INFO BFMTV – D’après des éléments recueillis ce lundi matin, un contrat, stipulant notamment l’organisation d’une épreuve de karting, avait bien été établi entre la production de “Kohlantess” et l’administration de la prison de Fresnes. Contacté, la Chancellerie nie toutefois avoir eu connaissance du document qui fixait la feuille de route de cette compétition récréative qui a mêlé détenus et surveillants le 27 juillet dernier.
La diffusion vendredi d’une vidéo montrant détenus et surveillants de la prison de Fresnes, dans le Val-de-Marne, concourir ensemble à un tournoi baptisé “Kohlantess“, en hommage à la célébre émission télé, a agité la classe politique tout au long du week-end. Droite et extrême droite ont ainsi jugé indécentes les images de prisonniers au volant de kart ou participant à des jeux aquatiques. Tandis que le garde des Sceaux a annoncé le lancement d’une enquête administrative, c’est bien la question du degré d’information des institutions en amont de l’événement qui se pose à présent.
Un document que nous nous sommes procurés ce lundi matin permet d’y voir un peu plus clair: BFMTV a en effet pu obtenir le contrat conclu entre la production de “Kohlantess” et l’administration du centre pénitentiaire de Fresnes. Contacté, le ministère de la Justice assure toutefois n’avoir pas eu connaissance de cet accord.
La feuille de route, établie en deux exemplaires et signée le 25 juillet dernier – soit deux jours avant l’événement -, évoque sans détour l’organisation de “4 épreuves d’environ 30 minutes à 1h”. Ce contrat passé entre la production et la prison de Fresnes détaille ensuite ces quatre épreuves: “Questions pour un Mario ; le parcours Kart du combattant ; Plonge avec les stars ; tir à la corde au-dessus du bassin d’eau”.
Enzo Angelosanto était partie prenante de ce contrat. Et pour cause, il est le producteur de “Kohlantess”. Présent ce lundi matin sur notre plateau, il a d’ailleurs souligné: “On n’allait pas mettre en péril la production, donc on a convenu d’une convention avec l’administration pénitentiaire de Fresnes. Il est indispensable en tant que producteur d’avoir quelque chose de contractuel.”
Par définition, un contrat – ou ici une convention – implique l’observation d’obligations. “On devait faire valider l’ensemble des images”, a ainsi fait valoir Enzo Angelosanto. Oui mais valider par qui? “Et ça devait passer par des représentants du ministère de la Justice affiliés au cabinet”, a rétorqué le producteur.
“Tout a évidemment été validé, on n’aurait jamais mis le ministère de la Justice en porte-à-faux. On a un service de chez nous, une fois le montage finalisé, on a envoyé plusieurs versions”, a-t-il martelé.
La Place-Vendôme a également réagi à la révélation de ce document. Le ministère de la Justice a concédé qu’une convention avait bien été signée entre la prison et les organisateurs mais a affirmé ne pas avoir eu connaissance du contrat. La Chancellerie soutient qu’elle n’a été sollicitée – qu’il s’agisse du cabinet ou de son service de communication – que lorsque des médias, en l’occurrence Konbini et Le Parisien, ont été conviés à assister aux épreuves.
Dominique Simonnot, contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, a livré sur notre antenne son sentiment quant à ces deux versions. “Un événement pareil ne peut pas se faire sans des accords au plus haut niveau”, a-t-elle posé, tout en continuant:
“Sans doute le ministre n’était-il pas au courant de la course kart. Mais ces deux minutes de course valent-elles vraiment cet emballement médiatique?” s’est-elle toutefois interrogée, enchaînant: “Cette enquête administrative à mon avis va être vite bouclée car il y a un contrat où tout est écrit”.
Dominique Simonnot a mis “Kohlantess” en perspective avec le panorama des activités proposées en prison, des activités dont elle a d’ailleurs dénoncé le trop faible nombre selon elle compte tenu des effectifs carcéraux. “Bien d’autres choses et activités se passent dans les prisons – du VTT, du cheval, des matchs de foot, de l’escalade entre détenus et surveillants – simplement, les images n’en sont pas publiques”, a-t-elle remarqué.
“En France, on est un pays où quand les choses se font en cachette tout va bien, et où quand les choses deviennent publiques elles se gâtent. C’est d’une particulière mauvaise foi.”
D’après Enzo Angelosanto, “Kohlantess” vient en tout cas de loin. Le concept lui-même est né il y a cinq ans. Toutefois, c’était la première fois qu’il poussait les portes d’une prison et mêlait surveillants et détenus. Revenant sur la genèse du tournoi du 27 juillet, il a retracé:
“Nous étions en contact depuis plusieurs mois avec une coordinatrice de Fresnes. On les a mis en confiance, on leur a proposé cette émission”.
Un travail d’approche qui a peut-être permis d’établir un contrat mais qui n’aura pas empêché la polémique politique à l’évidence.