Début décembre 1956, Régine Fays, 19 ans, est retrouvée morte dans un fossé près d’Uruffe, en Meurthe-et-Moselle. Le début d’un faits-divers sordide ayant plongé tout un pays dans l’horreur.
En Meurthe-et-Moselle, la petite ville d’Uruffe ne fait jamais parler d’elle. Peut-être même ne connaissez-vous pas son existence. Pourtant, dans la seconde moitié des années 1950, cette petite bourgade d’à peine 400 habitants a été le théâtre d’une des plus sordides affaires de la décennie. Tout commence le 3 décembre 1956. Ne voyant pas leur fille enceinte rentrer pour le dîner, les parents de Régine Fays, 19 ans, alertent le maire d’Uruffe, le petit village où ils vivent avec leurs cinq enfants. Sans attendre, le curé fait sonner le tocsin. Des dizaines d’habitants sortent de chez eux pour chercher l’adolescente. Ils appellent son nom, inlassablement, mais Régine ne répond pas et ne répondra jamais.
Vers une heure du matin, le père Guy Desnoyers trouve le corps sans vie de Régine dans un fossé. Abattue de trois balles dans la nuque, elle a été éventrée au couteau. Son bébé, sorti de force, gît à côté d’elle, le visage tayadé. Les premières constatations faites, la police ouvre une enquête. Elle commence par interroger les proches de Régine et font une découverte déconcertante. Personne, dans l’entourage de l’adolescente, ne connaît l’identité du père de son bébé. Régine refusait de donner son nom.
Il apparaît toutefois qu’elle s’était confiée à une personne : Guy Desnoyers, le curé du village, âgé de 26 ans. Ce dernier affirme que Régine a été violée par un homme parti pour la guerre d’Algérie. Toutefois, sa version ne convaint pas les autorités. Il faut dire que les preuves s’accumulent contre le prêtre. D’abord, la douille de 6,35mm retrouvée près du corps de Régine correspond au calibre du port d’arme dont Desnoyers est détenteur. Ensuite, Michèle, une amie de l’adolescente, affirme que Régine lui aurait avoué que le père de son bébé était le curé lui-même…
Le 5 décembre 1956, Guy Desnoyers est interpellé. Il nie d’abord toute implication dans la mort de Régine, mais, acculé, finit par passer aux aveux. Il explique s’être amouraché de l’adolescente lors d’une activité théâtrale organisée par sa paroisse. Début 1956, Régine s’est retrouvée enceinte de lui. Elle a alors promis de garder le secret de la paternité de l’enfant, mais a refusé d’accoucher clandestinement et d’abandonner le bébé. Dans un premier temps, Desnoyers a accepté sa décision. Il confie toutefois avoir fini par prendre peur. Dans la soirée du 3 décembre, il a entraîné l’adolescente sur une petite route déserte. Après lui avoir proposé plusieurs fois l’absolution, qu’elle a refusée, il l’a tuée de trois balles dans la nuque. Il a ensuite sorti son bébé vivant, une fille, qu’il a baptisée avant de la tuer à coups de couteau. Enfin, il a défiguré l’enfant pour effacer toute éventuelle ressemblance avec lui. La France, plongée dans l’horreur, parle d'”acte satanique“.
Épouvantable, le récit du curé donne lieu à de nouvelles révélations. Il apparaît qu’en décembre 1953, Guy Desnoyers avait mis enceinte une autre adolescente : Michèle Léonard, 15 ans. Sous la pression de l’homme d’église, cette dernière avait accouché candestinement dans l’Ain et abandonné son bébé à l’Assistance publique. Pendant le procès, tenu du 24 au 26 janvier 1958, d’autres de ses pêchés sont mis en lumière. Il est révélé que Desnoyers avait de nombreuses maîtresses, souvent mineures, à qui il soutirait de l’argent “pour ses bonnes oeuvres“.
Le 26 janvier 1958, Guy Desnoyers est condamné aux travaux forcés à perpétuité. Il déclare alors : “Je suis prêtre, je reste prêtre, je réparerai en prêtre. Je m’abandonne à vous parce que je sais que devant moi vous tenez la place de Dieu.” Incarcéré pendant 22 ans, il est libéré le 5 août 1978 et se retire en l’abbaye Sainte-Anne de Kergonan à Plouharnel. Il y meurt le 21 avril 2010, à l’âge de 90 ans.