Des messages de menace, un amoureux éconduit et une jeune fille fauchée en bord de route. L’affaire Eva Puddu a posé bien des questions. Le triangle amoureux au coeur de l’enquête a-t-il vraiment fini en meurtre ?
Le 7 décembre 2016, à Izon, petite commune girondine bordée par la Dordogne, Eva Puddu, une adolescente de 18 ans, est fauchée par une voiture alors qu’elle marche tranquillement dans la rue tout en téléphonant à son amoureux, Vincent. Au volant du véhicule, Jérémy Delaveau, un jeune pompier volontaire, ne s’approche pas du corps projeté à une dizaine de mètres du point d’impact. Une absence de réaction qui interrogera d’autant plus la justice que l’accusé a été formé aux premiers secours. Le schéma se complique quand on apprend que Jérémy a tué la petite amie d’un jeune homme dont il était lui-même amoureux. De nombreux indices incriminants laissent penser qu’il s’agit d’un meurtre : absence de traces de freinage, messages menaçants envoyés depuis plusieurs jours, etc.
“Plus Vincent devenait indifférent à vos menaces de suicide, plus vous faisiez monter la pression“, note Me Arnaud Dupin, l’un des avocats des parties civiles lors du procès cinq ans plus tard. L’accusé, 22 ans, n’a pas eu même un mot d’excuses pour la famille d’Eva Puddu. Je ne peux pas demander pardon pour quelque chose d’impardonnable“, justifie-t-il. Au quatrième jour de son procès devant la cour d’assises de Gironde, Jérémy Delaveau soutient mordicus la thèse de l’accident. “Bien sûr, cela paraît trop gros pour être un accident, étant donné le contexte, le triangle Vincent, Eva et moi. Mais c’est un accident. Jamais je n’ai voulu tuer Eva“, assure le jeune homme. Après le rappel des faits, l’un des premiers pompiers arrivé sur les lieux évoque alors la découverte macabre du corps sans vie d’Eva, “toute cassée de l’intérieur“.
“Mes jambes n’arrivaient pas à me porter jusqu’à elle, répond Jérémy Delaveau du tac au tac. Sous le choc, ça peut arriver. Je l’ai vu dans des reportages.” Il y a pourtant cet appel passé à Vincent quelques minutes avant d’appeler les secours : “Tu sais ce que j’ai fait ? Elle est morte, je l’ai tuée“. Un “automatisme“, selon l’accusé. “Puis, juste après, à un opérateur du Samu, vous dites avoir percuté Eva sciemment. Si c’est un accident, pourquoi dire cela ?“, l’interroge alors le président. Jérémy Delaveau n’évite pas la question difficile : “À ce moment-là, je suis mal. Alors je m’accuse.” Le 7 décembre après l’accident, le pompier volontaire connaît déjà son sort. “Je vais passer le reste de ma vie en prison“, aurait-il confié à un secouriste. La thèse de l’accident ne tient pas aux yeux de la justice. Reconnu coupable d’assassinat, Jérémy Delaveau purge aujourd’hui une peine de 20 ans de réclusion criminelle assortis d’un suivi-socio judiciaire de 3 ans.