a rien d’illogique. « Car les serpents cherchent la chaleur et peuvent venir se coller le long d’un corps, un peu comme les chats. Alors le moindre mouvement peut provoquer un sentiment d’écrasement vu comme une agression par l’animal. » Qui va alors contre-attaquer avec son venin… loin d’être toujours mortel, surtout en France « Il y a une peur mythique du serpent », insiste le spécialiste, avant de s’attacher, pour 20 Minutes, à chasser ces croyances.
Les serpents sont-ils tous venimeux ?
Non, pas du tout. Bien sûr, le mamba noir, le cobra royal ou le crotale font partie de l’imaginaire collectif mais… c’est quasi impossible de les croiser dans l’Hexagone. A moins qu’un irresponsable ne relâche son Nouvel animal de compagnie (Nac) dans la nature. Mais sinon, « il y a 13 espèces de serpents en France. Neuf de couleuvres et quatre de vipères, dont trois sont venimeuses », reprend Cédric Baudran. « Chez les couleuvres, seule celle dite “de Montpellier” a du venin mais il y a très peu de chances que ses crochets se plantent dans votre peau. Les autres sont complètement inoffensives. » Une morsure n’est, elle, pas toujours venimeuse. « Car c’est très énergivore pour eux d’en produire dans leurs glandes, qui se trouvent derrière leurs yeux. Leur réservoir, ce n’est même pas l’ongle de mon petit doigt », poursuit l’expert.
Que faire en cas de morsure ?
« C’est facile à dire mais il faut rester calme », prône Cédric Baudran. « Si vous avez la possibilité, prenez d’abord une photo du serpent, ça permettra de l’identifier. Puis il faut se rendre dans un centre de soin. Sans paniquer mais sans non plus prendre le temps de finir son pique-nique ! » Alors les secours injecteront souvent un sérum afin d’annihiler l’effet du venin. Dans la grande majorité des cas en France, celui-ci n’est pas mortel. « Il n’y en a pas de neurotoxique mais il peut provoquer des nécroses. C’est pour ça que c’est important de se faire soigner. » Parfois, et c’est le cas dans le fait divers des Pyrénées, des personnes peuvent être saisies d’un choc anaphylactique, c’est-à-dire d’une grosse réaction allergique qui peut être plus grave et devra également être rapidement traitée. « Vous n’allez pas mourir dans les minutes qui suivent », insiste l’herpétologue.
Les serpents causent-ils beaucoup de décès ?
Pas en France. Selon une étude publiée en octobre 2022 dans Nature Communications, plus de 63.000 personnes étaient mortes de morsures de serpent en 2019. Dont 80 % en Inde. « En France, une personne décède d’une morsure de serpents tous les cinq à dix ans », indique Cédric Baudran. « Ça reste donc très rare. On peut par exemple comparer ce chiffre aux près de 3.500 morts sur la route chaque année… » Il faut dire aussi que les couleuvres et vipères ne sont pas actives toute l’année. « A partir d’octobre, novembre, elles se mettent en repos hivernal et ressortent au printemps. C’est surtout à ce moment-là qu’on risque d’en voir, un peu moins l’été. »
Comment différencier les serpents ?
Déjà, tous les Français n’auront pas les mêmes chances (ou malchances) d’en croiser. Si aucun décompte précis de leur population n’a été effectué, « le pourtour méditerranéen » est l’endroit où se trouvent le plus d’espèces. « On en trouve aussi pas mal dans l’Ouest et aussi dans le Centre à cause des restes d’anciens bocages. Moins dans le Nord et le Nord-Est ».
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En cas de rencontre, il faudra surtout regarder la taille de l’animal et ses yeux. « S’il fait plus de 70 centimètres, ce sera une couleuvre à coup sûr. Concernant les yeux, les vipères les ont en forme de fente, comme les chats. Pour les couleuvres, c’est une pupille ronde », détaille encore Cédric Baudran en insistant sur un dernier point. Les deux sont désormais protégées et il est donc « interdit de les tuer ». Un plan de sauvegarde est d’ailleurs en cours de rédaction car leurs populations sont en déclin.