Plusieurs femmes ont apporté leurs témoignages dans une longue enquête mise en ligne ce jeudi par Mediapart dans laquelle l’une d’entre elles évoque notamment un viol commis par le vulgarisateur scientifique star, qui cumule plus d’un million d’abonnés sur YouTube. Pour l’heure aucune plainte n’a été déposée.
Dans une enquête publiée ce jeudi, Mediapart a recueilli les témoignages de huit femmes qui mettent en accusation le youtubeur Léo Grasset, alias DirtyBiology, star de la vulgarisation scientifique sur la plateforme de vidéos en ligne.
Sa chaîne, créée en 2014, comptabilise 1,3 millions d’abonnés. Son succès est tel, que le vidéaste est devenu avec le temps co-créateur d’une émission avec Arte, et auteur de plusieurs livres à succès parus dans des grandes maisons d’édition. Ça c’est pour le côté pile. Côté face, l’homme, âgé de 32 ans, est accusé d’un viol et de violences sexuelles et psychologiques.
Lisa, dont le prénom a été modifié à sa demande, raconte à nos confrères avoir entretenu dès 2010 une relation à distance avec DirtyBiology qui vit à ce moment-là à l’étranger. Elle-même youtubeuse scientifique, la jeune femme d’une vingtaine d’années se souvient d’abord d’un homme “charismatique et très gentil”. Ce n’est qu’en 2015 qu’ils se rencontrent et couchent ensemble. La relation sera ainsi jonchée de pauses. L’enquête relate:
“Ils se voient de temps en temps, auraient parfois des relations sexuelles. Puis il disparaît de nouveau, sans qu’elle ne sache où, ni avec qui. Parfois, dans des forums de vidéastes, il se moque d’elle, mais, en privé, revient vers elle. “Le truc qui est devenu excessivement malsain, c’est que j’étais retombée dans l’engrenage de l’admiration, de l’emprise”, raconte la jeune femme.”
Surtout, la jeune femme décrit une scène particulièrement violente survenue en 2016. Alors qu’ils devaient se voir, le youtubeur préfère passer la soirée avec des copains à Paris avant de finalement retrouver la jeune femme. C’est fortement alcoolisé, d’après les témoins, qu’il la retrouve. Il veut alors coucher avec elle, mais elle ne veut plus.
“Je lui dis plusieurs fois que je n’ai pas envie”. Après des caresses, elle aurait essayé “de se décaler”. Un geste qui aurait provoqué une “espèce de switch dans son regard”.
Léo Grasset l’aurait ensuite “maintenu avec ses mains autour de son cou” et “pénétrée avec des coups très fort”.
Après cet épisode, Lisa, qui n’a pas porté plainte comme aucune des accusatrices, aurait subi une campagne de dégradation afin de ternir sa réputation dans le milieu de la vulgarisation scientifique. C’est ainsi qu’une comédienne proche de la jeune femme explique avoir passé une soirée avec Léo Grasset au Québec à l’automne 2017. Échangeant tous les deux autour de la notion de “stalking”, le youtubeur aurait balancé:
“J’en connais une bonne, moi, de stalkeuse, ta pote”. Et d’ajouter selon les propos rapportés par Mediapart, “Et moi je lui ai bien défoncé les muqueuses”.
Au total, elles sont sept autres jeunes femmes à témoigner contre Léo Grasset pour violences psychologiques et comportements “toxiques”. La plupart décrivent un youtubeur “très collant”, voire manipulateur.
Sollicité à plusieurs reprises par Mediapart, Léo Grasset n’a pas souhaité répondre. Ses avocats l’ont fait pour lui par e-mail:
“Nous ne souhaitons pas répondre aux sollicitations de presse, Monsieur Grasset se tenant à disposition de l’autorité judiciaire dans l’hypothèse où celle-ci était saisie de ces allégations. Nous prendrons bien sûr connaissance de votre article, espérant qu’aucune atteinte ne vienne à être portée au respect de son droit à la présomption d’innocence”.
Auprès de Romain Monté, vulgarisateur linguistique, Léo Grasset s’est en revanche montré plus loquace. En effet, lorsque celui-ci le contacte en avril sur Facebook parce que choqué des révélations que lui a fait une des accusatrices, Grasset se serait montré indifférent:
“J’ai clairement des torts hein. (…) Y’a un peu de slut-shaming [stigmatisation du comportement sexuel de certaines femmes – ndlr] là dedans effectivement, un peu de vraie merde que j’ai faite ici et là et du story telling”.
Ce jeudi soir sur Instagram, face à l’ampleur de la polémique, il a fini par réagir: constester “Je conteste totalement les accusations relayées à mon encontre”.