Vingt ans après l’affaire qui a bouleversé sa vie, Jonathan Delay, l’une des victimes reconnues d’Outreau, sort du silence.
C’est une image que la France n’oubliera jamais. Celle du 1er décembre 2005. À l’issu du procès en appel de Saint-Omer (Pas-de-Calais), six des dix personnes condamnées en 2004 dans le cadre de l’affaire d’Outreau sont acquittées. Cela porte à treize le nombre d’accusés innocentés dans le dossier, résultat de ce qui reste encore aujourd’hui l’un des plus grands fiascos judiciaires de France.
Ce 1er décembre 2005, Jonathan Delay s’en souvient comme si c’était hier. Dans le documentaire L’Affaire d’Outreau, diffusé ce mardi 24 janvier 2023 sur France 2, celui qui fait partie des victimes reconnues de l’affaire confie ce qu’il a ressenti le jour où ceux que ses frères et lui avaient accusé sont sortis libres. “On devient coupables, oui. On nous le dit pas comme ça mais c’est le ressenti qu’on a, de toute façon, admet le jeune homme. Et on retourne à nos vies comme si de rien n’était, avec cette culpabilité. J’avais onze ans à l’époque et on se pose des questions, quand même.” Des questions qui n’ont pas toutes trouvé leur réponse. Aujourd’hui âgé de 27 ans, Jonathan confie avoir du mal à démêler le vrai du faux. “Même actuellement. J’ai 27 ans aujourd’hui et il y a énormément de choses pour lesquelles je n’ai toujours pas de réponse.”
Et il n’est pas le seul à avoir ce ressenti. En juillet 2013, lors du procès de Daniel Legrand fils, aussi appelé le “troisième procès d’Outreau”, les frères aînés de Jonathan, Chérif et Dimitri, confiaient souffrir du même sentiment de culpabilité. “La justice nous a rendus coupables de notre propre vécu, alors que nous avons souffert les pires calvaires imaginables”, confiait alors Dimitri, tandis que son frère Chérif renouvelait ses accusations contre certains acquittés : “J’ai toujours dit que neuf personnes avaient participé. Certaines ont été acquittées. Je ne veux plus jouer ce jeu de la justice.”
Vingt ans après, l’affaire d’Outreau laisse donc encore ses marques. Pour rappel, quatre personnes ont été condamnées dans le dossier : Thierry Delay et Myriam Badaoui, les parents des victimes, et leurs voisins de palier, David Delplanque et Aurélie Grenon. Tous avaient admis les faits.