“Le Brésil est de retour!”, a lancé le président du Brésil Lula après son élection, le 30 octobre 2022. 12 ans après avoir quitté le pouvoir avec une popularité record à l’issue de ses deux premiers mandats (2003-2010), le candidat – icône insubmersible de la gauche latino-américaine l’a emporté d’une courte tête avec 50,9% des voix, contre 49,1% pour le président sortant d’extrême droite Jair Bolsonaro, à l’issue d’une campagne ultra-polarisée.
L’écart, de moins d’un point de pourcentage, est le plus serré entre deux finalistes de la présidentielle depuis le retour à la démocratie après la dictature militaire (1964-1985).
“À partir du 1er janvier (2023, date de début du mandat, NDLR), je vais gouverner pour les 215 millions de Brésiliens et Brésiliennes, pas seulement ceux qui ont voté pour moi”, a promis Luiz Inacio Lula da Silva, 77 ans, lors de son discours de la victoire dans un hôtel à Sao Paulo.
“Personne ne veut vivre dans un pays divisé, en état de guerre perpétuelle. Ce pays a besoin de paix et d’union. (…) Il n’y a pas deux Brésil, nous sommes un seul peuple, une seule nation”, a insisté l’icône de la gauche, en référence à la présidence clivante de Bolsonaro.
Le come-back de Luiz Inacio Lula da Silva, qui voit sa 6e campagne présidentielle le mener de nouveau à la fonction suprême, est une première dans l’Histoire récente du Brésil. Mais Lula, ancien metallo qui a connu un destin hors norme, revient de loin.
Condamné pour corruption dans le plus grand scandale de l’Histoire du Brésil, “Lavage express”, il avait été incarcéré 580 jours, d’avril 2018 à novembre 2019. Le chef de file du Parti des Travailleurs (PT) s’est toujours dit victime d’un complot politique qui a permis à Bolsonaro d’être élu à la présidence en 2018 alors qu’il en était le grand favori.
En mars 2021, il pouvait de nouveau rêver à une revanche éclatante. La Cour suprême annulait ou prescrivait ses condamnations, lui permettant de recouvrer ses droits politiques, sans l’innocenter pour autant. Pour le Comité des droits de l’Homme de l’ONU, l’enquête et les poursuites engagées contre Lula avaient violé son droit à être jugé par un tribunal impartial.
Rien ne prédisposait Lula à un tel destin, ce cadet d’une fratrie de huit enfants, né le 27 octobre 1945 dans une famille d’agriculteurs pauvres du Pernambouc (nord-est).
Enfant, Lula était cireur de chaussures. Il a sept ans lorsque sa famille déménage à Sao Paulo pour échapper à la misère. Vendeur ambulant puis ouvrier métallurgiste à 14 ans, il perd l’auriculaire gauche dans un accident du travail.
À 21 ans, il entre au syndicat des métallurgistes et conduit les grandes grèves de la fin des années 1970, en pleine dictature militaire (1964-1985). Cofondateur du PT au début des années 1980, il se présente pour la première fois à l’élection présidentielle en 1989 et échoue de peu. Après deux nouveaux échecs, en 1994 et en 1998, la quatrième tentative sera la bonne, en octobre 2002. Il est réélu en 2006.
Premier chef de l’État brésilien issu de la classe ouvrière, il a mis en oeuvre d’ambitieux programmes sociaux, grâce aux années de croissance portées par le boom des matières premières.
Sous ses deux mandats, près de 30 millions de Brésiliens sont sortis de la misère. Lula a aussi incarné un pays qui s’ouvrait sur le monde, et a conféré au Brésil une stature internationale avec, notamment, le Mondial de football (2014) et les jeux Olympiques (2016) à Rio de Janeiro.