Mort le 23 septembre 1970 à 53 ans, André Bourvil a vécu une fin de vie particulièrement douloureuse mais complètement ignorée du grand public.
Chanteur, humoriste et acteur, Bourvil a eu une vie plutôt bien remplie jusqu’à ce que, malheureusement, elle se termine de façon prématurée le 23 septembre 1970 alors qu’il n’avait que 53 ans. Né André Robert Raimbourg, Bourvil a pourtant réussi à s’accrocher à la vie pendant deux ans après avoir découvert son terrible diagnostic. Cancer de la moelle osseuse, non seulement intraitable, mais aussi très douloureux. Le verdict n’est pas tombé par hasard, et c’est dans des circonstances très particulières que l’acteur a par ailleurs appris qu’il ne lui restait plus beaucoup de temps à vivre. Tout a commencé en été 1967, alors que Bourvil est en plein tournage du film Les Cracks, d’Alex Joffé. Jouant le rôle de Jules, l’inventeur d’un vélo révolutionnaire, Bourvil est victime d’un accident alors qu’il est justement sur une bicyclette.
Sur le moment, l’acteur n’a rien de cassé et ne s’inquiète pas outre-mesure malgré une douleur à la jambe qui ne le quittera plus. Quelques années plus tard et souffrant toujours, Bourvil est obligé d’admettre que quelque chose ne va pas, lui qui est pourtant passé pro dans l’art de se voiler la face. L’acteur remet en effet ses problèmes de santé sur divers maux, des rhumatismes aux courbatures en passant par des coliques néphrétiques ou encore un lumbago. Bourvil refuse d’admettre qu’il pourrait être atteint par une maladie grave, persuadé qu’il est que sa bonne hygiène de vie le fera vivre vieux. La désillusion commence en 1969, alors qu’il lui est impossible d’ignorer ses douleurs qui vont jusqu’à l’empêcher de tourner dans les films sur lesquels il travaille.
Les visites chez les médecins et les spécialistes s’enchaînent, et les mauvaises nouvelles s’accumulent. Bourvil est atteint de la maladie de Kahler, et le cancer des os le touche à différents endroits. Si la maladie est quasi invisible en apparence, c’est en réalité des efforts surhumains que fournit Bourvil pour continuer à jouer, et à berner le monde entier auquel il cachera son cancer jusqu’à sa mort. Même face aux visages sérieux voire funestes des médecins, Bourvil croit encore à une guérison et commence donc différents traitements. Mais radiothérapie et chimiothérapie n’y changent rien, son cancer des os progresse et pendant qu’il consulte, les assureurs des films dans lesquels il joue s’arrachent les cheveux. Ça n’empêche pas l’acteur de poursuivre sa carrière et d’assurer à qui veut l’entendre qu’il n’a rien, si ce n’est simplement des rhumatismes. En juin 1969, le réalisateur Jean-Pierre Mocky, avec qui Bourvil a déjà tourné à plusieurs reprises, lui propose le rôle-titre de son prochain film, L’Etalon.
Pour le tournage, Bourvil se fait raser le crâne. Mais ce changement d’apparence n’est pas une nécessité de son rôle comme il l’explique, mais plutôt une astuce afin de masquer les effets de la chimiothérapie sur sa perte de cheveux. L’acteur et ses proches essaient en effet de sauver les apparences puisque la santé de Bourvil a un impact non-négligeable sur les assureurs des films dans lesquels il tourne encore. Ces efforts pour dissimuler sa maladie ne font que le pousser dans le déni, jusqu’à ce qu’il soit finalement rattrapé par son cancer. Après le tournage de son dernier film, Le Mur de l’Atlantique de Marcel Camus, Bourvil ressent plus que jamais la douleur permanente et la fatigue. Le 22 septembre 1970, l’acteur est chez lui à Paris entouré de ses fils. Aux alentours de minuit, il vocalise une dernière fois sa réticence à accepter la mort, “Et pourtant, je ne voulais pas mourir”, avant de s’éteindre vers 1h du matin.