C’était le 6 août 1985, pourtant la mort de l’animateur Philippe de Dieuleveult reste toujours un mystère. Retour sur un soi-disant accident qui pose question.
Philippe de Dieuleveult a eu plusieurs vies et, à en croire les rumeurs, il a également eu plusieurs morts. Celui qui est surtout connu pour son rôle d’animateur de l’émission La Chasse aux trésors entre 1981 et 1985 pour Antenne 2 avait en effet une activité parallèle : celle de capitaine de réserve de la direction générale de la Sécurité extérieure, aussi connue sous le nom de DGSE. Ce rôle de réserviste au sein des services de renseignement français a été à l’origine de quelques hypothèses mais à ce jour, la vérité sur la mort du journaliste Philippe de Dieuleveult n’a toujours pas éclaté.
La mort de Philippe de Dieuleveult dans les faits
Selon les éléments connus, l’animateur est mort le 6 août 1985 au Zaïre, le nom que la République démocratique du Congo a porté entre 1971 et 1997 pendant que Mobutu était au pouvoir. Il était alors en train de descendre le fleuve Zaïre en rafting avec plusieurs compagnons dans le cadre de l’expédition Africa-Raft, dont six sont également morts ce jour-là. C’est au niveau des chutes d’Inga que le groupe aurait disparu. Deux autres personnes qui devaient partir avec eux mais qui ont finalement décidé de rester en arrière ont essayé de contacter leurs embarcations par radio à plusieurs reprises, sans succès. Ils décident alors de se rendre au barrage d’Inga à pieds, un barrage surveillé par les forces militaires du pays auxquelles un télex a été transmis depuis Kinshasa afin de signaler le passage de deux canots de rafting. Selon les deux membres de l’expédition restés sur la terre ferme cependant, “le responsable de la sécurité a gardé le message sous son coude et a envoyé des patrouilles sur les rives”.
Les différentes théories
A cause de la présence de militaires sur le barrage de l’Inga, certains pensent que Philippe de Dieuleveult a été tué volontairement. C’est une hypothèse nourrie notamment par un livre écrit par un ex-officier des services secrets zaïrois, Okito Bene-Bene, qui affirme avoir assisté à l’exécution de l’animateur. Selon lui, les autorités du pays pensaient que Philippe de Dieuleveult était proche du régime libyen et auraient donc cherché à l’éliminer. L’ex-officier fait par ailleurs une description sombre des dernières heures de Philippe de Dieuleveult, qui aurait été emprisonné puis interrogé pendant plusieurs heures avant d’être exécuté le 9 août 1985 avec quatre des personnes qui se trouvaient alors avec lui.
Cette théorie de l’assassinat a été confortée par un autre écrit : le reportage de la journaliste Anna Miquel publiée dans le magazine XXI en 2008. Au cours de plusieurs séjours en République démocratique du Congo, la journaliste a en effet réussi à interroger des membres de la garde rapprochée de Mobutu, dictateur du Zaïre à l’époque des faits. Ces hommes auraient alors confirmé avoir participé à l’arrestation et à l’exécution de Philippe de Dieuleveult et de ses compagnons. Grâce à ses recherches, Anna Miquel s’est également procuré un procès verbal qui confirme que Philippe de Dieuleveult n’est pas mort par noyage le 6 août comme l’ont dit les autorités. En effet sur ce procès verbal qui d’interrogatoire qui date du 8 août figure la signature de l’animateur de La Chasse aux trésors authentifiée par son frère, signe qu’il était alors toujours vivant. Bien que les autorités françaises questionnées à ce sujet aient été catégoriques sur le fait que Philippe de Dieuleveult n’était pas en mission lors de son séjour au Zaïre, certains continuent de penser que c’était le cas et que c’est ce qui a causé sa mort.
Une autre théorie, faisant suite au fait que l’avertissement de Kinshasa pour prévenir les militaires présents sur le barrage du passage de Philippe de Dieuleveult n’ait pas été transmis, penche pour la théorie de la bavure. En effet si les militaires zaïrois présents sur le barrage ignoraient qu’un groupe devait le franchir en rafting, les soldats auraient pu faire feu afin de le protéger en prenant le groupe pour des ennemis. Le neveu de l’animateur, Alexis de Dieuleveult, fait partie de ceux qui pensent que son oncle a été victime d’une bavure militaire.
Et son hypothèse va de pair avec le témoignage de Jean-Louis Amblard, un des deux hommes qui n’est pas monté dans un canot pneumatique ce jour-là. Lors d’un procès verbal établi par la brigade criminelle de Paris des années après la tragédie, il explique que les soldats du barrage de l’Inga ont tenu des propos étranges lors de leur arrivée avec son compagnon de route. Selon lui, ils leur auraient dit : “s’il est arrivé quelque chose à vos amis, ce n’est pas de notre faute”. Avec François Laurenceau, également resté en arrière, il finit par être interrogé par les soldats. “J’ai compris qu’ils voulaient gagner du temps, j’ai compris aussi que les militaires qui gardaient le barrage n’avaient pas été avisés de notre passage”.
Une conclusion incertaine
La thèse officielle suite à la mort de Philippe de Dieuleveult est toujours la noyade après le chavirement tragique de son embarcation, le canot pneumatique Françoise. Pourtant le livre d’un ancien officier zaïrois et le reportage de la journaliste Anna Miquel semblent indiquer que Philippe de Dieuleveult et son groupe ont en réalité été appréhendés par les autorités du pays, mené à l’époque par le dictateur Mobutu. Enfin le fait que les militaires alors présents sur le barrage de l’Inga n’aient peut-être pas été prévenus du passage du groupe de Philippe de Dieuleveult aurait pu provoquer, à minima, une bavure militaire et l’assassinat accidentel de tous les disparus.